lorsqu’à étoit à Corinthe logé chez Caïus, et qu’il lut obligé de demeurer en
Grèce trois mois durant, pour ériter les embûches qu’on lui «voit dressées
sur le chemin qu’il devoir prendre pour aller en Syrie, afin de porter à
Jérusalem les aumônes dont il s’étoit chargé ; ce qui paraît par diverses circonstances
r°. parce qu’il y salue les Romains au nom d’Eraste, trésorier de la vUle
de Corinthe; 2°. parce qu’il leur recommande Phébé qui demeurait à Cenchrée,
qui étoit un port de cette même ville, et qu’il avoit chargé cette femme de leur
rendre cette lettre. Enfin de ce que ceux que saint Luc nomme compagnons de
ce voyage de Jérusalem, sont en partie les mêmes que ceux aux noms desquels
cet apôtre salue ici les Romains. Voyez la Préfac e du commentaire sur cette
E v itr e attribué à Origènes. De ces circonstances il est aisé de conclure que
cette Epitre est écrite de Corinthe l’an 57 ou 58 de 1ère vulgaire , la 24 ' ou
a 5° année après la mort de Jésus-Chnst.
On peut être surpris de ce que cette lettre étant adressée aux Romains,
elle est écrite en gre c, et non en latin, qui étoit la langue commune et populaire
de ces peuples ; mais il faut savoir que sous ce nom de Romains, l’apotre
n’entend pas seulement ceux qui étaient nés dans Rome, ni les naturels de cet
empire ; mais tous les fidèles, de quelque nation que ce pût être, que le commerce
et la nécessité des affaires y attiraient,comme sont entr’autres ceux
nue saint Paul salue ic i , qui certainement n’étoient pas nés à Rome ni aux
environs ; ce qui parait te l, selon ces paroles du cap. 1 , v . 7 . par lesquelles
l'apôtre adresse cette lettre à tous ceux qui sont à R om e, chéris de D ieu et
saints par leur vocation; paroles qui regardent également tous les fidèles,
soit Juifs soit Gentils. Cela étant certain, il étoit donc plus convenable à
l’apôtre de leur écrire en grec puisque cette langue étoit alors la plus répandue
dans le monde, et plus convenable aux étrangers,et quelle etoit meme si
commune dans Rome, que les femmes romaines affectaient de s’en servir. E t
en effet ce ne fut que par le moyen de çette langue, et par les relations des
étrangers que la réputation de la foi des chrétiens de cette fameuse ville se
répandit par toute la terre , et vint en Grèce jusqu’aux oreilles de l’apôtre
saint Paul, qui en prit occasion de les en féliciter par cette lettre ; mais
comme cet apôtre apprit en même temps, et par la même voie, qu’il s étoit
élevé entre les Juifs et les Gentils convertis quelque contestation au sujet des
avantages que ces premiers prétendoient avoir sur les derniers, par rapport au
frait de l'accomplissement des promesses faites à Abraham et à leurs pères;
■f car les Juifs prétendoient que les Gentils n’y dévoient avoir aucune part, ou
•du moins qu’ils deroient en .se soumettant à la loi de Moïse, aussi bien qu a
l’Evangile, embrasser les observances légales, et les cérémonies de la loi ancienne
; les Gentils au contraire soutenoient que l’Evangile les affranchissoit
de ce joug, et que les Juifs par leurs infidélités et leurs prévarications contre
la loi, et par le deïcide qu’ils avoient commis en la personne de Jésus-Christ,
s’étant rendus indignes de jouir de l ’effet des promesses, ils avoient été substitués
en leur place ) ; pour arrêter le cours de ces disputes qui pouvoient causer
quelque schisme, l’apôtre saint Paul crut qu’il étoit nécessaire de leur écrire ;
ce qu’il fit , non pas de sa propre main, mais par celle de Tertius ; et dans
cette lettre voulant détromper les uns et les autres de la fausse idée qu’ils
avoient de s’être rendus dignes par leurs propres oeuvres d’avoir part à l’Evangile
, et au fruit de la mort de Jésus-Christ, il prouve aux Gentils que la
connoissance de Dieu qu’üs se vantoient d’avoir eue sans la fo i, n’kvoit eu
d’autre effet en eux que de les rendre plus coupables, non seulement pour ne
l’avoir pas adoré, mais pour avoir transporté tout leur culte et leurs hommages
aux créatures, aux idoles et aux bêtes brutes, et de s’être abandonnés
sans mesure à tous les déreglemens de leur coeur. Il dit aux Juifs que quoiqu’il
fût vrai qu’ils eussent eu la loi, qu’ils fussent les enfans d’Abraham, et que par
la circoncision ils eussent reçu le signe de l’alliance que Dieu avoit faite avec
leurs pères ; tous ces avantages n’a voient servi qu’à faire connoître leurs infidélités
et leur ingratitude ; parce que ne les ayant regardés que selon la chair, ils
en avoient oublié l’esprit, sans lequel la loi n etoit qu’une lettre qui tue, qui
pouvoit irriter leur concupiscence, leur faire sentir leur foiblesse, le besoin
qu’ils avoient d’un Sauveur, la nécessité de sa grâce, leur montrer le bien,
mais sans leur donner les moyens et la force de le pratiquer ; qu’ainsi ils étoient,
aussi bien que les Gentils,, les ennemis de Dieu, l’objet de sa colère, et dignes
de la mort, non seulement en général par la prévarication d’Adam, qui avoit
souillé et corrompu tous les hommes, mais encore plus particulièrement par
les crimes personnels qu’ils y avoient ajoutés ; que par conséquent Dieu ne
de voit aux uns et aux autres que le châtiment et la damnation qu’ils avoient
mérités ; qu’ainsi l’application de l’effet des promesses, la vocation à l’Evangile
, la persévérance dans les oeuvres de la loi selon l’esprit, la grâce et la
gloire, étoient le fruit de la mort de Jésus-Christ, et des dons gratuits qui
dépendoient de la seule miséricorde de Dieu, qu’il accorde et refuse comme
il lui plaît, et à qui il lui plaît, sans être obligé de faire acception de personne.
Gratuité que l’apôtre explique, non seulement par l’exemple du choix de
Jacob et de sa postérité au préjudice d’Esaü et de ses descendans ; mais encore
par la comparaison du potier ,et de l’argile , du vase d’honneur et de celui