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quelque iiicertiliidc sur les esjièces qui les réuuissent, à plus forte
raisou l'aveuir de ces ileruières esf-il couipromis lorsqu'elles ne
reposent que sur un petit nombre de semblables caractères. El
cependant, non-seulement une foule d'espèces n'ont d'autres raisons
d'être riae des fondements aussi fragiles', mais encore bien
I. Je ne puis nnlureliement p;is avoir l'inlentioii de développer ici
ce sujet, el de ciler aucune preuve ¡i fappui de mes assenions, d'autant
plus que je me propose de trailer un jour cette question dans un
ouvrage spécial pour lequel je recueille depiiis longtemps des matériaux,
et en vue duquel j'ai toujours attaché une grande importance à observer,
dans les contrées de l'Orienl, les modifications imprimées par les causes
locales à celles de nos espèces européennes les plus vulgaires que j'ai été
à même d'y rencontrer, l'our le moment, je me bornei'ai à citer les exemples
suivants des caractères vacillants et douteux sur lesquels reposent [)lusieurs
do nos distinctions spécifiques, génériques et même ordinales. Le
RHINAXTIUS CRISTA GALLI L. a été séparé par Hhrli. en deux espèces,
savoir : R. MAJOR et R. MINOR, admises comme telles parBenUi dans DC.
Prdr. et par le plus grand nombre des botanistes. Mais comme il n'y a
absolument aucune différence entre ces deux espèces que leur taille,
celte distinction n'est pas plus fondée que celle que l'on ferait en zoologie
entre les animaux aussi semblables que possible, mais qui diflféreraient
uniquement par leui' stature, ce qui ferait presque de chaque espèce de
mammifères une centaine d'espèces nouvelles. Or. l'exemple que fournissent
les deux prétendues espèces de Khinanthus n'est pas le seul, car plus
d ' u n e espèce ne repose part icul ièrement que sur dei^ distinctions de dimensions
de la totalité ou d'une partie de ses organes, comme il y a des
espèces fondees uniquement sur la nature plus ou moins foliacée, "ou plus
ou moins glabre ou velue de ses organes. Le genre PULSATILLA détaché
du genre .^némoxe 1:»C. et admis comme tel par plusieurs auteurs, ne se
distingue parliculièrement des espèces de r.4némoDe proprement dite que
par les divisions plus ou moins profondes ou plus ou moins variées de
l'involucre et de ses folioles. Or j'ai vu plusieurs Pulsatilla qui, sous ce
rapport, se rapprochent tellement de l'Anémone que toute distinction
cesse presque complètement. Le nombre des sépales et des pétales est
quelquefois très-variable dans les individus de la même espèce, et cependant
Dillenius a converti le Ranunculus flcaria L. en un genre FICARIA
admis par De Candolle, et qui ne se distingue du genre ii.VNUNCuLus
que parce que celui-ci a 5 sépales et 5-tO pétales, tandis que dans le
genre FICARIA le calice a .3 sépales et 9 pétales. Cependant De Candolle
l u i - m ê m e observe que souvent les Ficaria ont 3 sépales et 8-12 pétales;
dès lors où placera-t-on la limite entre ces deux genres? Le genre Fu-
MANA, créé par Spach aux dépens de la sect. Vit du HKLIANTUE.MUM
Tourn. DC. ne dilfère du genre HELIAXTUEMLM ()ue par des caractères
dont la valeur n'est pas plus grande que celle des caractères qui disÎ
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des genres et même des ordres entiers ne possèdent pour toute
garantie d'existence qu'un très-petit nombre de caractères dont
l'oblitéralion ou même la modilication stiflirait pour faire crouler
l'échafaudage tout etitier.
Depuis que la doctrine de ia stérilité des hybrides a reçu des
atteintes mortelles dont elle ne se relèvera jamais, la botanique
tinguent plu.sieurs espèces les unes des autres. Onns l'énorme famille
des"COMPOSÉES, les caractères génériques sont principalement^ empruntés
à la monogamie ou hétérogamie des capitules, à la forme et à la disposition
de l'involucre, du réceptacle, des akènes, du |rappus et de la
corolle. Quand tous ces caractères sont mis à contribution, le genre auquel
cet ensemble sert de base est parfù'ement solide. Mais il y a beaucoup
d e iienres qui ne sont, fondés principalement que sur quelques-uns de ces
caractères et nommément sur ceux d'entre eux dont la valeur |ihysiolugique
el la stabilité sous l'influence des agents locaux sont le moins constatées,
tels que la nature, la forme et la di,sposilion de l'involucre ou du
pappus', la position plus ou moins verticale ou plus ou moins oblique des
akènes, leur villosité ou leur glabrisme, etc., et alors lej5 nuances intermed
i a i r e s e n t r e des genres ainsi constitués deviennent fréquemment insaisissables.
C'est ce'qui se rencontreïréquemment, entre autres, dans la longue
série de genres fondés aux dépens du genre CKXTAUREA de Linné. Le
rioute et l'inoertitude qui se rattachent aux distinctions spécifiques et
génériques remontent quelquefois même jusqu'aux distinctions ordinales.
Ainsi les JASMINÉES diffèrent des OLÉACÉES particulièrement par la présence
de l'albumine dans les semences de l'une, et par sa rareté, mais non
par son absence complète dans celles de l 'autre famille, en sorte que quelques
espèces des .lasminées qui ont un peu d'albumine ne se distinguent plus
des OLÉACÉES que par la quantité de cette substance, ainsi que par dos
sépales à dentelures plus ou moins nombreuses. Le nombre des étamines,
soit libres, soit disposées en faisceau, est le caractère principal sur lequel
repose la difference entre les CÉL.ASTRINÉES et les HII'I>OCR.ATÉACÉES. Les
ONAGRARIÉES ne diffèrent des JIYRTACÉES que par des feuilles non ponctuées
et par le nombre des étamines. Or, ce dernier caractère ne peut
guère avoir une importance ordinale et descend tout au plus au rang d'un
caractère gènerique. puisque très-souvent deux genres ne se distinguent
l ' un de l'autre que par le nombre des étamines ( par exemple le genre
Azaléa à l'égard du genre Rhododendron ), et que dans les espèces d'un
même genre les premières n'offrent pas toujours le môme nombre d'étamines.
Les PARONVCHIÉES ne diffèrent principalement des CARYOPHYLLÉES
qu'en ce que ces dernières ont les pétales et les étamines le plus souvent
périgynes, tandis que ies PAEONYCIUÉES ne les ont périgynes que trèfraremenl.
En un mot, il ne serait pas difficile de multiplier les exemples
qui prouvent combien les caractères sur lesquels reposent plusieurs de nos
ordres pèchent par leur solidité ou leur importance.