en une pointe courte & émouffée. La queue eft longue. L'ouverture de
la bouche eft grande & longue. Les deux mâchoires font garnies de trois
rangées de dents unies, qui fe terminent en pointes. Le palais eft inégal,
de même que la langue, qui eft cartilagineufe. Les yeux font allongés,
& ont une prunelle de verd de mer, dans un iris blanchâtre. Tout près
des yeux & derrière eux, font les trous aqueux, & auprès de ceux-ci, on
Voit les ouvertures des ouïes. L’anus eft entre les nageoires Ventrales, où
fe trouvent les deux corps qui font repréfentés fur notre planche. Comme
ces corps ne fe trouvent que chez les mâles, les naturaliftes croient que
ce font des membres virils. Mais par la diffeétion exaéte que j’en ai faite,
j ’ai découvert que ce font des efpèces de mains, qui fervent au mâle pour
tenir la femelle ferme dans le moment de l’accouplement. Ces mains font
compofées de deux os & d’un long cartilage, qui peuvent être éloignés
l’un de l’autre par les mufcles, comme dans les rayes a). Je donnerai à la
fin de l’ouvrage quelques planches, qui repréfenteront au net toutes ces
parties intéreifantes. Le dos eft garni de deux nageoires, dont la première
fe trouve derrière la nageoire du ventre, & la fécondé vis-à-vis de la
nageoire de l’anus. Cette dernière eft placée entre les nageoires du
ventre & celle de la queue, au milieu. La queue eft étroite, & a près
de l’extrémité une échancrure profonde.
Ce poifion vit également dans les climats chauds & froids ; de forte
qu’on le trouve en Angleterre, en Norvège, dans la Méditerranée, au
Cap de Bonne-Efpérance, aux îles Canaries, & fous la ligne. Il parvient à
la longueur de cinq à fix pieds, & eft un de ces poiffons voraces qui font
redoutables aux hommes mêmes. Il fuit les vaiffeaux, & faifit avidement
tout ce qui en tombe. Osbeck raconte qu’il a trouvé dans l’eftomac d’une
rouffette, outre une quantité de bonites b j, des poulets avec leurs plumes,
que l’on aVoit jettés dans la mer c j. Ce poiifon eft fi hardi, que les
hommes mêmes ne font pas à l’abri de fes attaques; & voilà pourquoi les
matelots qui fe baignent, prennent des précautions pour s’en garantir.
On le prend avec de greffes cordes, auxquelles on a attaché des
crochets appâtés avec un morceau de lard, ou une poule. Il a la vie fi
dure, que lorfqu’on lui a coupé la tête & la queue, & qu’on a été les
entrailles, le tronc remue encore pendant une heure d j.
Ce poiflbn a la chair dure & huileufe; voilà pourquoi on ne le mange
qu’en cas de néceffité, & feulement quand il eft jeune. On le coupe en
tranches, & on le laiffe tremper dans l’eau, jufqu’à ce que l’huile enfoit
a.) Voyez la troifième Partie, p. 44.
b) Scomber Pelamis. L.
c) Reife nach China, p. 93.
d) Àu lieu cité.
fortie; ce qu’on reconnoît lorfqu’il ne s’élève plus dè graiffe fur la fuperficie.
On fe fert de fa peau pour polir les ouvrages de bois. D’ailleurs, ce poiifon
eft du nombre des vivipares; & on prétend avoir trouvé dans le ventre
d’une femelle dix-neuf petits. Elle les'fait l’un après l’autre: car les
pêcheurs affurent qu’elle porte toujours. Selon Mr. Pennant, les femelles
font beaucoup plus greffes que les mâles ej.
Le foie, qui eft attaché au diaphragme, eft fort grand. Il couvre les
inteftins & les entoure par en haut. Il confifte en trois lobes, dont celui
du milieu eft le plus petit La rate eft petite & attachée au fond de
■l’eftomac. L’éfophage eft large, & l’eftomac eft long: ils ont tous les deux
des fibres mufculaires affez forts. Le canal inteftinal eft court, & n’a que
deux finuofités. Le duodène eft mince, & le boyau culier étroit. Derrière
ce boyau, près de l’anus, on voit un appendice long, qui eft attaché à
l’épine du dos, & dont la peau eft épaiffe. Au commencement de cet
appendice, on voit une foupape, qui empêche que les exçrémens n’y
entrent. Car le vent que je foufflois dans le boyau culier n’y entroit
nullement; mais en fouillant dans l’appendice, cet inteftin fe gonfloit à
vue d’oeil. Les reins font petits, oblongs & placés deffous le diaphragme.
Les uretères ont une peau fort mince, & font attachés le long de l’épine
du dos. Ils fe joignent devant l’anus, où ils s’ouvrent. Au côté des
uretères, on voit les vaiffeaux fpermatiques, qui font fort minces, & vont
en ferpentant, fe joignant de la même manière que les uretères. Au-deffous
de l’anus, on trouve deux ouvertures, par lefquelles on peut enfler le
bas-ventre, comme je l’ai indiqué dans les rayes / ) .
Ce poiifon eft connu fous différens noms. On le nomme :
Gengerter Hay, en Allémagne. Gat-Aughier & Gutaugur, à Mar-
Greater Cot-Fish & Bronce, en feille.
Angleterre. ,Çmo rochiero, en Languedoc.
Rouffette & Rouffette tigrée, en Scor^one, en Italie.
France. . Borne lia a y , en Hollande.
Les Grecs & les Romains ne parlent qu’en peu de mots de la rouffette
tigrée. Bellon en a parlé plus amplement, & nous en a laiffé un deflin g );
mais il n’eft pas exaét. Celui que nous devons à Rondelet, eft meilleur h \
Artédi i j , Klein k j & Linné /) citent mal à propos pour notre poiffon
le catulus major de Willughby : car comme cet auteur dit que fon poiffon
t) 'B. z. irr. p. 114. .
f ) Voyez la troifième Partie , p. 47. t ) Âtifl; Pifc. n i. p. 10. n. ; .
g) Aquat. p. 73':/' . ' ' T /) S. S . p. 399. n. 3.
h) Hiit. des PoiiT P. I. p. 29g.