C H A P I T R E VI.
Des Kêratophytes.
A p r e s avoir parlé des Corallines, l’ordre naturel exige
que nous nous attachions à décrire les Arbriffeaux de
Mer, ou Frutices coralloïdes, appelles- par les' Naturalises,
Lithophytes, Lithoxyles, ou Kêratophytes. Ces différents noms
fervent à donner une idée de leur eompofitidn,- qui âu premier
coup d’oeil paroit confifter en une' fubffance qui tient
en partie de la nature du bois, ou1 de la corne, & en partie;
de celle de là pierre. Ces matières s’y trouvent difpofées di£
ferement les unes par rapport aux autres.
L e u r forme reffemble généralement à celle des Arbriffeaux;
ils ont des bafes en ferme de racines, par lefquell'es ils
adhérent à quelques Corps fblides dans l’Océan ; on y remarque
une tige ou un tronc, & des branches qui different
dans leurs difpofitions; Dans les uns ces branches fent plus
dîilinétes, & font fubdivifées en de petits rameaux fcparés;
au lieu que Fes autres ont leurs petites ramifications tellement
entrelaflëes qu’elles forment une efpéce de filet. C’eft cette
diverfité de leur figure qui. leur a fait donner,, par ceux qui
en ont fait des collections,- les noms d’Eventails de Mer, de
Plumes de Mer, & d’autres femblables, qui ont du rapport
avec leurs formes extérieures.
C om m e je n’ai pas deffein d’écrire un Traité complet fur
ce fiijet,. je me contenterai de remarquer que la plupart de
ces Kêratophytes, parvenus à leur point de perfeétion, offrent
à un obfervateur attentif, les particularités fuivantes.
Premièrement, une forte de bafe ou de racine ligneu-
fe, qui e£t toujours ou adhérente à quelque corps folide, tels
que
que des Rochers, des Coraux, de grandes Coquilles &c., ou
qui du moins laiffe des traces, qui font voir qu’elle y a été
attachée.
Cette bafe paroit confifter en fibres longitudinales, fi
étroitement ferrées les unes avec les autres, par leurs côtés,
qu’on ne peut les féparer fans effort. Ces fibres s’élèvent
de la circonférence de la bafe, jufqu’à la tige, où elles ont
la même fituation. En fe fervant de bons Verres, on peut fe
convaincre que ce même tiflu fe conferve jufqu’aux extrémités
des branches, & l’on découvre en même tems, que
çes fibres-, que l’on avoit prifes pour telles à l’oeil fimple,
font réellement de petits tuyaux, dont tout l’Arbriffeau eft
compofé, mais qui font applatis & rétrécis.
S i on coupe transverfalement le tronc, ou quelque groffe
branche de ces Kêratophytes, & qu’on les examine avec attention,
l’on [découvre clairement le cours de ces tubes'
longitudinaux; & l’on apperçoit en même tems, qu’ils font
placés en rond autour du centre du tronc, à peu près de
la même manière que ces annaux circulaires qui fe forment
dans le bois, mais avec cette différence, que les premiers ne
fe touchent pas de fi près que ceux-ci, & qu’il paroit vifi-
blement qu’ils font appliqués l’un au deffus de l’autre, & fou-
vent avec quelque matière hétérogène entre deux.
L a partie que nous venons de décrire eft ce que quelques
Naturaliftes appellent la partie ligneufe des Kêratophytes ; les
autres la défignent par un nom qui fait connoitre qu’elle reffemble
à de la corne, parce qu’elle en a l’odeur lors qu’on la
brûle.
L e s particularités que nous venons de détailler, fe trouvent
prefque uniformément, dans toutes les efpèces de Kéra-
tophytes, quelques différentes qu’elles foient d’ailleurs par leur
gran