bâtons pour le faire fécher, les Allemands lui ont donné le nom de
Stockfifch ( poiffon à bâton ). Mais on vend aufli fous ce nom un grand
nombre d’autres poilfons fecs. On le prend en partie avec des filets, en
partie avec des lignes. A Breft, on préfère les dernières : on met pour
appât des fardines, des lânçons, ou d’autres petits poiffons. On fe fert
pour cela de bateaux de deux à cinq tonnes ; montés par cinq à fept
hommes. La plus grande pêche de ces poilfons fe fait dans les environs
de la Bretagne, où l’on emploie des bateaux un peu plus grand, qui
portent neuf à dix matelots. La pêche fe fait à une diftance du bord de
trois à quatre milles. On la fait pendant la nuit avec des lignes & avec des
filets dont les mailles ont un pouce à un pouce & demi de large. Deux
matelots entretiennent le bateau dans un mouvement continuel, parce
que fans cela ils ne prendroient rien. Ce poilfon fe tient ordinairement
dans le fond ; ce qui fait qu’il faut difpofer les lignes & les filets de
manière qu’ils aient trente braffes de profondeur. Cette pêche dure depuis
le mois de Novembre jufqu’au mois de Mai : elle eft fur-tout confidérable
fur les côtes d’Angleterre & d’Irlande, Le banc de Nymphen fur les côtes
de Watherford, en fournit deux fois par an une quantité prodigieufe ti).
Selon le rapport de Mr. le comte de Querhoent, de Croific en Bretagne,
depuis le combat naval de 1759, on en trouve une quantité confidérable
dans les environs de Belle-Isle. Peut-être qu’ils y ont été attirés par les
corps morts. On les y trouve pendant toute l’année, & ils y parviennent
à la longueur de fix à fept pieds. Ce naturalifte m’a ^appris en même
tems que pendant l’hiver, vers les bords, il en meurt une quantité
fous la glace.
La première troupe paroît en Angleterre au mois de Juin, pendant
la pèche des maquereaux, & la fécondé en Septembre, pendant celle
des harengs. La merluche pourfuit, fans doute, ces poiffons pour s’en
raffaffier. Il n’eft pas rare que fix hommes en prennent un millier dans
une nuit, fans une quantité .de poiffons d’autres elpèces «). Les pêcheurs
anglois fe fervent pour cet effet feulement de la ligne.
En Angleterre, ce poiffon change fon cours; il quitte les côtes dont
nous avons parlé, & fe rend vers d’autres, apparemment pour chercher
fa proie : cependant on l’y retrouve après quelques années f ' ) , même
lorfquil a été tiré de fon afyle par une pêche opiniâtre. On remarque la
même chofe dans les autres pays à l’égard du hareng, de la morue & du
faumon.
d ) Smith's Hift. 'Watherfort. p, z 6 i . Au lieu citi.
f ) Pcnnant. B. Z. III. p. ic ji.
D e l à M e jl l v çfin Ê. 8 i
faumon. Cependant les requins & d’autres poiffons voràces peuvent y
contribuer pour beaucoup à ce que les poiffons fe réfugient fur la première
côte qui fe préfente. Probablement la merluche cherche le fond auprès
des côtes, pour fe raffaffier de poiffons, , d’ëcréviffes & de polypes; &
elle en fort quand elle n’en trouve plus.
A Penfance, dans le duché de Cornouailles, de même qu’entre Wahls
& l’Irlande, on prend aufli ce poiffon en quantité f~).
Le foie, qui eft gros & d’un jaune pâle, paffoit chez les anciens pour
un mets délicat, & on l’eftimoit autant que celui du furmulet g'). Le fiel
eft verd; l’eftomac grand, large, & au lieu d’appendices, il eft pourvu d’un
large caecum. Le canal inteftinal n’a que deux courbures. La véficule
. aerienne n’eft point divifée : elle eft forte, attachée aux côtés & à l’épine
du dos. Les reins font longs, gros, & vont fe terminer l’un & l’autre
par les uretères dans la veflie. La laite & l’ovaire font doubles. Le
dernier contient une grande quantité d’oeufs orangés de la groffeur des
grains de millet.
On nomme ce poiffon :
Stockfifch & Meerefel, en Allema- ' Bretagne, Mertan.de la miditerra-
■ gne. ' " nie“, en France;^
Lyfmg, Kulmund & Kol-Fifh, en Merlan, à Marfeilles.
Norvège. Merluqo , en Italie.
Akulliakitfock , dans le Groenland. Merlucius, à Gènes.
• Hake, en Angleterre. Nafillo, en Sardaigne & à Rome.
Merlu, Merluche, grand Merlu de Merlu^a, en Elpagne.
Oppian affure qu’il y a deux efpèces Safellus A) ; mais il ne dit pas
en quoi ils diffèrent. Pline démontre affez clairement la différence qu’il
y a dans ces deux efpèces : car il dit que l’un eft petit, & l’autre grand.
Il nomme le premier callarias, & le dernier hacchus. Celui-ci, ajoute-t-il,
ne fe prend qu’en pleine mer 2). Ainfi, comme dans la méditerranée,
execepté le callarias, on ne prend aucun poiffon qui fe rapporte au
nôtre; il y a apparence que le hacchus, qui eft le gros, eft la merluche,
& le callarias, l’officier A). Une chofe qui fe l'apporte encore, c’eft que la
merluche fe tient ordinairement en pleine mer, & l’officier vers les bords.
On m’objectera peut - être que ïafellus eft un poiffon d’un autre genre;
f ) Art o f Angl. p. i l$ . . généra Callariàt Sr Bacchi, qui non niji in alto
g ) Rondel. Hift. des PoiiT P. I. p. a n . v capiuntur. H. N. lib.-p< c. 17.
A) Haliet. lib. 1. cap. a. k ) Gadus Minutus. L.
i ) Voici ce qu’il en dit ; Afellorum duorum