les écailles avec quelques ossements épars. En jétant un coup
d’oeil sur tous ces débris intéressants, il se conçoit qu’il ne
m’est pas possible de décrire ici tous ces objets. Je dirai ici
seulement que ce sont ces fossiles et quelques autres qui se
trouvent à présent dans le British muséum à Londres, qui en
1859 m’ont fourni la matière pour faire une description de
quelques nouvelles espèces de poissons d’Oeningen, description
qui a été insérée dans les Verhandelingen der Hollandsche
Maatschappij der Wetenschappen te Haarlem. La plupart de
ces espèces nouvelles sont exposées dans ces vitrines et dans
l’armoire 9. Elles sont: le Cobitis Bredai Winkler, no. 8279,
petit poisson cyprinoïde, qui diffère du Cobitis centrochir Ag.
par le nombre de ses vertèbres et par la longueur du deuxième
rayon de la pectorale; le Cobitis Teyleri Winkler, no.
8284, dont le caractère le plus saillant se manifeste surtout
dans la forme et la longueur de la tête ; la Tinca magna
Winkler, no. 8287, caractérisée par la tête grosse, le tronc
gros et vigoureux, les rayons des nageoires épais, les côtes
longues et la caudale très large; le Leuciscus helveticus Winkler,
no. 8317, 8319, 8320, 8315, dont la forme du corps démontre
au premier coup d’oeil que ce poisson est un membre
du genre Leuciscus. On voit la colonne vertébrale courbée
en haut, les côtes longues, grosses, vigoureuses, la tête médiocre
ou plutôt petite en proportion du corps, la dorsale au
milieu du dos et non opposée, ni à la ventrale ni à l’anale ;
le RJiodeus oligactinius Winkler, no. 8333 et le Rhodeus
magtius Winkler, no. 8330 deux espèces nouvelles de ce genre:
poissons qui se distinguent par leur taille petite, la dorsale
moins grande que celle des autres cyprinoïdes, un corps trapu
et - plus ou moins comprimé, une tête assez grande en proportion
du reste du corps, la caudale large et fourchue etc.
le Chondrostoma minutum Winkler, no. 8341, petit poisson
à corps fusiforme, à nageoires petites, à caudale fourchue à
lobes pointues: ce poisson ne dépasse pas une longueur de
5 centimètres à l’état adulte; le Lebias crassus Winkler,
le Lebias minimus Winkler, no. 8343, et le Lebias furcatus
Winkler, trois espèces nouvelles de petits poissons, qui semblent
avoir nagé par troupes nombreuses dans les eaux antédiluviennes
de la Suisse; -le Poecilig oeningensis Winkler,
no. 8346, petit poisson, qui est à reconnaître par la forme
arrondie de sa nageoire caudale et par la position reculée de
ses nageoires dorsale et anale.
Tous les poissons d’Oeningen que nous venons d’examiner, confirment
l’opinion des géologues qui attribuent une origine lacustre
aux couches sédimentaires d’Oeningen: on trouve dans
ces couches, outre les acanthopsis, les cobitis, les lebias, les rhodeus,
encore le genre Poecilia, sans compter les tanches et les
anguilles, tous des poissons qui vivent de préférence dans une eau
bourbeuse, dans un marais d’eau douce ou dans un lac peu profond
et tranquille. Ensuite nous voyons ici un grand nombre
d’exemplaires à'Esox robustus Winkler, no. 8355, 8359, 8357
etc., poisson qui se distingue de notre brochet actuel par un
corps plus court, plus robuste, plus trapu, et aussi par le
nombre des rayons de ses nageoires. Il paraît que les brochets
ont été les plus grands poissons qui aient vécu un jour dans
les eaux antédiluviennes d’Oeningen. Enfin, nous observons
ici un bel exemplaire de VAnguilla elegans Winkler; cette
anguille fossile ne diffère pas sensiblement des anguilles de
nos jours, ni de l’autre espèce de ce genre, VAnguilla pa-
chyura Ag. qui de même a été trouvée à Oeningen.
Dans la vitrine 26 se voit encore un objet curieux qui mérite
quelque attention. C’est un bel exemple des fossi les ar t i f i ciel
les ou des falsifications qu’on ne rencontre pas rarement
parmi les ichthyolithes d’Oeningen. Agassiz, dans ses Recherches
sur les poissons fossiles T. Y, a déjà dirigé l’attention des palich-
thyologistes sur ce point. Il y parle, p. 10, de fausses truites,
composées d’os de leucisques, de brochets etc. assemblés pêle-
mêle dans toutes les directions, de manière à produire l’image
approximative de quelque grande truite. „Digne chef-d’oeuvre,
dit-il, de l’oisiveté des moines de Mersebourg” (Meersburg?) Une
de ces truites factices se voit ici, jio. 8366. Aucun des os qu’on
voit sur la plaque n’a pu appartenir un jour à une truite, ce sont
probablement pour la plupart les os de quelques brochets,
déposés dans une couche de gypse ou d’argile, lorsqu’elle
n’était pas encore durcie et séchée par le contact de l’air.
Au surplus, on a trouvé bon de graver des sillons dans la
plaque à la place où devaient se trouver les rayons des
nageoires. Ces moines de Mersebourg ont été même assez
habiles pour faire ces sillons, ces rayons artificiels, de manière
qu’ils croisent une fissure de la plaque, pour tromper autant
que possible la sagacité des bonnes gens, qui venaient admirer
leur collection de poissons antédiluviens.
De cette manière naïve on formait non seulement des
poissons impossibles, mais on en fabriquait de même quelques
autres d'une manière encore plus ingénieuse. On en voit
aussi un exemple, no. 8365, dans la vitrine 27. Quelqu’un
a trouvé la tête et une partie de la colonne vertébrale d’une
espèce de poisson fossile, probablement d’une anguille. La
colonne vertébrale a été rompue là où l’on trouve le bord