
La conftruâion de ces nids n’eft point uniforme ; ils reffemblent
ordinairement a des facs plus ou moins allongés arrondis par les bouts , ou
a des portions de fphères , attachées contre le tronc des arbres à fept ou
huit pieds au-deffus de la terre , ou à une des principales branches. Ils font
compofés de quantité de tilfus épais & ferrés qui ont la çonfiftance de 1*
peau , & forment différentes cellules. Quelque gros que foient ces nids, ôc
quoiqu’ils foient attachés à peu près à la hauteur de l’oeil , on les apperçoit
difficilement a moins de. les chercher avec attention. parce qu’ils ont
beaucoup de reffemblance par leur forme ôc par leur couleur , avec les
boffes ou tuberofités des arbres dont les rejets ont été fouvent élagués. Ces
Chenilles fe logent cependant ordinairement fur les arbres de lifière j plutôt
qu’au centre des grands bois. Au haut de cette efpèce de poche , près du
tronc, eft un trou affez étroit par où elles Portent ôc rentrent dans leur
habitation. Elles vont ordinairement chercher leur nourriture, fur-tout dans
les temps chauds, après le coucher du foleil : & fi elles fortent de leurs
nids dans la journée, on les trouve par plaques & fans mouvement collées
les unes contre les autres , fur une branche d’arbre, ou par tas les unes fur les
autres. On ne peut trop admirer l’ordre qu’elles obfervent dans leur marche -
& quoique nous ayons toutes fortes de raifons de croire que leur fociété
eft une démocratie parfaite , il eft certain qu’elles ont un chef qui leur
fert de guide & régie tous leurs mouvements., A la première fuecède une
2e. une j e. une q.e. & ainfi de fuite fur une longueur d’environ deux
pieds , quelquefois plus. La file fe double enlùite , c’eft-à-dire que deux
Chenilles fe trouvent accollées & ferrées l’une contre l’autre. Plus loin, les
rangs font compofés de j , de 4 , de y & même de 1 o & de 2 o Chenilles
de front, qui toutes exécutent les mêmes mouvements que la conductrice,
s’arrêtent dès quelle croit devoir fe repofer, fe remettent en marche an
premier lignai, ôt fuivent les finuofités ôc les contours qu’il lui plaît de
décrire , avec autant d’exactitude ôt de forupule que pourroit faire le corps
de foldats le mieux exercé : c’eft donc' avec raifon qu’on leur a donné
le nom de Proceflionnaire que nous leur avons çonfervé. Si elles fe
difperfent fur les feuilles pour prendre leur nourriture, elles y font ferrées
les unes contre les autres, ôc leurs corps fe touchent dans toute leur longueur ;
pendant la.chaleur du jour elles fe tiennent en repos dans leurs nids,
P H A L È N E S . i* j
Quelqu’étonnante que foit la précifion avec laquelle ces Chenille»
exécutent toutes leurs manoeuvres , quelque plaifir même que prenne un
Naturalifte à les obferver , nous ne pouvons diffimuler aux Amateurs le
danger qu’ils courent en les approchant de trop près , ôc fur-tout en
effayant dê toucher à leurs nids, même avec un bâton. Nous avons déjà
parlé dans le Difcours Préliminaire des Phalènes, de l’athmofphëre de
poils dont le vent ou le moindre mouvement les environne , ôc des
inflammations qui en réfultent, fur quelque partie du corps que ces poils
foient portés ; nous renvoyons nos Ledleurs aux remèdes que nous y avon9
Indiqués, pag. 7.
S E C O N D É T A T.
N on - s e u l e m e n t ces Chenilles vivent en fociété dans leuB
premier état : maïs encore fous celui de Crifalide. Pour fe préparer
a cette métamophofe elles filent , chacune en particulier , un cocon
dans le tiffù duquel entrent tous leurs poils, de forte qu’elles y
reftént parfaitement nues. Ces cocons font adoffés Ôc ferrés l’un
contre 1 autre à peu près comme les alvéoles d’un rayon de miel :
entre leur furface ôc les parois du nid, fe trouve ordinairement une couche
épaiffe d’excréments. Si l’étendue du nid ne permet point à toutes les
Chenilles qui y font renfermées d’y fabriquer leurs cocons , elles forment
d’autres gâteaux dans le voifinage ôc autour de cette habitation,. Ces cocons
ainfi raffemblés font d’un brun roux analogue à la couleur des poils de
la Chenille , ôc reffemblent beaucoup , fur-tout après la fortie des Papillons ,
aux gâteaux de cire fabriqués par les Guêpes ôc les Frêlons. La Crifalide,
Fig. 238. b, eft molle, jaunâtre ôc armée de pointes fort courtes à fois
extrémité.
É T A T P A R T A I T ,
A u bout d’un mois environ , vers le milieu d’Août , toutes le»
Phalènes éclofent prefqu’en même temps , c’eft-à-dire, dans l’efpace de