
fens là On appellent auffi croix tous les châtimens & tous les genres de
mort : c’eft dans ce fens que Plaute dans fon prologue aux Menechmes dit
d’un homme qui paffant un fleuve fut emporté par le courant de 1 eau & le
noia abflraxitque hominem in maximum mdam crucem. Ce nom etoit ù general
pour mute forte de tourmens, que le mot le plus ordinaire pour les exprimer
étoit cruciatus fait de aux, crucis, &c que tourmenter s exprime de meme
par cruciare. Les Grecs appelaient la croix s-«up<iî & «°a4 ; crucifier chez eux
étoit raupou’i' , . ...
Oncrucifioit quelquefois en attachant le patient a des arbres ,& lui liant
les bras avec des cordes . nous en avons mis un exemple au tome lecond,
lorfque nous parlions des prêtres Carthaginois de Saturne que Tibere ht pendre
à des arbres devant le temple. Tertullien appelle ces arbres votivascruces,
des croix votives. . _ „
II. La croix faite à la main avec des poutres avoit la forme du Ta« Samaritain,
dit S. Jerome, dont voici les termes : La. demiere des lettres Hébraïques
dontfe fervent aujourd’hui les Samaritains, qui eft le Tau, a laforme d une croix.
Ce Tau femblable à la croix étoit celui des Grecs félon S. Paulin , qui dit que
la figure de la Croix eft exprimée par la lettre greque Tau , qui lignifie trois
cens. Cette croix ainfi exprimée fe trouve affez fouvent dans les figures des
divinitez Egyptiennes, comme nous avons vu au lecond tome.
La Croix de notre Seigneur avoit quelque chofe de plus que le Tau ; le bois
qui fe fichoit en terre croifoit celui qui le traverfoit en haut & falloir en
paffant pardeffus comme une tête: telle voions-nous la croix fur les médaillés
de Conftantin le Grandencette forme t ; ainfi la trouve-t-on peinte dans
les plus anciens monumens chrétiens ; c’eft cette forme de croix qu entend
S. Jerome quand il la compare à des oiléaux qui volent, a un homme qui nage
; à un homme qui prie Dieu les bras étendus ; & S. }\iiht\ Apohg. i. quand
il la compare à une piece de bois fichée en terre, traverfee par une autre
piece debois qui faifoit deux cornes , en forte que celle qui etoit fichee avoir
encore une corne par deffus. C’eft ainfi que tous les Peres ont explique la forme
de la croix de Jefus-Chrift : cependant il y a eu des gens de ces derniers
fiecles qui lui ont donné la forme d’un T , & d autres une autre forme encore
plus éloignée de la véritable.
C ru x etiam vocabatur quodlibet tormenti atque mortis
etiam inopinat* genus. Ideöque Plautus Pro*
logo in Men*chmos, de viro loquens, qui fluvium
trajicieqs vi fluenti abreptus & in aquis fuffoeatus
fu e ra t, fic a i t : abfiraxitque hominem in maximum ma-
lam crucem. Ho e nomen ad omnia tormentorum g e nera
exprimenda fic ufurpabatur , ut ea cruciatus in
gen ere vocentur , Sc cruciate fit hominem tormentis
afficere. Grazcis crux erat s&v&i & o-jmaoJ- > ctuci affigere
apud ipfos fic exprimebatur, <&u&vj> & onoutrilcu.
Aliquando crucem fubire dicebantur , qui arbori-
bus fuipendebantur ligatis brachiis manibufve. Hu -
jufee rei exemplum vidimus tomo fecundo cum de
facerdotibus Saturni Carthagincnfibus ageremus , qui
jufiu Tiberii in arboribus ante tempfiim fufpenfi fue-
re , quas arbores Tertuflianus Apologet, c. 8. vocat
votivas cruces.
1 1. Crux trabibus compacta liter* T a u Samaritan*
figuram exhibebat , inquit Hieronymus ad caput
Ezechielis his v erb is : Antiquis Hebraorum
Uteris , qui bus ufque hodie utuntur Samaritans , extre.
ma -mü litera enteis habet fimdUndinem , qua in Chri-
flianorum frontibus pingit ur, & frequenti manus inferip-
tione fignatur. H * c litera taZ cruci fimilis gr*cum t
referebat 3 ut ait S. Paulinus, q u * litera trecentorum
numerum exprimit. H * c crux fic exprefla frequen-
tiffime etiam in figuris Ægyptiacorum numinum oc-
c u r r it , ut dicebamus tomo fecundo.
C ru x Chrift! Domini aliud quidplam prsfercbat
quam litcram T . Q u * trabes in terrain defigebatur ;
alteram trabcm deenflabat, & ceu vertlcem ahquem
fupra T liferam eraittebat. Illam videmus crucis for-
mam in nuffimis Conftantini magni hac forma t ■ fie
etiam d epiaa occurrit in quam plurimis veteribus
Chriftianorum monimentis. Hanc refptcic crucis for-
mam Hieronymus cap. n . in Marcum : Ipfafptcitl
crucis, in qu ic, quid eft r iß ferma quadrats, munit!
Hves quarto volant ad athera .formam crucis afta-
munt. Homo natans fe r aquas, v i l orans, forma crucis
vifitur. Sic 8c alil Patres crucis figuram explica-
r u n t . in nique Juftinus Apolog. 1 . qui crucem
comparât ligno d e fix o , aliud tranfverium lignum
habente , quod duo cornua efficiat, ira ut lignum
prius illud dcfixum fuumquoque lupremum cornu
habeat. Attamen his pofterioribus fxculls fuere qui
formam T cruci Domini adfcriberent : alli quoque
allam ipfi formam affig nutum a vera forma diffif* 11'-
liorcm.
On faifoit quelquefois la croix comme un X; c’eft ce que nous appelions la
croix de S. André, pareeque félon les aétes du martyre de cet Apôtre fa croix
étoit faite en cette forme: deux poutres qui fe croifoient faifoient quatre branches
, àchaque branche d’en haut étoit attaché un bras , & à chaque branche
d’en bas un pied. Il paroit que cette elpece de croix étoit peuenufage.
1 11. La croix étoit le fupplice des efclaves & des gens de la plus vile condition.
Avant que de les attacher à la croix , on les fouettoit ordinairement
avec des fouets ou des étrivieres; ce qui paffoit pour plus dur & plus infamant
que d’être frappé de verges ; quelquefois aces fouets étoient attachez des
offelets ou des pièces d’os debêces, ce qui rendoit la flagellation plus fanglan-
te & plus doulôureufe : on voioit des patiens mourir fous ces coups redoub
l e z .Notre Sefoneur fut attaché à'une colonne pour être fouetté:on croit
que cela s’eft fait autrefois , & l’on rapporte ce paffage de Plaute, TMene^moi
cethomme £ÿ liez^-le fortement a une colonne jfmais cela le pouvoit faire ainli
pour le garder plus furement, & fans deffein de le fouetter.
Notre Seigneur porta fa croix ; cet ufage fe trouve obfervé dans d’autres
fupplices -, Plutarque dit que les patiens portoient leurs croix:« Les malfai-«
teijrs, dit-il, qui vont être punis de leurs crimes portent leurs croix , &la «
malice fe fait & fe fabrique à elle-même des tourmens & des croix. »
I V. On attachoit ordinairement le patient à la croix après quelle étoit élevée
& fichée en terre. U fetrouve pourtant des exemples qu’on les a attachez
à la croix étendue contre terre, pour élever enfuite l’un & l’autre tout à la fois,
& ficher ainfi la croix avec fa charge. Le patient étoit quelquefois attaché à la
croix avec des clous : il y étoit auffi lié quelquefois avec des cordes. Quand
on les attachoit avec des clous, on en fichoit un a chaque main : la queftion
eft fi l ’on en mettoit auffi un à chaque pied , ou fi l’on attachoit les deux pieds
enfemble avec un oros clou. Les fentimens font partagez fur Jefus Chrift cruci-
fié;les uns difent qu’il fut attaché avec trois clous-,de. ce nombre eft S. Grégoire
de Nazianze , ou l’auteur du poëme de Jefus Chrift fouffrant, qui appelle la
croix ftm\ee, ou de trois clous. Les autres difent qu’il le fut avec quatre clous,
un à chaque main , & un à chaque pied ; de ce nombre eft S. Cyprien , qui dit
clvvis Jacros pedes terebrantibus. Quelques Peres, comme S. Jultin & S. Irenée,
' affurent qu’il- y avoit au milieu de la croix un fiege où le corps du patient fe re-
Aliquando crux parabatur ad modura lite r* X ,
quam crucem nos fanéti And re* vocamus , quoniam
A6ta hodierna (an&i Andre* ejus crucem ejufmodi
fui fie teftificantur. D u * tranfverf* trabes ceu cornua
quatuor emitteb ant, in fupremifque cornibus
brachia alligabantur , in in fi roi s vero pedes • hoc
genus crucis non ita frequentatum fuifle videtur.
I I I . C r u x fupplicium>ratfervorumaliorumque
tenuifiimæ conditionis hominum. Antequam ii in
crucem agerentur , flagris lorifve cædebantur , quod
acerbius majorifque infami* efie cenfebatur , quam
li v irg is cxcepri fui fient : aliquando hujufmodi flagris
adnexi erant tali aut alia animantium ofla , qua
re fupplicium acerbius evadebat, ira ut aliquando in
ipfo verberum cruciatu miferi illi exfpirarent. D . N .
Jefus Chriftus column* alligatus fuit ut fla gell are-
tur : fuhr qui putant ita etiam cum aliis a&um fui fie,
& hunc locum afferunt ex Plauto in Bacchid- Addu-
cite hunc intro , atque adftrinçrite ad column am fort iter.
Verum poterat file alia mente a llig a ri, nonut verbe-
ribus afficeretur, fed ut firmius fecuriufque cufto-
diretur.
Quod Dominus crucem fuam b ajulaverit, id non
infolitum apud alios reos damnarofque erat : ait enim
Plutarchus de tarda Dei vinditta j Corpore quidem
quivis fedtfiorum damnatorum fuam geftat crucem• N e -
quitia vero fupplicia fingula ipfa ftbi fabricatur.
I V . Mos erat damnatum in crucem jam ere&am
&defixam agere : attamen non défunt exempla reo-
rum qui in cruce in terra jacente colligati fuere j ita
ut crux cum onere fuo poftea erigeretur. Aliquando
eorum qui in crucem agebantur, manus pedefque
clavis trajicientibus & in ligno defixi patibulo h*re-
b ant, f*pe quoque funibus colligabantur. Quando
clavis rei damnative affigebantut, fingul* manus
fingulis clavis perforabantur : fed qu*ritur num fin-
giilos etiam pedes finguli clavi, an vero unus clavus
utrumque pedem fuffigeret. Hie opinionum fafta
funt divortia , maxime circa Jefum Chriftum cruci
affixum. Gregorius N a z . aut fi quis alius carminis
de C h r ifto patiente au6tor eft, crucem vocat T çiWor,
feu trium clavorum ; alii binos pedibus clavos adferi-
b u n t , in iis Cyprianus De Pajfione , qui ait , clavis
facros pedes terebrantibus. Juftinus contra T ry p h o -
nem, Iren*us 1. x. c.42. & alii, putant in crucis medio
fuifle lignum dcfixum in quo is qui cruci affixus