
i $6 - L E T T R E
étoient fort lourdes & d’un beau rouge-clair, ve-
noient d’une montagne près de Teolo, dans le Territoire
de Padoüe. Il y avoit dans ces cailloux
plusieurs petites cavités vuides dont la furface intérieure
étoit d un rouge-fale, à peu près comme
de la brique brûlée.
Tous ces cailloux, dont le parfait poli dans leur
calibre, eft pareil à celui du verre 8c des émaux,
& dont la matière n eft précifément qu’un mélange
intime à diverfes proportions de particules infiniment
fubtiles de cryftal de roche Sc de molécules
de terre fine diverfement coloréespar des particules
minérales : tous ces cailloux, dis-je, ont
une fi grande reifemblance aux corps qui ont été
en fiifion, que cela m’engagea à les ranger dans la
claife des Pierres fondues, dans une Lettre furies
Minéraux, adrefîee en r y i 3. à M. V.aKifnieri.
J avois d abord cru qu’au moins les cornalines
Sc les calcédoines étoient des monumens indubitables
de l’incendie, qui, ftiivant la conjecture in-
génieufède M. de Leibnitz, transforma, lors delà
féparation de la lumière d’avec les ténèbres, une
malfe fondue dans le Soleil en notre Globe. Et en
effet, la vraie croûte de la Terre, outre divers
mélanges, paroît, fuivant le même Philofophe,
une efpéce de 'vitrification, dont les fables font des
fragmens, Sc la mer une efpéce de liquide lixi-
Viel, ou d’huile par inclinaifon, oleumper deliquium,
comme parlent les Chimiftes. Mais ayant découvert
depuis, des corps marins pétrifiés dans des
§UR LES PIERRES À FUSIL; 157
c ailloux de Calcédoine, Sc la grande quantité de î
produ&ions terreftres & marines, qui forment
comme une fécondé claffe de Pierres à fufil, m’o-
bligérent à laiffer là la conjeaure de M. de Leibnitz
p°ur ce qu’elle valoit 5 & à revenir a ia vraie
origine de toutes ces Pierres. Car ainfi que M. de
Leibnitz le reconnoît lui-même ,& que les Chimiftes
le fçavent très-bien, l’eau peut produire des
effets pareils à ceux du feu à divers égards. Je reconnus
donc, avec la derniere evidence, que les
pierres à fufil, Sc toutes celles que je regardois
comme fondues > avoient ete formées dans 1 eau,
Sc non dans le feu.
En effet, tous les phénomènes qui concernent
ces pierres, concourent à prouver démonftrative-
ment que des particules de criftal & de terre, réduites
par une efpéce de folution, a une petiteffè
prefque infinie , formèrent dans 1 eau un mélangé
fort femblable aux matières fondues au feu, de
forte que cette madère de la pierre a fufil, étant
encore fort liquide, s’introduifit avec facilite dans
les interftices des fibres du bois, dans les petits vuides
des coraux, dans ceux des ojjemens de divers
animaux, dans la cavité des coquillages, Sc dans
celle des crufiacées j après quoi cette matière fè
condenfà toute à la fois, ainfi qu’il arrive aux corps
fondus.
Rien ne prouve mieux tout cela, que les echmites
de caillou d’Angleterre, d Allemagne, d Italie,
mais principalement ceux de Breuil-pont, puifqu ils