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 tête,  seulement,  en  laissant  des  parties  chevelues  qui  forment  parfois  des  
 dessins  bizarres.  Il  y  en  a  qui  tressent  de  la  paille,  d’ordinaire  colorée  en  
 noir,  avec  leurs  cheveux,  de  façon  à  obtenir  des  formes  capricieuses.  On  
 trouvera  d’autrés  modes  encore  représentées  aux  figures  5  et  6  de  la planche  
 X V II  (comp.  la  description  qui  en  est  donnée  dans  le  texte).  Les  parures  
 consistant  en  plumes  assujetties  à  la  chevelure  sont  rares  dans  le  Sud-Est,  
 surtout  sur  le  Zambèze. 
 Nos  cafres  ont  naturellement  aussi  bien  que  les  autres  noirs  cette  
 senteur  particulière  que  l’on  nomme  odeur  nègre,  et  qui,  loin  de  provenir  
 exclusivement  de  la  graisse  dont  ils  s’enduisent  souvent  le  corps,  fait  partie  
 des  caractères  de  leur  race,  tout  aussi  bien  que  la  sombre  couleur  de  leur  
 peau.  Cela  n’empêche  pas  que  nous  n’ayons  constaté  partout  où  nous  
 sommes  allés  en  Afrique  que  les  noirs  dont  l’alimentation  est  suffisante  et  
 de  bonne  qualité  ont  moins  l’odeur  nègre  que  ceux  qui  vivent  pauvrement  
 et  qui  mangent  des  choses  indigestes.  Le s   blancs  du  reste  ont  aussi  leur  
 senteur  naturelle,  aussi  désagréable  aux  noirs  que  l’odeur  nègre  peut  l’être  
 aux  blancs. 
 Souvent  les  noirs  ont  l’air  fortement  tatoués,  tellement  sont  visibles  
 les  dessins  formés  sur  la  peau  par  l’existence  de  nombreux  vers  qui habitent  
 et  grouillent  dessous.  Sur  la  côte  occidentale  cette  affection  attaque  surtout  
 les  jambes  *);  ici  elle  envahit  le  corps  tout  entier. 
 L e   tatouage  est  moins  pratiqué  que  dans  d’autres  parties  de  l’Afrique,  
 et  les  individus  qui  s’en  parent  ne  le  font,  qu’ils  soient  hommes  ou  femmes, 
   que  sur  une  échelle  restreinte  et  sans  figures  compliquées.  L ’opération,  
 qui  consiste  à  faire  des  incisions  dans  lesquelles  on  verse  un  liquide  corrosif, 
   est  douloureuse,  mais  les  patients  la  subissent  avec  une  endurance  
 stoïque.  M.  Muller  a  vu  taillader  avec  un  couteau  mal  aiguisé  la peau  d’une  
 jeune  négresse,  qui  riait  sans  marquer  qu’elle  sentît  la  douleur,  quoique  
 le  sang  ruisselât  de  sa  blessure. 
 Une  étrange  sorte  de  déformation  artificielle  est  en usage sur le Zambèze,  
 mais  non  pas  dans  le  pays  d’Inhambane.  On  introduit  dans  l’organe  sexuel  
 des  petites  filles,  de  façon  à  ce  qu’il  tienne  aussi  ferme  que  possible,  un 
 l)   fig S a  et  ver  de  Guinée  sont  les  noms  des  deux  espèces  les  plus  fréquentes  sur  la  côte  occidentale; 
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 anneau  que  l’on  tire  ensuite  vers  le  bas.  Cela  fait  sortir  la  peau,  qui,  lorsque  
 la  femme  est  devenue  adulte,  pend  par  en  bas  la  largeur  de  la main  *)■ 
 Les  noirs  aiment  à  se  frotter  les  dents  avec  un  morceau  de  bois  et  
 se  livrent  à  tout  instant  à  cet  exercice.  Ils  possèdent  de  beaux  et  solides  
 râteliers,  capables  de  broyer  des  os.  Ni  dans  l’Afrique méridionale,  ni  dans  
 le  Sud-Est,  n’existe  la  mode  de  se  limer  les  dents  pour  leur  donner  une  
 forme  déterminée ;  on  n’y  connaît  pas  non  plus  ce  genre  de  beauté  que  certaines  
 peuplades  cherchent  à  acquérir  en  se  brisant  les  deux  dents  de  
 devant. 
 Si  les  femmes  de  la  contrée  de  Zanzibar  se  noircissent  de  koh l  le  
 bord  des  yeux  pour  les  faire  paraître  plus  grands,  nous  n’avons rp as  observé  
 cet  usage  chez  les  indigènes  des  contrées qui  nous  occupent.  Nous  n’y  avons  
 vu  que  rarement,  et  cela  uniquement  dans  le  bassin  du  Zambèze,  ces  
 anneaux  passés  dans  la  lèvre  (pélêle)  dont  Livingstone  parle 2). 
 Les  enfants  dévorent  des  masses  de  choses  indigestes,  de  sorte  que  
 leur  ventre  est  énorme ;  leur  nombril  aussi  est  d’ordinaire  formidable,  atteignant  
 la  grosseur  d’une  orange.  Ces  difformités  disparaissent  néanmoins  
 vers  l’âge  de  huit  ans. 
 Les  noirs  ont  l’ouïe  et  la  vue  beaucoup  plus  exercées  que  les  blancs.  
 Non  seulement  ils  voient  extrêmement  loin,  mais  ils  distinguent  dans  l’obscurité  
 des  objets  que  les  blancs  n’apercevraient  pas  du  tout.  Grâce  à  la  
 ténuité  de  l’air  et  à  l’acuité  de  leurs  sens,  qui  leur  permet  de  se  voir  et  
 de  se  comprendre  à  grande  distance,  les  nouvelles  se  propagent  en  Afrique  
 avec  une  merveilleuse  rapidité.  —  Remarquons  que  le  globe  de  l’oeil  des  
 noirs  n’est  jamais  d’un  blanc  pur;  souvent  il  est  injecté  de  sang,  souvent  
 aussi  teinté  de  jaune. 
 Quelque  perçante  que  soit  leur  vue,  cela  ne  veut  pas  dire  que  les  
 noirs  du  Mozambique  sachent  s’expliquer > les  objets  nouveaux  pour  eux,  
 par  exemple  les  images;  leurs  yeux n’y sont pas exercés.  Il y a toujours dans la  
 peinture quelque chose d’abstrait et de conventionnel, dont nous ne nous rendons  
 pas  compte  à  cause  de  l’habitude;  mais  les  noirs  ne  reconnaissent  pas  les  
 objets  qu’elle  représente.  Nous  en  avons  fait  souvent  l’épreuve;  rarement 
 1)  Voyez  pour  la  circoncision  la  description  de  nos  planches  et  aussi  l’ouvrage  de  Hartmann  cité  plus  haut,  
 page  409. 
 2)  Comp.  Livingstone,  N arrative  o f an  Expédition  to  the  Zambesi,  p.  115 .