nous ne nous sommes pas là-dessus figuré que nous-mêmes nous allions produire
l’ouvrage où se complaisait déjà 4’imagination de M. Schmeltz et nous
poser en émules d’un Schweinfurth. Aucun de nous deux n’est homme du
métier; ni l’un, ni l’autre de nous n’a été »nourri dans le sérail” ethnographique,
et par conséquent notre Indu strie des C a fres du S u d -E st de IA fr iq u e
est un ouvrage sans aucune prétention.
Cette industrie des cafres que nous voulons mieux faire connaître est
depuis fort longtemps ce qu’elle se trouve encore être maintenant, et s’il ne
fallait tenir compte que du caractère foncièrement conservateur de ces gens
primitifs, il n’y aurait à prévoir pour un long avenir aucun caprice dans les
modes qui règlent la construction des armes, la coupe des vêtements, la forme
des meubles et ustensiles. Tant qu’ils continueront à fabriquer eux-mêmes ce
dont ils ont besoin, chacun d’entre eux s’en tiendra à la routine que son père
et son grand-père ont suivie. Ce qui maintenant est pour eux »fin de siècle”
l’était déjà il y a cent ans 1 ). Pourtant ils ne poussent pas ce conservatisme à
ce point qu’ils continuent à confectionner de leurs mains les objets que
l’Europe leur envoie à meilleur compte et plus beaux, du moin$ dans leur
estime, et il est à craindre que l’industrie des cafres ne disparaisse peu à
peu, supplantée par les produits européens. Déjà maintenant on peut constater
chez les indigènes qui habitent la côte, et qui achètent au lieu de
fabriquer, une habileté moindre que chez leurs congénères de l’intérieur.
L e moment viendra où il n’y aura plus que dans les musées et collections
privées des armes et des ustensiles de provenance vraiment indigène.
Il n’y a cependant que bien peu de personnes qui puissent aller de
musée en musée pour prendre par elles-mêmes connaissance des objets qui
se trouvent dans chaque collection -, et l’on peut dire que ceux-ci n’atteignent
vraiment leur complète utilité que lorsqu’on en publie des dessins et des
descriptions. De là notre détermination de publier, dans l’intérêt de la science,
le présent ouvrage, nous résignant, en même temps que les éditeurs, aux
sacrifices financiers qui en résulteront.
Nous avons obtenu pour cette tâche le concours tout particulièrement
précieux de M. C. M. Pleyte, conservateur du musée ethnographique de
l) Le musée ethnographique de Copenhague possède une peinture (N°. 125) de la moitié dii 17e siècle, représentant
un Indien Potacho du Brésil, dont les armes sont de tout point conformes à celles, datant de l’époque
actuelle, que le musée possède (N°. 126).
N a tu ra A r tis M a g istra à Amsterdam, qui a bien voulu se charger du
soin fastidieux de relire les descriptions des objets représentés sur nos p enches
j et de les retoucher au besoin. Nous lui devons beaucoup; néanmoins
il serait injuste de lui imposer aucune responsabilité pour ce qui se trouve
dans nos pages; c’est à nous seuls qu’il faudra imputer les inexactitudes
que l’on pourrait y découvrir.
Nous prions aussi le lecteur de retenir le fait que notre but principal
a été de faire connaître au moyen du dessin et de la description ie s objets
à notre portée, sans aborder dans la règle le terrain des comparaisons. Si
nous l’avons fait néanmoins parfois, fort discrètement, c’est à titre tout à
fait exceptionnel, des ressemblances ou des différences frappantes se présentant
d’elles-mêmes à nous, surtout à l’occasion des notes rapportées par
M. Muller de ses voyages dans le Nord, le Sud x) , l’Est et l’Ouest du
continent noir.
’l)' Voy. Z u id -A frik a par Hendrik P. N. Muller, chez A . W . Sîjthoff, Leyde.