
dixième édition de 1758 que linnaeus en parle sous le nom de Monoculus Polyphemus
et en citant clusius, wormius etc. Il ne se doutait donc pas que les auteurs en
eussent fait connaître plus d’une espèce, et sa phrase spécifique (Monoculus testa
plana concerna, sutura lunata, posiice dentata, cauda subulata, longissima), s’applique
également à tous les objets qu’on en avait décrits avant lui. Dans sa douzième
édition du Systema naturae, linnaeus ajouta une description détaillée, qui fit connaître
plus exactement notre animal que les descriptions précédentes, et quoiqu’elle
ne fût pas suffisante pour déterminer l’espèce que linnaeus avait sous les yeux, il
est cependant probable que ce fût celle de l’Amérique (1). Il est étonnant au reste
que linnaeus ait placé le Limule parmi son genre Monoculus, dont il donne pour
caractère oculi approximatif tandis qu’il indique très bien la position des yeux dans
sa description du Limule » Oculi utrinque solitarii, ad basin spinae lateralis prioris”
Cette description fut supprimée par gmelin dans la treizième édition du Systema naturae.
C’est vers le même temps que parut une nouvelle figure d’un Limule dans le
troisième volume du Thésaurus de seba. Cette figure, très médiocre au reste, paraît
être faite d’après une troisième espèce, différente de celle de clusius et de de l a e t ,
mais plus semblable à celle des Moluques qu’à celle de l’Amérique (2).
Peu de temps après, gronovius donna une nouvelle description assez exacte du
Limule, dont il fit un genre séparé qu’il nomma Xiphosura. Cette description, faite
d’après un individu sec, ne contient rien sur les appendices natatoires et branchifères
du second bouclier (3). Une description faite par le Professeur beckmann fit connaître
ensuite plus exactement la conformation des pieds (4), tandis qu’une autre description
dont spengler est l’auteur donna une indication plus précise et plus claire de la position
des deux yeux latéraux (5). Personne que je sache n’avait encore observé d’autres
yeux que ces deux grands yeux latéraux. A nd r é fut le premier qui en ait remarqué
encore deux autres plus petits et situés plus en avant sur la même pièce antérieure
du test. Il les compara aux yeux lisses des insectes et décrivit la structure
zième et la treizième ; mais il n’y a que la première, la seconde, la sixième, la huitième, la dixième et la douzième
qui sont des éditions originales ; la première est imprimée à Leide, les cinq autres à Stockholm. La septième et la
neuvième, imprimée l’une à Leipsic, l’autre à Leide, sont des réimpressions de la sixième. Le Limule n’y est pas.
(1) Voici cette description toute entière. Testa anterior lunaris, obtusa, marginata, convexa, dorso spinis
septem : harum 3 longitudinales, 2 utrinque laterales. Oculi utrinque solitarii, ad basin spinae lateralis prioris.
Posterior testa angustior, serraturis utrinque sex ; postice acute bifida, armata spinis 7 : quarum 3 longitudinales
, 2 e prima serratura majore, 2 e dentibus emarginaturae. Acnlei mobiles, subulati in singula
serratura laterali solitarii. Cauda r ostrat a , mobilis, r ig id a , triquetra, dorso scabra, longitudine totius,
Pedes sex paribus : horum 5 priores chela didactyla ; ultimum par apice digitis 4 lanceolatis et pollice longiore
setaceo didactylo, praeter femoris lobum ad basin lanceolatum, obtusum. Postica subtus tegunt fo lia 6 imbri-
cata. G. a linité Systema Naturae ed. xn. Holmiae 1766. I . p. 1057. On peut comparer avec cette description
celle que linnaeus avait donnée dans le Museum Ludovicae Ulricae. Holmiae 1764 8° p. 460.
(2) a. seba locupletissimi rerum naturalium Thesauri Descriptio Tom. III. Amstelodami 1761 fol. Tab. XVII.
fo l. I.
(3) L. F. gronovii Zoophylacium. L. B. 3 fasc. folio. 1765— 1781. p. 220.
(4) Der Naturforscher. V I Stück, Halle 1775. S« 35—40.
(5) Einige neue Bemerkungen über die Molukkische Krabbe von lor. spengler. Beschäftigungen der Berlinische
Gesellschaft naturforsc/iender Freunde. II. Berlin 1776. S. 446—450.
des grands yeux latéraux (l). Si linnaeus avait connu ces yeux lisses qui sont fort
rapprochés, il aurait été mieux fondé à rapporter le Limule à son genre Monoculus,
dont le caractère oculi approximaii ne convient nullement aux yeux latéraux
et séparés par une grande distance de notre Crustacé, ainsi que nous l’avons déjà
fait observer.
Le célèbre naturaliste o. f . müller réunit ensuite dans un même genre qu’il nom-
m$ Limulus, YApus cancriformis, YApus productus, le Binoculus hemisphaericus de
Geoffroy (2) et le Monoculus Polyphemus de linnaeus (3). Ce nom étant depuis admis
par la plupart des naturalistes et réservé pour les espèces que linnaeus confondait
sous son Monoculus Polyphemus, nous nous en sommes déjà servis plus d’une
fois. Au reste on ne peut s’étonner que les caractères génériques d’un groupe
réunissant des animaux si dissemblables ne soient pas bien précis. Yoici ces caractères:
Antennae 2 vel nullae. Pedes numéro in car iis varii. Oculi 2 dorsales.
Testa univalvis. De ces caractères il n’y a que les deux derniers qui soient
positifs, et comme les observations d’andré avaient fait connaître quatre yeux chez
le Monoculus Polyphemus de linnaeus, il ne restait que la désignation du test uni-
valve, qui est un caractère peu propre à faire connaître le genre qui nous occupe.
M uller substitua le nom de Limulus gigas à celui de Monoculus Polyphemus de
linnaeus, et ne soupçonna pas plus que l’illustre fondateur de l’histoire naturelle
descriptive, que plus d’une espèce était confondue sous ce nom. Il fut le premier
à parler des pieds terminés par un seul doigt chez les mâles, quoiqu’il y ait quelque
incertitude dans ce qu’il dit sur ce point.
Le nom de Limulus, proposé par ilul l er , fut adopté par le grand entomologiste
fab ricius. Le Professeur de Kiel lui donna pour caractères : Quatre palpes de chaque
côté, dont les trois dernières en pinces. Mandibules en pinces. Point d'antennes.
On voit par là qu’il nomme palpes ce que d’autres appellent pattes, mais il ne fait
aucune mention des dernières pattes, celles qui ont des appendices foliacés, ce qui a
fait penser à latr e il l e qu’il avait observé un individu mutilé. Au reste il parle de
deux espèces, Limulus Polyphemus et Limulus Cyclops, mais il ne les caractérise
pas d’une manière assez claire, pour y pouvoir rapporter avec précision les individus
que nous avons observés (4).
Parmi les auteurs de notre siècle lamarck donna le nom de Limules aux Crustacés
nommés communément Apus, en substituant le nom de Polyphemus à celui de Limulus
pour le Monoculus Polyphemus de linnaeus. Il indiqua l’espèce des Moluques
(1) À microscopic Description o f the Eyes o f the Monoculus Polyphemus Z , By Mr. william andré Surgeon ;
Philosophical Transactions fo r J782. Part. II. London 1783. p. 440— 444.
• (2) Histoire abrégée des Insectes qui se trouvent aux environs de Paris. Paris 1762. in 4® II p. 6 6 0 , 661.
PI. 21. fol. 3. [Ce crustacé n’a point été retrouvé; et geoffrot paraît être le seul qui l’ait vu , mais on a reçu, il
y a quelques années au Muséum d’Histoire Naturelle de Paris, un crustacé semblable de Madagascar, dont latreille a
formé un nouveau genre qu’il a nommé Prosopistoma. — Nouvelles Annales du Muséum II. Paris 1833. p. 23— 34.]
(3) 0. F. muller Entomostraca. Lipsiae et Hauniae 1785 4°. p. 124— 126. Je m’étonne que huller observe
à la fin de la description dé son Limulus gigas : » clusii, qui primus hoc insectum J603 descripsit et opprime de-
lineavit, Entomologorum nemo meminit. ” Clusius est cité par plusieurs auteurs qui ont dévancé muller.
(4) J. c. Fabhicii Entomologia Systematica. Hafniae. 1793. 8°. p. 487, 488, Supplémenta Entomologiae
Systematise. Hafniae 1798. 8°, p, 3 7 1 ,3 7 2 . Latrbille rapporta l’espèce d’Amérique au Limulus Cyclops Fabr.