qu elles en diffèrent s). Dans le lac de Seeliibd', à une lieue de Prenslou>i
on prit, en 1731, une carpe de deux aunes & trois quarts de long, &
qui pefoit trente-cinq livres r).
Un économe très-verfé dans la connoiffance des viviers, Mr. Schlegel,
Confeiller provincial à Croffen, m’écrit que ii l’on ne mettait que peu de
carpes dans un vivier gras, elles prenoient une figure arrondie; que leurs
écailles devenoient brillantes comme de l’or, & qu’à caufe de cela on les
nommoit carpes d’or; mais que ü le vivier était maigre, le poiffon devenoit
long & pointu; que fa couleur était d’un blanc d’argent, & que par cette
raifon ori lui dônnoit le nom de carpe argentine; & enfin, fi le vivier était
fangeux, les carpes devenoient noires & à greffe'tête; ce qui leur faifoit
donner le nom de carpes à goître.
■-D9nS la conftruétion des viviers pour ces poiffons ^|il faut for-tout
bien prendre garde au fond, fi l’on veut en tirer lé plus grand profit
poflible. C eft encore Te fond qui détermine le nombre des carpes oeuvées
qu’on doit mettre dans les viviers deftinés à la multiplication de ces
poiffons : car fi lé fond eft gras, un feul poiffon ceuvé fuffit pour le vivier,
quand même il aurait fix arpens, comme on peut voir par l’exemple que
rapporte ce même Mr, Schlegel, dont je viens de parler. Voici ce qu’il
ma écrit fur ce fojet. “ L’année paffée je mis dans un vivier de dix-fèpt
arpens, quatre poiffons mâles & trois oeuvés; ceux-ci firent plus de dix
mille foixantaines de fiai ; mais qui a caufe du trop grand nombre ne
parvint qu’à la iongueur de trois pouces. Et lorfque je lui demandois s’il
était bien for que ce nombre était jufte, il me répondit: J’en fis mettre
dix foixantaines dans une petite huche criblée, dont elle devint affez pleine;
après quoi je verfai dix de ces hachées dans un autre vafe plus grandi
& après avoir fait une marque 'à l’endroit jufqu’oÙ les cent foixantaines
alloient, je fis verfer focceffivement tout le frai dans le vafe : multipliant
enfuite_cent foixantaines par le nombre de fois qu’on avoit-rempli le
vafe, je trouvai environ dix mille foixantaines en tout. :Le lendemain,
lorfqu’on nettoya le vivier, on jetta au moins encore cent foixantaines, qui’
avec les précédentes font une fomme de dix mille foixantaines de poiffons,
Le printems prochain, je ne ferai mettre dans ce vivier qu’un poiffon
oeuvé & deux mâles; cependant je crains toujours d’avoir encore trop de
frai, & d’être obligé de le faire jeter, à moins qu’il n’ait cinq à fix pouces
de long; câf lorfque le frai n’a pas atteint cette grandeur dans la première
année, les carpes ne deviennent jamais greffes, quand même elles auraient
de la nourriture en abondance. La raifon, continue-t-il, de ce que j’ai
s ) SMS^Manuferie- ,■ ... • , - , -,, , ) Bcchn. Cturm. T o a . I. p , IS > . '
feu une 6 grande quantité de fiai d’une feule carpe, que vous y avez
compté d’oeufs, eft probablement que votre carpe ne pefoit que trois
livres, au lieu que la mienne en pefoit huit; peut-être aufli que la vôtre
était longue & étroite; & celles dont je me fers pour le frai doivent être
ramaffées, larges, ventrues & pleines de frai.
Pour me convaincre encore plus de cette grande quantité de frai, cet
excellent économifte m’envoya une de fes carpes dont il fe fort pour frayer.
Elle pefoit neuf livres & trois quarts; fa longueur était d’un pied & trois
pouces; fa largeur de cinq pouces, & fon épaiffeur de deux pouces & demi.
J’en pris une dèmi-dragme de frai, qui confiftoit en des oeufs verdâtres1;
& après les avoir fait fecher, je trouvai que leur nombre montait à 1295;
par conféquent il y en avoit 621,600 dans tout l’ovaire. Ce nombre eft
trop grand pour que les alevins ne fe gênent pas mutuellement dans leur
accroiffement. Voici donc ce que je confeillerois à Mr. de Schlegel, pour
diminuer le nombre des oeufs fécondés : i°. Il ne doit mettre dans le
vivier qu’une carpe mâle; car comme les oeufs des poiffons font fécondés
par les mâles:qui frayent par-deffus, il eft évident qu’un feul ne peut pas
en féconder autant que deux. 2°. Il devrait, tout de fuite après le frai,
faire ôter une partie des herbes, fur lefquelles les poiffons ont dépofé leurs
oeufs : comme ils fraient ordinairement au bord de l’étang, il ne fera pas
difficile d’ôter les oeufs fuperflus. 3°. Mais fi, malgré tout cela, le nombre
des alevins eft encore trop grand, je lui confeille de prendre, dans la fuite,
un petit poiffon oeuvé, Voici encore un autre paffage de cette lettre, par
lequel on voit le grand profit que l’on a, lorfque le fond de l’étang à
engraiffer eft bon,'& que le nombre d’alevins qu’on y met, n’eft pas trop
grand. ‘‘ Le premier automne, dit - il, après que mes alevins ont été
tranfportés dans le vivier deftiné à les engraiffer, & qu’ils y ont refté deux
Étés, ces carpes pèfent déjà trois à quatre livres, quand je n’y en ai mis
que la moitié de ce qu’en mettent les autres; au lieu que ceux quifuivent
l’ancien ufage, font obligés d’attendre cinq à fix ans pour en avoir d’aulli
greffes. En général, mes carpes font bien plus graffes que les autres; & e’eft
aufli par cette raifon qu’elles font fort recherchées par lespêcheurs deBerlin.
En parlant de la brème, j’ai fait voir que ce poiffon eft fojet à l’hydro-
pifie : on a remarqué aufli la même maladie à la carpe. Mr. le profeffeur
Schrahck, à Ingelftadt en Bavière, m’écrivit qu’au village de Biburg, dans
la même province, quelqu’un achetta une carpe de fix livres. Après que
l’acheteur l’eut fait ouvrir, on y trouva, au lieu de laitance, une fi grande
quantité d’eau, que le poiffon ne pefa plus que trois livres; ce qui prouve
inconteftablement que cette carpe avoit été hydropique.