
 
        
         
		Péricarpe : baie sphérique, uniloculaire,  monosperme,  entourée  à  
 sa  base  par  le  calice  et  la  corolle,  verte  et  de  la  grandeur  du  
 fruit  du  prunier  épineux. 
 Graine  presque  sphérique,  solide  et  osseuse. 
 Fleurs  femelles. 
 Calice  d’une  seule  pièce,  campanulé,  persistant  et  muni  de  trois  
 dents  aiguës  qui  ne  surpassent  pas  la  moitié  de  la  corolle. 
 Corolle  comme  dans  la  fleur  hermaphrodite. 
 É tamines  nulles. 
 Pistil  :  ovaire  supère,  ovale;  style  nul;  trois  stigmates  simples,  
 réfléchis. 
 Péricarpe  comme  dans  la  fleur  hermaphrodite. 
 O B SER V A T IO N S . 
 C e  Palmier, qui  forme un nouveau genre  très-distinct,  a une physionomie particulière.  
 Son tronc élancé., vert-jaunâtre, cylindrique et  extrêmement lisse,  a vingt à vingt-quatre  
 pieds ( 7  ou 8 mètres) de hauteur  sur un pouce  ( 27  centimètres)  de  diamètre.  Il présente  
 extérieurement  des  anneaux  d’un  brun  foncé,  éloignés  les  uns  des  autres  de  huit  
 pouces  (2  décimètres).  Ces  anneaux  étant beaucoup  plus rapprochés  vers  la  racine  et  
 l’origine  des  feuilles  qu’au  milieu  du  tronc,  il en résulte  que  le Palmier  ressemble à  un  
 roseau  très-élevé, et  que,  dans  le  pays,  on  lui  donne  le  nom  de  Cana  ¿le  la  Vibora  
 (Canne  de  la  Vipère),  ou  Caha  de  San  Pablo.  Le  premier  de  ces  noms  fait  
 allusion  aux propriétés  médicales  de la plante;  le  second  rappelle le  lieu  où  elle  végète  
 le  plus  abondamment. 
 Le genre Kunthia a quelques rapports,  x.° avec le Palmier à  cire  ( Ceroxylon  andicola),  
 que  nous  avons  décrit dans le premier volume de cet ouvrage;  2.0 avec les genres Bactris  
 de  Gærtner,  et  Iriartea  de  Ruiz  et  Pavon;  mais  il se  distingue  essentiellement  de  ces  
 trois arbres  de  la même  famille,  par sa  spathe  à  plusieurs pièces,  par  son  fruit  qui  est  
 une  baie,  et  par  la  distribution  particulière  des  fleurs hermaphrodites  et  femelles  sur  
 différens spadices.  Le Kunthia offre une  spathe dans laquelle  toutes les  fleurs sont pourvues  
 d’étamines  et  de  pistils,  tandis  qu’une  autre  n’a  que  des  fleurs  femelles  sans  
 rudimens  d’étamines.  Il  est  remarquable  que,  dans  un  régime  que  les  Indiens  de  la  
 Hacienda de la Erre nous ont porté, pendant notre voyage d’Almaguer à Pasto, en 1801,  
 les  ovaires  de  toutes  les  fleurs  femelles  étoient  considérablement  grossis,  quoique  la  
 spathe  femelle  parût  encore  • entièrement  fermée.  La  fleur  hermaphrodite  a  un  style  
 très-allongé et terminé par un  stigmate trigone, tandis que la fleur femelle n’a pas de style 
 du tout, mais  trois stigmates  distincts  qui  couronnent l’ovaire.  La  Caria de  la Vibora  
 s’éloigne  du  Bactris  par  sa  corolle  à  trois pétales,  de  l’Iriartea  et  du  Ceroxylon, par  
 le  nombre  de ses  étamines. 
 En  coupant transversalement le tronc  ou stipe de la Canne delà Vipère, on  remarque,  
 entre les fibres ligneuses voisines de la  périphérie  et  les  fibres  intérieures,  une différence  
 encore  plus  grande  que  dans  les  autres  plantes  de  l’ordre  des  Monocotylédones.  La  
 structure  de  ce palmier  ressemble presque  à  celle  de la Canne à  sucre.  Il contient un suc  
 abondant  et  d’une  saveur  légèrement sucrée.  Ce suc doux que le tronc conserve pendant  
 des  mois  entiers.,  quoiqu’il  soit  coupé  par  morceaux,  est  un  remède  très-estimé  
 parmi les indigènes contre la morsure  des  serpens vénéneux. Le malade mâche les paquets  
 de fibres ligneuses  du Palmier pour en extraire le suc qu’il avale.  En même temps le  tissu  
 fibreux1,  mouillé  de  salive, s’applique sur  la  plaie.  Les  Indiens  de  Barbacoas  regardent  
 ce  remède  comme  plus  actif encore  que  le  suc  du  fameux  Vejuco  del  Guaco'2,  dont  
 ils  connoissent les  propriétés bienfaisantes. On se demande quel hasard peut avoir conduit  
 les hommes à une  découverte  si  importante,  et l’on s’étonne  de  la sagacité  des  indigènes  
 qui  ont  deviné que  la  tigé  ligneuse,  presque  insipide,  d’un  petit  Palmier  renferme  un  
 puissant antidote. Heureusement la Canne  de la Vipère  croît  dans des  lieux  tempérés,  
 rapprochés  de  ces vallées  étroites,  qui, sous  l’influence  d'un climat excessivement humide  
 et  brûlant,  abondent  en  crotales,  en vipères,  en  scytales  et  autres  serpens vénéneux. 
 Le  Kunthia  montaha  offre un  nouvel  exemple  de  propriétés chimiques  remarquables  
 dans  certaines  Monocotylédones.  A  mesure  que  les  voyageurs  nous  feront  connoitre  
 de  nouvelles  espèces de  la.grande  famille  des  Palmiers,  dont on  n’a  point  encore décrit  
 la  dixième  partie,  les  physiciens  abandonneront  le  préjugé  que  la  nature-n’a  déposé  
 dans  les  plantes de  ce groupe,  que  des  sucs  aqueux et  insipides.  Le  sucre abonde  dans  
 les fruits des  Datiers et  du Pirijao,  comme  dans le  régime mâle  de l’Hareng  à  sucre des  
 îles  Moluques3.  La  partie  médullaire du  Mauritia4  présente  une  fécule  nourrissante  
 analogue  au  Sagou.  On  retire  de  l’huile  des  fruits  du  Cocotier.  Le  Ceroxylon  
 andicola  transsude  de  la  cire  végétale à  la  surface  de  son  tronc  :  enfin,  la  Canne  
 de  la  Vipere  offre  le  premier  exemple  d’une  propriété  anti  vénéneuse  découverte  
 dans  un Palmier. 
 La zone  propre à la  plante que nous venons de  décrire est comprise entre les deux cent  
 cinquante et huit cent vingt toises  (5oo et 1600 mètres) :  c’est la région des Embothryum,  
 des  Fougères  en  arbres,  et  du  Quinquina5.  La  Canne.de  la  Vipère  abonde  dans  le  
 royaume de la Nouvelle-Grenade, sur la pente occidentale des Cordillères,  entre le premier  
 et le  deuxième  degré de latitude boréale,  dans la montagne de Bateros, près du ravin appelé  
 Quebrada del Hato V ie jo , situé entre les villages du Trapiche et de San Pablo. On la trouve  
 aussi  dans  les parties élevées des Missions de Mocoa, et  dans la Montaha de Barbacoas,  
 entre la ville de  ce nom et les limite^ de la province de Pasto. Elle vient'égalementbien dans  
 des/endroits secs  et  humides,  où  le thermomètre  centigrade  se soutient habituellement 
 1  El  bagasso. 
 •  Mikania  Guaco.  Voyez plus haut,  Toin.  it,  pag.  83  Pl.  io5. 
 3  Areng  saccharifera,  Lubillardière. Mém.  de  l’Institut,  Tom. x v ,  pag. a i5. 
 4 Moriche du  Bas-Orénoque et des Llanos de Caracas. 
 6  Surtout des  Cinchona  oblongifolia  et  C.  Iongiflora qui  descendent  vers  les  régions  chaudes.  Essai  sur  la  
 Géographie des  Plantes,  pag.  6i. 
 il