
Numides , la cavalerie étoit compofée de défulteurs, qui
conduifoient au combat au moins deux chevaux. Lorfque
celui qu'ils montoient étoit' fatigué , ils fautoient avec
beaucoup d’agilité &c beaucoup d’adreffe fur le cheval
de main qu'ils conduifoient. Les Grecs & les Romains
prirent-cet ufage des Barb.ares j mais ils les imitèrent feulement
dans les jeu x , & non dans les combats. Chez
eux les baladins conduifoient quatre & même fix chevaux
de front j ils fautoient du premier fur le quatrième
ou fur le fixième. C'étoit là , dit Euftathe ( lliad. lib. 4) ,
ce qu'il y avoit de plus difficile.
Les cavaliers ne portoient point une chauffure differente
de celle des fantaffins. Du moins les monumens ne
nous apprennent rien fur cet objet. Nous favons feulement
qu'ils portoient des'éperons. Les auteurs grecs &
latins en font mention> mais nous n'en voyons aucune
trace fiir les monumens antiques 3 à moins que l'on ne
prenne pour les liens de l'éperon cette courroie qui entoure
le coudepied gauche de l'Amazone du Capitole ,
placée aujourd'hui dans le mufée français. Caylus {liée,
d'antiq. tom. 111, pl. IX 3 n°. j ) a publié Teperon 'de
bronze du n°. 1 , Pl. LX X X I . Il eft compofé d'une pointé
folide 3 fixée fur un demi-cercle dont les extrémités font
percées de trous 3 pour recevoir les liens qui fix oient
l'éperon à la chauffure.
J'ai dit ailleurs que les cavaliers portoient des épées
plus longues que les fantaffins. Le befoin a fait naître
cet ufage chez toutes les nations. Il en étoit de même
de la lance : celle des cavaliers étoit fort longue, &
portoit ordinairement le nom de cornus. On peut dire
encore que les cavalier.s romains, repréfentés fur les
monumens, font couverts rarement de la cuiraffe formée
de bandes d‘e fer ; mais le plus fouverit de la cuiraffe de
cuir , faite en forme de tunique courte , dont parle
Pollux ( lib. I , fegm. 13 r ).
On pourroit delïrer de trouver ici l'article des cata-
phraües, cette cavalerie du Bas-Empir., qui étoit couverte
de f e r , hommes & chevaux ; mais je renvoie leur
article au livre des figures hiftoriques romaines.
Les Maures, les Numides & les autres habitans du
nord de l'Afrique (les Egyptiens exceptés) montoient à
cheval fans bride, & à cru. Ils conduifoient leurs chevaux
avec la voix & avec une fimple baguette. Quoique
la bride paroiffe rarement fur les monumens des Grecs
& des Romains, nous favons cependant qu'ils s’en fervoient.
On pourroit croire, d'après les débris (Rec.
d* antiq. tom. 13pag. 263 , & tom. 77, pl. CXXIII 3 n°. 2 )
de quelques brides antiques, qu’elles confiftoient en un
fimple filet. Les Gaulois fe fervoient de mors très-rudes,
&C probablement hériffés d'afpérités & d'inégalités ,
comme les mâchoires du loup , dont les dents font fort
inégales 5 car on les appeloit lupata. Dans les fouilles
faites par M. Grignon, dans les débris de la ville gau-
loife du Châtelet en Champagne, près de Joinville, on
a trouvé des mors de fer , brifés & très-rudes. M. de
Terfan eft aujourd'hui pofleffeur des objets trouvés dans
ces fouilles.
On monta long-tems les chevaux à c ru , comme le
pratiquèrent toujours les Africains. Enfuite on jeta fur
leur dos des dépouilles d’animaux ou des couvertures :
tels furent les Grecs. Les Romains fe fervirent d’abord
à1 ephippia, efpèce de houffe ou de felle fans arçon. Les
Magiftrats & les Empereurs les avoient en pourpre , puis
ils firent ufage de panneaux carrés , tels qu'on les voit
à la ftatue de Marc-Aurèle au Capitole. L ’ an 340 eft la
première époque où il foit parle de felle proprement
dite. Confiant,-fils du grand Conftantin, combattant
contre fon frère-Conftantin pour lui ôter l’Empire, pénétra
jufqu'à I’efcadron qu’il commandoit, & le renverfa
de deffus fa fe lle , comme le rapporte Zonaras. Mais
nous ne connoiffons point de monument plus ancien que
la colonne théodofienne, fur lequel on voye des arçons.
Les chevaux des cavaliers fculptés dans ces bas-reliefs
font enharnachés avec des felles fortement prononcées,
dont on diftingue facilement l’arçon de devant & celui
de derrière, tels à peu près que les préfentent les monumens
de l ’ancienne chevalerie.
Après avoir lu ce qui précède fur les felles, on ne
fera plus étonné de voir les Anciens ignorer fi long-tems
l'ufage des étriers. L’abfence des panneaux & des arçons
rendoit impoffible la fufperifion des étriers. Auffi leur
ufage fuivit de près celui,des felles à arçons, dont la
colonne théodofienne préfente les premiers modèles.
On penfè que le Traité de ta&iqüe, compofé par l'empereur
Maurice (mort en 601) , eft le premier ouvrage
dans lequel il foit fait mention des étriers. Certainement
leur ufage fut général au neuvième fiècle.
N°. 2 , Pl. LX X X I. Cheval enharnaché le plus Amplement.
C ’eft un de ceux des Quades, peuple de Germanie.
On le voit dans les bas-reliefs de la colonne prétendue
antonine.
Aî°. 3 , Pl. LX X X I . Cheval d’un ch ef romain. On
le voit dans les bas-reliefs de l’arc de Septime-Sévère.
N°. 1 , Pl. LX X X 1I. Houffe faite avec unè peau de
lion. Le cheval eft pris des bas-reliefs de Trajan , qui
font eneaftrés dans l ’arc de Conftantin.
2V°. 2 , Pl. LX X X I l, Cheval monté par l’Empereur
fur la colonne théodofienne. ( Pl. IX 3 fig. 24 bis.) Les
deux arçons de la felle & la richeffe de la double houfîe
font très-remarquables.
N°. i 3 Pl. LX X X III. T ête de cheval avec fes orne-
mens , prife de l'arc de Titus.
N°. 2 yP l. LX X X I I I . Idem. ( Antiq. Caylus, tom.I. )
Nos. 3 & 4 , Pl. LXX X III. Idem, idem, prifes d’un
bas-relief de la villa Albani, publié par Winckelmann.
( Monum. ant. n-°. 203. )
N os. 1 , 2 & 3 , P l, LX X X IV . Idem 3 idem,. idem,
tirées des bronzes découverts à Herculanum.
N°. 4 , Pl. LX X X IV . Pour terminer l'article de la
cavalerie , je dois placer ici le deffin d'une chauffe-trape
de bronze, qui étoit confervée dans la collection d'antiques
dite de Sainte-Geneviève. Quatre pointes égales
entr'elles, & longues d’ environ o mèt. 04 c . , font fondues,
& liées avec un globe de o mét. 015 c. de diamètre.
Leur arrangement eft te l, que dans toute pofition
trois de ces pointes fervent d'appui à la quatrième , qui
' fe trouve alors perpendiculaire. Celle-ci perçoit le pied
des chevaux quand on avoit femé les chauffe - trapes
fur le paffage de la cavalerie. Valère-Maxime ( lib. 3 ,
cap. 7 , n°. 1 ) parle de chauffe-trapes de fer 3ferreos mu-
rices. V égèce ( lib. 3 , cap. 24) les appelle tribulos. Léon,
dans fï- TaCtique, en parle comme d’une défenfe qui
pouvôit tenir lieu de foffés.
Les peintres anciens dpnnoient aux chevaux qui fai-
foient partie de leurs compofitions, des couleurs analogues
à la place qu’ ils y occupoient. Philoftrate {lconum,
lib. 1 , cap. 17 ) , décrivant un tableau de Pélops & d'CEno-
maüs, dit que « les chevaux du dernier font noirs, parce
» qu'ils font attelés pour exécuter une perfidie , tandis
» que ceux de Pélops font blancs. » Les graveurs de
pierres ont eu le même foin. Sur le camée du Palais-
Royal , qui repréfente l’Aurore montée fur un char * »
, , «-g & ie fond de la pierre (ont travaillés dans un
fit d agate blanche 5 mais les chevaux, font fculptés dans
un lit de fardoine.
S E C T I O N I L
Chars de guerre.
Les héros d’Homère combattent toujours-fur des
chars : jamais ils ne montent les chevaux , quoique cet
ufage foit antérieur à la guerre de Troye. Les chars de
ces héros font tirés ordinairement par deux chevaux,
quelquefois par trois. Sur le char font placés le guerrier
qui combat & celui qui conduit les chevaux. On guidoit
les courfiers avec les rênes, & on les excitoit avec un
fouet de cuir. Ces chars étoient fermés par-devant &
i ouverts par-derrière , afin de rendre les mouvemens
faciles à exécuter. Leur hauteur excédoit de peu celle
[ des chevaux. On .fe tenoit le plus fouvent debout dans
[ ces chars. Sur le devant des chars on fixoit une anfe, à
I laquelle s'attachoient les rênes. Homère en fait fouvent
i mention. _ ^ . t/. . f Un farcophage de la villa Borghèfe , publié par W inc-
[ kelmann ( n°. 43 des Monum antichi) , & qui repréfente
I la chute de Phaéton , nous montre diftinétement la ma-
f nière dont les Anciens atteloient les chevaux à leurs
^ chars. Le timon du char de Phaéton, qui eft renverfé ,
I fe termine par un joug placé fur le cou des çhevaux. Ce
[ joug s’applique fur leur cou par deux bras concaves,
j qui étoient travaillés fous la forme de cou & de tête
; a'oie. Le bout du timon, qui fe lie au joug , eft formé
I en boulé. ƒ
[ Je devrois donner un deffin des chars armés de faulx,
mais nous n’ en trouvons aucun fur les monumens antiques.
Je dirai feulement qu'ils étoient portés fur deux
grandes roues, armées de faulx à la circonférence & à
l’extrémité de l'effieu. L'extrémité du timon étoit auffi
armée de deux longues pointes. Enfin, le derrière du
’char étoit garni de lames tranchantes , qui empêchoient
l’ennemi d’y monter.
N ° . 1 , Pl. L X X X V . Char tiré des vafes appelés
étrufques. Il préfente fur le devant l'anfe à laquelle on
attachoit les rênes, & fur le derrière une portion de
cercle contre laquelle le héros & le ' conducteur ap-
puyoient leurs reins. *■
k os. 2 Cf 3 , Pl. LX X X V . Chars dépourvus de timon ,
foit par l’ oubli des fculpteurs , foit parce que des courroies
feules fervoient a les traîner. Le premier eft tiré
des Monum. antichi de Winckelmann , n°. 13 4 , & le
fécond des Recueils d’ antiquités de Caylus.
Nos. 1 , 2 , 3 , Pl. LX X X V I . Les Monümenti antichi
( nos. 1 17 , 14 3 ,8 8 ) de Winckelmann m’ont fourni ces
trois chars grecs. Le premier a un timon droit j le fécond,
un timon recourbé au deffus des chevaux, & le troifîème
a le lien tellëment difpofé entre les chevaux, que l’on
n’en voit aucune partie.
Les «°*s. 1 , 2 , Pl. LX X X V I I ; 1 , 2 , Pl. L X X X V I I I ,
Cf 1 , ,Pl. L X X X IX , font pris de la colonne antonine.
Ces chars fervoient à porter les armes & le bagage des
foldats. Ils font tirés par des chevaux , excepté le n°. 2 ,
Pl. L X X X V 11, qui appartient aux Germains, & qui eft
tiré par des boeufs. On remarquera les roues pleines des
deux premiers chars j ces roues étoient appelées timpana3
& Ton s'en fert encore dans la Campanie. Les ornemens
du n°. 11 feroient croire qu’il portoit le bagage de l’Empereur
ou de quelque chef de l’armée.