des Pins, 'des Rétama ( Genista Nubigena) et des Graminées. Comme il n’àvoit pas en
l’occasion deivoir les fruits du Pin, il ne put déterminer:son espèce; m’âyant fait jadis
l’honneur de me consulter à ce sujet, je lui répondis, d’après une seule feuille, que je
tenois , je crois, de M. Broussonnet, que le Pin des Canaries me paroissoit différent
de tous ceux que je connoissois, et notamment du Pin d’A lep , q u i, faisant
’ presque le tour entier de la Méditerranée, auroit pu etre soupçonne habiter aussi les
Canaries,
MM. de Buch et Christian Smith adoptent aussi cinq zones dans la végétation de
Ténériffe, savoir: celles des Formes Africaines, des Cultures Européennes, des Forets,
des Pins des Canaries et des Rétama ; ils ont les premiers formellement désigné le
Pin sous le nom de JPinus Canariensis, et ont indiqué cette espèce unique dans la
liste des plantes de Ténériffe, jnais sans en donner .aucune description. Grâces à la
forme heureuse que M. de Buch a donnée à ce catalogue, nous savons que cette espèce
de Pin est propre aux îles Canaries et n’a pas été retrouvée ailleurs ; qu elle habite
Ténériffe, depuis le bord de la mer jusqu’à 6700 pieds au-dessus de son niveau;
mais que la région des Pins, ou la portion dans laquelle il est. le plus abondant, doit
être comptée de 4bB° à 6900 pieds de hauteur absolue ; que cette zone offre, une
température moyenne de 8.° de Réaumur, soit io.° dutherm. çentigiy; qu il y tombe
de la neige en hiver pendant environ un mois; que la, température des.sources y
est de 7.0 de Réaumur, et que par conséquent cette zone est analogue.par sa température
à l’Ecosse ou au nord de la France et de l’Allemagne.
Ces dernières circonstances peuvent faire espérer que le Pin des Canaries pourra
s’acclimater dans l’Europe tempérée. D’ailleurs, il faut remarquer que cet arbre doit
être peu sensible aux influences de la température, puisque, dans les Canaries meme ,
il se trouve depuis le niveau de la mer, ou la température moyenne est de 17 a 18
degrés de Réaumur, jusqu’à 6700 pieds de hauteur absolue, terme où la température
moyenne est d’environ 6 degrés : nouvel exemple à ajouter à tous ceux que nous con-
noissons, de l’indifférence de plusieurs plantes à la hauteur absolue et quelquefois a
la température.
Les jeunes Pins des Canaries, dus aux graines envoyées par M. Courant, ont été
conservés dès leur naissance dans une serre, dont la température, en hiver, est de
8 à 1 o degrés de Réaumur, et pendant l’été, ils ont été exposes en plein air ; c est dans
ces circonstances qu’au bout de la quatrième année un d’eux a cdinmence a donner des
chatons mâles, et à la cinquième année j’en ai eu deux en fleurs. C’est une circonstance
remarquable de l’histoire de cette espèce, que de voir fleurir aussi jeune et aussi petit
un arbre; qui_ paroît destiné à atteindre à une très-grande dimension , puisque M. de
Humboldt dit {Koy. tom. /, p . aSq, édit, rra-8.“) que les Pins du Pic de Teyde servoient
jadis à la mâture des vaisseaux ; M. Tessier', qu’on en fait des sqlives et des planches,
et M. Bory, d’après Feuillée, que la charpente entière d’une église a été construite
avec un seul de ces ârtëres. Il est problablë, que la chaleur à laquelle j ’ai soumis
pes Pins a été cause de quelque accélération dans leur végétation, car ceux que j ’ai
conservés dans une orangerie, dont la chaleur ne passe pas cinq degrés de Réaumur,
en hiver , .n ont pas encore fleuri. Il sera curieux de savoir si à Ténériffe les Pins des
zones inférieures fleurissent d’aussi bonne heure que ceux de nos serres, et s’ils a tte ignent
la même grandeur que Ceux des zones supérieures. Les Pins de nos serres ont
l ’un et l’autre fleuri au mgis de Mars.
Les Pms des Canaries étaient jadis employés par les Guanches, et le sont encore
aujourd’hui par les paysans actuels de Ténériffe, pour s’éclairer en guise de torches,
comme on le fait dans les Pyrénées, avec les morceaux de bois détachés du Pinus
uncmata de Ramoîid. On s’en sert aussi pour allumer le feu, et on en retire ( Tessier,
cite par L e Dru) du brai qu’on envoie à Cadix; ces arbres, ajoute M. Tessier,
s épuisant ainsi, il est à craindre que l’île n’en soit un jour dégarnie :: c’est peut-être
cette cause qui a fait détruire les Pins de la partie inférieure et les a relégués dans
les parties hautês de I’île.
,, -M. Gourant m’écrit que .< le Pin des Canaries couronne la cime des montagnes qui
» servent de base au Pic de Teyde, èt qu’on le'trouve également à la Grande-Canarie,
» la plus boisée et la mieux arrosée des sept îles. Le nombre, ajoute-t-il, en diminue
» tous les jours, parce qu’on'ne le replante jamais, et que, malgré les défenses,
v on en coupe pour la construction des maisons. Ce bois est résineux, et quoique
* n’e W j*™“ 8 .soigné, il se conserve sain pendant des siècles ; il s’enflamme si aise'-
» ment, que les gens du peuple s’en servent pour s’éclairer et les pêcheurs pour faire
» des flambeaux, à la lueur desquels ils pêchent pendant la nuit. Cet arbre doit parvenir
» a une grande hauteur, car j ’ai vu fréquemment des planches qui avoient deux pieds
» de longueur sur deux pouces d’épaisseur ; toutes les croisées et portes des maisons;
v même celles des paysans, sont bordées de ces planches au lieu de pierres de taille;
* les solives s’ont également dumêmebois chezlesgens de la campagne. Les propriétaires
» des Canaries sont si insoucians, qu’on ne peut leur persuader de former des pépinières
» de Tea CPmus Canariensis) pour remplacer les arbres qu’on coupe journellement ».