retirer les deux mâchoires. La langue cil large, mince, unie; & eft
terminée en pointe par devant. Les narines font placées devant fur le
bord; elles font couvertes d’une peau, qui eft terminée par : deux barbillons.
Près de ce bord, on voit les yeux, qui font petits. La prunelle eft d’un verd
de mer, & l’iris jaune. Derrière les yeux, on remarque deux ouvertures
en forme de croiifant, qui aboutilfent au gozier dans une direétion oblique.
C’eft par-là que le poiffon rejette l’eau qu’il a refpirée. Les cinq ouvertures
des ouïes, qui font fur les côtés, font couvertes par la peau avancée du
dos & des côtés. La première ouverture des ouïes a un rapport intime
avec celle qui eft v is -à -v is ; car la fonde étant paffée par l’une, elle
reffort par l’autre, Ces ouvertures ne font pas fi dégagées dans ce poiffon
que dans les autres requins ; car entre chaque ouverture, on trouve une
peau qui couvre l’ouverture voifine. La fuperficie fupérieure eft grife, &
l’inférieure blanche. La première eft couverte de petites pointes crochues,
recourbées vers la queue; & la fécondé, eft unie.
Les Turcs font de cette peau le plus beau chagrinsdont on fait
les fauffes boîtes de montre. Les Romains s’en fervent {tour polir le bois
& l’ivoire. Les nageoires font grandes & larges; & c’eft probablement ce
qui lui a fait donner le nom d'angelot de mer.. Les nageoires ventrales font
longues & blanches ; les peéïorales blanches par deffus, brunes par
deffous. Les deux nageoires du dos font petites, & font fituées fur la
queue. La nageoire de la queue a une direétion verticale & une petite
échancrure en forme d’ovale. La cavité du ventre eft longue & large;
l’anus allongé, & placé entre les deux nageoires ventrales. Dans les
mâles, on trouve près de ces nageoires, deux corps cartilagineux &
longs, que les naturaliftes ont pris pour des membres de génération;
mais c’eft des efpèces de mains, comme je l’ai dit ailleurs. L’angelot de
mer n’a point de nageoire à l’anus.
On trouve ce poiffon dans la Méditerranée & dans la mer du Nord.
Dans les environs de l’Angleterre, on en prend de cent livres c); dans la
Méditerranée, de cent foixante d j Vers la Hollande, on en trouve
quelquefois d’une groffeur monftrueufe e). Il parvient à la longueur de fix
à huit pieds, & eft du nombre des poiffons voraces. Comme il féjourne
ordinairement dans le fond, il vit fur-tout de plies & de rayes , & on en
trouve fouvent dans fon eftomaa II eft fi hardi, qu’il attaque même fes
hommes; c’eft ce qui eft arrivé à un pêcheur anglois, qui en avoit pris
un
c ) Penn. B. Z. IIL p. 99.
d) RondeL Hift. des PoiiE P. I. p. 309.
e ) Gronov. Muf I. p. 63.
f) Penn. Au lieu cité.
D ë 1! A i> e Me r . 55
Utt dans fes filets, & qui s’en étant approché imprudemment, en fut fort
maltraité / ) . On l’attire, comme les précédens, avec un morceau de
Viande attaché à un hameçon. Selon Arijlote, le mâle pour la fécondation,
ne fait autre chofe que fe frotter contre le dos de la femelle g~). Au
printems & en automne, elle fait ordinairement fept à huit petits hy.
Gronov affure, qu’elle en fait treize d’une feule fois, qui ont plus de huit
pouces de long.i), La chair de ce poiffon eft mauVaife; il n’y a que le
peuple qui l’achète: cependant Galien prétend qu’ëlle eft plus nourriffante
qüë celle de la torpille & de lâ paténaque k j
Le foie eft gros, épais, dur, d’un jaune pâle. Le fiel eft d’un Verd
foncé. La rate eft petite; l’eftomac grand, & le canal inteftinal large.
Ce poiffon fe nomme :
Meerengel, en Allemagne, Monck, ou Anget-Fish, ett An.
Schoerhay, Pakhay, enHoliandë. gleterré.
Ange, Angelot de mer, en France, Squadra & Squadro, en Italie &
Pei-Ange, à Marfeille. en Sardaigne,
Quand Arijlote dit que ïangelot de mer a la propriété de changer de
couleur, & de prendre celle du poiffon dont il veut s’emparer /), cela eft
âufli peu fondé que lorfqu’il dit aufli que ce poiffon dans un grand danger,
reçoit fes petits dans fori corps. Le premier fait eft évidemment impoffible,
puifque la peau eft épaiffe & n’eft point du tout tranfparente. J’ai prouvé
que le fécond l'étoit âuffi m). Il eft plus vraifemblable, comme le raconte
Oppian, qüe dans Un grand danger, les gros couvrent les petits de leurs
nageoires, pour les mettre à l’abri.
Selon Rondelet,, les oeufs de Ce poiffon réduits en poudre, font un
remède fouverain contre la diarrhée n). Mais quand cet auteur raconte
d’après Pline o ) , & qu ii prétend même confirmer par l’expérience qüe
ce poiffon appliqué fut les feins, les empêche de trop croître, & leur
donne de la fermeté, c’eft une fable à la mode dë ces tèms.
Du relie, Bellon eft le premier qui ait repréfenté ce poiffon, qui étoit
connu des Grecs & dès Romains. Mais fon delfin eft très-mauvais; car
il a omis les narines & les ouvertures de derrière les ouïes, & il a
repréfenté la nageoire de la queue fourchue p).
f ) Penn. B. Z. III. p. 99; ï ) H. A. lik 3-. cap. 3.
g ) H. A. lib.'j. cap. 5 . ‘ . m.) Voyez là troifième Partie, p. 65»
h) H. A. lib. 5. cap. 10 . Hift. Ües-iPoifll P. I. p. dp®. •
î‘; '’ ¿v) Zôoph. n. 1 5 1 ; : ^lU^®o,)VBib."3i. cap. 10.
, . 1) De Aliment. ClaiT; lit ,, Aquat. p. 7 3*
Part. IV . G