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l’Aubier , qu’elles pénétrent enfuite dans l’intérieur des arbres quoique
fains ôc: vigoureux, ôc quelles y prennent tout leur accroiffement.
Quelques Auteurs ont cru que cette Chenille étoit l’Infe&e défigné par
les anciens Romains fous le nom de CoJJus ôc qu’ils regardoient comme
un mets fort délicat. Linné cite à cet égard Pline le Naturalifte , Liv.
X V I I . Chap. 24. mais ce dernier Auteur dit clairement que le CoJ/us
fe nourrit de Chêne , ôc on n’y trouve jamais notre Chenille. D’ailleurs
il eft peu vrqifemblable qu’exhalant une odeur alfez fétide par la raifon
que nous verrons bientôt, elle ait pu devenir un objet de friandife : ôc
d autres écrivains penfent avec plus de raifon que le CoJJus des anciens
étoit la larve du cerf volant, Lucanus cervus. Lin.
Dans? leur jeune âge , ôc auffitôt après chaque mue, le delfus du corps,
ou le dos , eft d un rouge qui tire fur la couleur cerife : mais cette couleur
devient d’un rouge brun-clair fur-tout lorfque ces Chenilles ont pris leur
accroiffement, Fig. 246. a. Le deffus du premier anneau eft couvert de
deux plaques écailleufes d un brun noirâtre t les côtés ôc le ventre font
d un jaune terne ôc n ont pas le luifant du. dos. La tête eft noire ôc on
y remarque deux efpèces d'antennes , femblables à celles de la Chenille'
du Fenouil qui produit le Grand porte queue , ôc que ces Chenilles font
rentrer ôc fortir à volonté.
■ Goedart a défigné cette efpèce fous le nom de Chenille à odeur à
Bouc , Eruca Cancer , olens hircum : effectivement elle a une odeur
défagréable due à une liqueur huileufe qu’elle rend par la bouche , ôc
qui eft contenue dans deux réfervoirs , ou veffies très - minces , placées
près de linteftin qui fait les fendions d’ellomac. On peut en voir la
defeription dans de Géer ôc mieux encore comme il le dit lui même,
dans 1 excellent Traité Anatomique de cette Chenille publié par Lyonnet.
Il eft à préfumer que cette liqueur fert à humeder ôc ramollir les fibres
du bois pour le rendre plus aifé à mâcher, ou à digérer.
Nous avons dit que leur mâchoire eft extrêmement forte , auffi faut-il
manier ces Chenilles avec précaution pour ne point s’expofer à leur'
morfure, ôc avtsif foin , quand on veut les élever, de les tenir dans des
vafes de terre., avec du bois fain, ôc du pourri. Si on fe contente de les
mettre dans des boëtes avec de la terre, elles commencent par s’envelopper
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d’un tiffu léger , à quelqu’âge qu’elles foient,
à en fortir , percent le bois ôc s’échappent.
mais elles ne tardent point
S E C O N D É T A T .
I h feroit difficile de fixer l’époque où elles ont acquis toute leur
croiffance : on en trouve pendant toute l’année à différents âges foit dans
l’intérieur des arbres , foit courantes dans les champs fi elles font prêtes
à fe métamorphofer. Elles cherchent alors quelque creux d’arbre pourri, 6c
par préférence des Saules , où elles puiffent faire leur cocon. Géoffroi dit
qu’elles fe changent en Crifalides dans l’intérieur des arbres qui ont fervi à
leur nourriture ; mais nous croyons qu’il fe trompe , ou qu’au moins fon
affertion eft trop générale : cela ne peut arriver que lorfqu’elles trouvent
dans ces mêmes arbres , des parties déjà pourries. En effet quel pourroit
être l’objet de leurs courfes vagabondes fouvent fort éloignées des arbres
propres à les nourrir , fi ce n’eft de trouver une retraite qui leur foit
favorable ? De Géer eft du même avis ; cet Auteur rapporte qu’une Chenille
trouvée au mois de Septembre dans un chemin, ôc mife dans nn vafe ,
avec du bois ôc des feuilles , s’enveloppa auffitôt de tous ces matériaux
qu’elle réunit avec de la foie : il voulut voir fa Crifalide au mois de Mai
fuivant ôc fut fort étonné de trouver la Chenille dans fon premier étar.
Ce fait eft d’autant plus fingulier que fuivant lui , d’après Réaumur , ôt
nos propres expériences, celles qui font leurs coques foit dans le Printemps ,
foit dans l’Été , ne paffent point plus de trois ou quatre femaines fans
donner leurs Papillons.
L ’intérieur du cocon eft tapiffé d’un tiflù fin ôc ferré : la Crifalide qu’il
contient, Fig. 246'. h , n’a rien d’extraordinaire quant à la couleur ; mais
elle eft remafquable par les dentelures, ou les efpèces de crochets qu’elle
a fur le dos ôc qui font diftribués fur tous les anneaux. Nous l’avons
repréfentée Fig. 24 6. c , telle qu’elle eft après la fortie du Papillon.
É T A T P A R F A I T . •
O n trouve cès Phalènes dans différents mois de l’année , collées
pendant le jour, contre le tronc des Saules ôc des Peupliers : elles font