
Cynique d'ÀncJne »voit faite en Grèce d'aprls un
.monument antique. Ce deffm m’ a été communiqué par
.mon confrère M. Dufourny, qui l’a calqué à la bibliothèque
Barberini, dans le Recueil de deflins de Guiliano
da Sangallo, qui l’avoit copié dans l’original. On y voit
diftinélement Parc immenfe qui lançoit des piques très-
longues & très-pefantes.
Le fcorpion étoit aufli, du tems de Végèce (lib. 4»
xap. 22 ) , une machine qui lançoit des traits > mais le
jiom.de manubalifta , qu’ il portoit à cette époque , ap- λrend qu’ on le faifoit agir avec les mains feules. D’ail-
eurs ,u n e lançoit que de petits & de légers traits qui
caufoient cependant la mort, comme les bleifures du
fcorpion, dont on lui avoit donné jadis le nom. Ammien-
IVIarcellin défigne par ce nom une machine qui lançoit
'des cailloux.
Vonagre lançoit des pierres, & même, dit Végèce
Xibidem), « des quartiers de roche , félon la longueur
'*• & l’épaiffeur des cordes faites avec les nerfs ; car plus
» elles poffèdent éminemment ces deux qualités, plus
m gros font le§ quartiers que Y onagre lance avec la vio-
as lence de la foudre. Aucune machine de guerre n’eft
» âufli redoutable que Y onagre 8c la balifte. »? Il dit ailleurs
( 2 , 25) qu’ il y avoit un onagre par chaque cohorte
ou dix par légion , & qu’ on les portoit fur des chariots
traînés par des boeufs.
La catapulte différoit.peu de l’onagre, peut-être feulement
par le moindre volume.
Au refte , la force de la balifte étoit te lle , que rien
ne pouvoit réfifter à fes traits,’ ni cavalier-cataphra&e,
ni fantaflîn, couvert même du long bouclier ( Veget.
lib. 2 , cap. 2y ). Les pierres que lançoient les machines
pefoient quelquefois jufqu’ à cent livres romaines, 3 2,123
grammes ( 6y livres 16 onces).-Vitruve ( X , 22) parle
de tr.ois. cèrit foixante, pondo CCCLX. L’auteur d’ une
‘Guerre des Juifs, fauffement attribuée à Hégéfippe, raconte
(/ZI, 12) qu’ une pierre ainfi lancée avoitfracalfé
‘8c porté une tête à trois ftades ( y52, y mètres ) > qu’une
autre avoit arraché un enfant du ventre de fa mère, &
J’ av'oit jeté à un demi-ftade ( 92,09 mètres ).
Lôrfqu’ on étoit parvenu au pied des murs, on^ appli-
qupit la machine appelée tortue (teftudo)..Végèce ( 4 ,
14) la décrit ainlî : « On conftruit la tortue avec des
»> madriers & des planchers, & , pour la préferver des
>» incendies, on la couvre de cuirs, d’étoffes tiffues avec
» des poils & des haillons j elle renferme une poutre
» qui ^quelquefois eft armée d’ un fer courbé, appelé
pj faulx à caufe de fa forme, & qui fert à détacher les
95 pierres des murailles. 93 On employoit pour le même
objet une énorme tarière,, terebra de Vitruve, qui étoit
renfermée dans la tortue. J’ en donne i c i , fous le n°. 1 , j
PL ÇV1I I , une d’après les figures d’Apollodore (Mont- 1
fauçon, I V , P L L X X X V I I I ) .
Végèce continue : « La poutre que renferme la tortue
•» eft quelquefois armée d’ une malle de f e r , & on l’ap-
»> pelle bélier, foit parce quelle bat les murs avec un
9» front très-dur, foit parce qu’elle recule, comme les
•0 béliers, pour frapper avec plus d’impétuofité. Au
»» refte, la machine entière a pris le nom de tortue, parce
m q u e , de même que le quadrupède retire & avance
«> alternativement fa tête, de même la machine fait ren-
9» trer & fortir alternativement la poutre, afin de porter
» des coups plus violens. »» La maffe de fer ou d’airain
dont on. armoit la poutre , étoit formée ordinairement en
tête de bélier. Fabretti a publié dans (fa Colonne trajane
.( Pag' Z-1**) 1® delïin d’une tête de cette efpèce 8c de
fon emmanchement. On la voit ici fous le 2,
P L C V III.
On trouve dans les auteurs anciens trois fortes de
bélier : le bélier fufpendu, le bélier coulant, fur des rou.
leaux, & le bélier que portoient ceux qui le faifoient
jouer. On voit la première forte dans le deflin du n°. 1
P l. C IX , tiré des Nlathematici veteres (Montfauçon, IV.
PL L X X X IV ) , qui paroît repréfenter la carcaffe d’une
hélépole, machine célébré dans l’ antiquité, & qui portoit
des foldats fur fon toit. Peut-être, aoit-on rapporter à
cette première forte le bélier de l’arc deSeptime-Sévère,
qui paroît avoir deux étages, & fe termine en plateforme.
L ’autre bélier du même a rc, renfermé dans deux
tortues, à toits aigus,. & rapprochées, eft probablement
de la fécondé forte. On le voit ici au n°. 2 , PL CIX.
L’ouverture par laquelle il fort, eft trop étroite pour qu’il
pût agir étant fufpendu. Je ne dirai rien de la troifième
forte, que l’ on fe repréfente facilement. Quant à la maffe
des béliers & de leurs têtes, on verra dans Jofèphe (de
Beito Jud. lib\ 3, cap. 15 ) que la poutre-bélière ( comme
l’appeloient nos ancêtres ) avoit la longueur d’ un mât.
On conferve à Haguenau & à Morvedro en Efpagne,
l’antique Sagonte, deux béliers. La tête de celui d’Ha-
guenau eft armée d’un fort talon .de fer carré & tout
uni j mais celui de Sagonte eft armé d’une véritable tête
de bélier, femblable à celle.du bélier de l’arc de Sévère.
Vefpafien fit fondre, pour battre les murs de Jéru-
falem, une tête de bélier qui égaloit en groffeur dix
hommes} elle étoit armée de vingt-cinq cornes ou faillies
, écartées l’une de l’autre d’ une coudée (o mèt. 417),
& groffes comme le corps d’un homme. La maffe qui
fervoit de contre-poids a cette tête pefoit 3775649,000
grammes, ou quinze cents talens ( s’ils étoient attiques).
Quinze cents hommes ne pouffoient qu’avec peine ce
terrible bélier contre les murailles.
Au moment où les murs avoient cédé aux coups redoublés
des machines, on effayoit de porter des hommes
armés fur les remparts, & pour cela on „employoit le
tellenon ou corbeau à cage décrit par Végèce. Un mât
planté folidément dans la terre fupportoit, vers fon
extrémité fupérieure, une longue poutre pofée en travers
& en équilibre. Au bout de cette poutre étoit fixée
une efpèce de caiffe garnie d’un tiflu d’ofier,, qui con-
tenoit trois ou quatre hommes armés, & que l’ on enle-
voit en tirant fortement l’autre extrémité de la poutre;
mais la tortue que formoient les foldats en fe couvrant
les uns les autres avec de longs boucliers , étoit d’un
ufage plus facile & plus ordinaire. On en voit une ici
fous le n°. 1 , PL C X j elle eft prife deç bas-reliefs de la
colonne prétendue antonine ( tab. 36 ) .
§. V . Navires de guerre.
Les navires de guerrre, ççefjtuTutett vîjts, différoient des
navires ordinaires : c’eft pourquoi je les décris ici. L’addition
qui les rendoit plus remarquables étoit le bec,
rofirum. On faifoit faillir la proue à fleur d’ eau, & on
armoit cette faillie d’ une maffe de fer ou d’ airain. Le
choc de cette maffe entr’ ouvroit les flancs des navires
ennemis & les faifoit couler bas. Dans le combat naval
d’Oftave & du fils de Pompée, Agrippa perça la birème
de Papias vers la proue j de forte que les rameurs du
rang inférieur furent fubmergés, & que ceux du rang
fupérieur n’échappèrent à la mort qu’en perçant le
pont pour fe fauver à la nage. Le bec étoit quelquefois
armé d’une tête de bélier, comme on le verra bientôt:
quelquefois
iiueîauefois le bec ainfi armé étoit double : quelquefois
I bec • fans être triple, fe trouvoit refendu en trois
oointesi que l’ on armoit d’ énormes épées de bronze.
i)n voit a Saint-Laurent, hors des murs de Rome, fur
des bas-reliefs publiés par Fabretti (Col. traj. pag. 11 y ) ,
des Droues armées de becs ainfi refendus en trois. Une
de ces proues eft deflinée ici fous 1 e n . 2 , PL CX.
Le Ü 1 P/. C X l, fera connoître les autres parties
«mi diftinguoient les navires de guerre. Celui que l’ on
foit ici eft tiré des bas-reliefs du duc d’ Alçala,. conférés
à Séville, & publiés par Montfauçon (tom. I V ,
PL CXLII). On reconnoît le bélier double, les créneaux
qui défendent le pont : au deffous des créneaux,
les ouvertures par lefquelles les rameurs, placés fous le
|ont recevoient le jour j le château ou la tour carrée ,
garnie de créneaux, fur laquelle montoient des foldats
pour combattre d’un endroit élevé , & c . Ces tours
étoient quelquefois doubles & en plus grand nombre,
Somme le montrent des navires gravés fur des pierres,
ilorfqu’il y avoit deux tours , elles étoient placées à la
ppuppe & à la proue. C’ eft la dernière que l’ on voit fur
le débris de la célèbre birème du marbre de Paleftrine,
l’ancienne Prénefté. Winckelmann l ’a publié ( Monum.
ant. n°. 207), & on le trouve ici fous le n°. 2 , PL XXI.
| ’en décrirai les différentes parties dans le livre de la
navigation ; mais ici je n’ai a faire obferver que fa tour
grenelée, & les pointes de trois lances ou javelots qui
Raroiffent fortir d’une efpèce de barbacane.
K Les peintures d’Herculanum (tom. 1) préfentent plusieurs
navires à plufieurs rangs de rame, chargés d’hommes
armés. Des trois d e :1a page 239, celui du milieu
teul porte une tour carrée , furmontée d’une plus petite
tour de même forme. Les proues des deux autres ont
la; forme d’une tête humaine monftrueufe , & font garnies
à fleur d’eau d’un bec tranchant. Enfin, à tous les
frois on voit de larges boucliers ronds. fixés contre les
Ualuftrades ,qui garniffent le pont. Aux quatre navires
de guerre de la page 243, ces boucliers font alongés en
pointe d’un côte. De la bouche, qui fait partie de la
proue du plus grand, fortent deux poutres rondes, qui
peut-être forment un double bec. Théodore Prodromus
M:lib. y , pag. 22y) nous apprend l’ufage de. ces boucliers
fixés aux bords des navires de guerre : cc C ’étoit
“ afin que le foldat, placé entre deux, pût lancer des
»5 traits fans danger ; car on avoit attaché ces boucliers
»9 comme les créneaux des murailles & des tours, derr
i è r e lefquels les foldats lancent les traits. » 11 avoit
dit auparavant de ces trirèmes, que les oeuvres mortes
depuis la fécondé jufqu’à la troifième ceinture ( Çarfîjpor)
étoient couvertes de draperies très-épaiflès & très-foulées
, qui amortiffoient les traits des ennemis, & que les
boucliers étoient fixés fur ces baftingues.
Chez les Romains, le navire prétorien, celui qui portoit
le chef, étoit diftingué la nuit par une lumière. Sur
la colonne trajane ( tab. 59 ) on voit l’Empereur s’ embarquer
la nuit ; ce qui eft indiqué par un flambeau que
porte un de fes ferviteurs. A Yaplufie eft fufpendue une
lanterne. Florus. (lib. 4 , cap. 8 ) , parlant de la fuite de
Sextus-Pompée après fa défaite dans les mers de Sicile ,
dit : « Celui qui naguère commandoit trois cent cin-
33 quante navires, fuyoit avec fix ou fept, ayant éteint
s» le fanal du navire prétorien, ayant jeté fes anneaux
»3 dans la mer...v. »»
Végèce (lib. 4 , cap. 44 ), décrivant un combat naval,
dit qu’on éîevoit les tours fur les plus grandes liburnes ;
& Servius, expliquant ce vers de Virgile ,
Tanta mole viri turritis puppibus inftant,
dit qu’on ëlevoit ces tours à l’inftant même du combat :
De tabulis fubità eriguntur, fimul ac venium eft in prslium ,
turres hoftibus improvif a.
La fambuque étoit l’appareil le plus formidable des
combats navals. Pour le former on lioit deux quin-
quirèmes par un de leurs flancs, en ne laiffant de
rames qu’aux flancs extérieurs. On établiffoit un plancher
tres-folide , fur lequel (Livïus, lib. 24, cap. 34)
on plaçoit les machines les plus grandes. Végèce
(ibidem) parle des baliftes, des onagres, des feorpions
& des quartiers de roche qui étoient lancés par ces machines.
Le même écrivain décrit en particulier ( 4 ,4 6 )
Yajfer ou le bélier naval : « C ’eft une poutre peu épaiffe
153 & longue, armée de fer aux deux extrémités, fufpen-
33 due à un mât comme une vergue. Lorfqu’ on vient à
33. l’abordage, foit à droite, foit à gauche, on fait agir
»3 Yajfer comme un bélier ; il renverfe les foldats, les
33 matelots ennemis, & les écrafe î fouvent même il perce
39 les navires. »»
Sur un des navires de guerre des bas-reliefs du duc
d’Alcala, cités plus haut, on voit une trompette droite,
qui eft aufli longue que le muficien eft haut.
11 n’eft pas inutile de dire que, fur les navires de
guerre, on fe fervoit de lances très-longues (conti), &
furtout de lances armées de petites faulx (J'oçufytirtui«);
pour couper les cordages des ennemis.
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