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qui efl aéluelletnent à la portée de nos fènsi.
Mais-l'homme eft fait pour embrafter quelque
choie de plus étendu que cette fphére-là : & quoiqu’il
ne puiffe pas comprendre à la fois le nombre
prodigieux des.créatures;que-même dans chaque
in d iv id u ,, il rencontre bientôt le non plus ultra de
fès connoiftànees, i l a' cependant l ’admirable faculté
de s’élever à les confidérer tous, rapprochés,
fous l ’idée d e leurs qualités communes, & réduits
à certains chefs généraux, qu’i l eft maître de retracer
en très-peu de tems dans fon elprit ; à, l ’aide
dequoi i l palîê en r e vû e , comme par pelotons,,
cette quantité d’objets qui l ’étonnoit d’abord. Veut-
il quelque échantillon de la manière dont tous ces:
objets le mêlent SC fe diipofont dans le monde ,
l ’imagination vient à Ion focours, & lui drelfe des
Théâtres eompofés & combinés avec une variété
infinie. V o ilà l ’étendue d’idées où il eft permis à
l ’homme de promener fonefprk..
On doit donc certainement fçavoir beaucoup
de gré aux Philofophes qui ont travaillé à faciliter
cette connoiïîance de tant d ’eipéces de créatures :
d’autant plus qu’ils ont trouvé le fècret de foula-
ger l ’efprft dans cette é tu d e , en le conduilànt
d ’une e lpéce à-.l’autre par une gradation infenfible,
par une chaîne dont chaque anneau approche de
lu i , & lu i m e t , pour ainfidire, entre lestmains le
füivant. C ’eft' beaucoup de démêler Sc de raflèm»
bler fous certaines elpéces. des objets,qui par Giflen
t tous fi différens les uns des autres. Mais c ’eftdes
fossiles. 4
toute autre chofe de mettre chacune de c e s e fp é -
ces à fa véritable p la c e , enforte qu’on voie clairement
ce qu’elle a de commun avec d’autres com-
prifes fous le même g en r e , & quelle fubdivifion
d’efpéces elle admet encore. Par exemple , on
difcerne du premier coup d’oeil c e quon appelle
régné minéral, régné 'végétal, régné animal ; on n’hé-
fioera pas à rapporter un c ry fta l, une pierre pré-
cieufe, au premier. Mais quand il s’agira de diftin-'
guer or , diamant, f e r , ■ craie, tartre , afphalt,
marne , f e l , foufre, & c . la quantité d’objets mettra
dans un embarras, d’où l ’on ne fortira quen
rapprochant ceux qui ont le plusd’affi n ité entr eux ;
c ’eft ainfi que les craies & les marnes conviendront
dans l ’idée de terres , l ’afphalt & le foufre
dans c e lle de biturqes, le tartre & le diamant
dans celle de cryftallifations, l ’or & le fer dans
celle de métaux : cela trouvé , on ne tardera pas à
joindre plufieurs terres , plufieurs bitumes , piu-
fieurs cryftallifations ; enfin , en comparant ces
genres entr’e u x , on obfervera une gradation entre
terres, pierres & métaux : & ainfi le régné minéral
fo trouvera arrangé. Non-fèulement on fera
la même chofe pour le régné v é g é ta l, mais on
pourra voir un paffage du premier à c e lu i-c i, auquel
on ne penfoit peut-être point.
Comme la Nature s’élève par dégrés à des productions
plus parfaites, i l n’y a pas une diftance
bien marquée de tout ce qui eft minéral à tout ce
qui végété ; il fe trouve un milieu dans certaines