commencera fa r paffer de (Tus pendant quelques mo-
mens avec une plume fans encre. Cette occupation eft
utile ; elle fait que la main s’accoutume aux différens
coutours, & que tous les effets de la plume qui les com-
pofcntj le gravent dans l’efprit ou dans la mémoire. Je
ne confeille pourtant pas d’embraflèr tous ces exercices
à la fois ; ce feroit en confondant les uns avec les autres,
fàcrifier plus de tems qu’il ne faut pour y parvenir. On
ne paffera à la féconde ligne que quand on fçaura exécuter
la première un peu librement & régulièrement,
& ainfi des autres, parce que les premières étant plus
aifees, elles conduisent naturellement aux Suivantes, qui
font plus difficiles. Il eft parmi les artiftes une vérité
confiante, que l’on ne doit pas ignorer; c’cft qu’on ne
parvient aux grandes difficultés qu’après l’exercice des
plus petites. Pour donner une plus forte idée de ces exercices
, je vais dire un mot fur chacun.
Sur le premier exercice.
■ Il roule entièrement fur la ligne droite, qui eft la plus
facile à tracer. Tou t ce qui le compofè, font des pleins
defeendans & montans, qui fe font les premiers en
pliant les doigts Sc les autres en les allongeant. Il eft encore
néceflaire d’obfèrver que le courbe qui fè trouve
dans le bas des jambages fe produit en arrondifTant par
l’aétion du pouce qui met la plume infenfiblement fur
fon angle pour former une liaifon en remontant Sc en
loulagcant. Le mouvement fîmple des doigts e ft le fèul
fuffifànt pour la formation de cet exercice.
Sur le fécond.
■ Il préfente des parties courbes tant defeendantes que
montantes, & qui s’exécutent par le modvement naturel
des doigts, pliant 6c allongeant.
Sur le troifeme.
Il eft établi fur des lignes mixtes defeendantes Sc montantes,
& liées les unes aux autres fans changer la p lu me
de fîtuation. Il faut pour la pratique de cet exercice,
plus d’aétion dans les doigts & plus de légéreté dans l’appui
de l’avant-bras fur la table.
Sur le quatrième.
Il offre des lignes mixtes & autres effets de plume
liées de pié en tête , qui fè font fur la deu'xieme fîtua-
tion Sc de l’aétionfîmple des doigts. A l’égard des grandes
queues qui font fèmées dans cet exercice, & qui n’ont
aucune mefùre, elles fe jettent du bras, la plume placée
fur la troifieme fîtuation. Lorfqu’il fè trouve plufîeurs
têtes de lettres de fuite, la féconde l’emporte fur la première
tant en largeur qu’en hauteur , & ainfî des autres
s’il s’en trouve. C ’eft la même chofè pour les piés, le
fécond l’emporte par la longueur ou la largeur fur le
premier.
Sur le cinquième.
Il fait voir des parties montantes ôc defeendantes qui
fe forment par une aétion aifee-des doigts. Le mérite de
cet exercice eft de donner à l’avant-bras l’habitude de
monter & de defeendre facilement ; c’ eft pour cela qu’il
ne doit pofer que fuperficiellemcnt fur la table.
Sur le Jîxieme.
- Il expofé des parties defeendantes Sc montantes. Son
ufàge eft le même qu’à l’exercice précédent.
Sur le feptieme.
Il eft fondé totalement fur la troilîeme fîtuation qui
produit des pleins en-deffus Sc en-deffous. Il faut fe rendre
familier cet exercice , qui fè fait de l’action très-
aifee des doigts, l’avant-bras coulant plus vite fur la
table.
Sur le huitième.
Il a pour fondement des cercles ou des ovales joints
enfémble. C ’eft précifément ce que l’on appelle dans la
Géométrie des épicyles. Ils font commencés fur la direction
de gauche à d roite, Sc continués fur celle de droite
à gauche pour finir par une ligne ondée, qui commençant
à la lettre A , va fè terminer vers B. Tout ce que
renferme cet exercice fè fait par l’aétion fîmple Sc libre
des doigts, l’avant-bra? coulant fur la table.
Sur le neuvième.
Ce dernier eft la récapitulation de tous les précédcns ;
il contient en raccourci tous les effets de la plume, dont
prefque tous les autres font compofés. On ne fçauroit
trop recommander l’ufàge de ces exercices, d’autant
qu’ils donnent à la main les avantages de monter, de
defeendre, d’aller à droite , de revenir à la gauche, la
plume ne pofànt toujours que fur l’extrémité de fon canon.
C ’eft par la grande pratique de ces différens mou-
vemens que la main s’affure peu à peu des effets de la
plume. Quoique ces exercices foient donnés fur la ligne
perpendiculaire, on peut auffi les former fur l’oblique
de droite à gauche. Le maître ne j^gut pas fixer à celui
qui apprend, le tems qu’il doit s’occuper de ces exercices,
cela dépend de fa difpofîtion; une main dure ou
roidc, Sc où la fléxion-neffe'fait qu’avec peine, doit y
travailler plus long-tems & les former d’une grandeur
plus confidérable, en s’attachant à foutenir les pleins revers
, tant dans les parties droites que dans les courbes.
Sur les mouvemens.
Tout ce qui compofè l’écriture eft produit par deux
mouvemens : celui des doigts 8c celui du bras.
Le mouvement des doigts qui fèrt pour les lettres
mineures comme pour les majeures qui fè font plus v îte ,
n’a que deux effets : la fléxion pour defeendre en tout
fens, Sc l’extenfion pour remonter de même.
Le mouvement du b ras, fi néceflaire pour les lettres
capitales Sc les traits, a quatre effets. Il s’allonge pour
monter ; il s’écarte pour aller à droite ; il fè rapproche
du corps pour la gauche, & il fè plie au coude pour
defeendre. Ces quatre effets font plus ou moins étendus
fuivant la grandeur des figures que l’on veut exécuter.
Plufîeurs auteurs ont admis le mouvement du poignet
, lequel n’a point été adopté par les plus grands
maîtres. Le poignet n’a point d’effet primitif; il n’agit
que fort peu, & quand il eft forcé d’obéir au mouvement
des doigts.
P L A N C H E I X .
Des alphabets des lettres rondes.
Si l’Encyclopédie rend compte des alphabets de toutes
les langues du monde, à plus forte raifon doit-elle
donner ceux qui font en pratique dans le pays où cet ouvrage
a pris naiflànce. Ce n’eft pas aflèz d’en préfenter
les Amples figures , il faut encore en démontrer quelques
principes. Mais je n’en dirai que ce qui eft le plus
néceflaire, les bornes que je me fuis preferites ne me permettent
pas de trop m’étendre. J’ai fait connoître au
mot écriture, que trois différens caraéteres étoient en
ufàge parmi les François ; fon caraétere diftinétif eft celui
par où je commencerai ; on l’appelle communément
écriture ronde. Il fè partage, ainfî que les deux autres ,
en mineûr Sc majeur. Le mineur comme le plus petit,
parce qu’il ne comprend qu’un corps, excepté les lettres
à têtes & à queues, eft celui dont on fè fèrt pour une
fuite d’ouvrage. Le majeur eft plus grand; on l’emploie
toujours pour le commencement des phrafes, des noms
propres & d e toutes les chofès qui fubfiftent réellement.
Du Mineur.
L ’alphabet mineur mefiiré que la neuvième planche
offre aux yeux, eft compofè des caraéteres ufités de l’écriture
ronde. Ces caraéteres, qui fè font de l’aétion fîmple
des doigts, ont chacun des proportions particulières
, fur lefquelles je ne parlerai qu’en général. Les lignes
horifontales A B renferment le caraétere proprement
mineur ; on fait que ce caraétere en ronde eft établi fur
quatre becs de plume. Toutes les têtes paflàntes au-de£
fus de ce corps mineur, ont un corps Sc un bec de plume
; c’cft ce que rendent fènfible les points forts tracés
à la droite de toutes les lettres. Il faut pourtant excepter
de cette réglé le D , l’S , le T & le Z , qui ne paflènt que
d’un demi-corps , Sc encore les têtes de l’È Sc de l’S
brife, qui ne furmontent que d’un bec de plume. Voilà
en peu de mots pour les têtes ; voyons ce qui regarde
les queues. Toutes les queues paflàntes au-deffbus du
corps mineur, ont un corps Sc demi; ce qui eft exprimé
par les points forts. On exceptera de cette loi commune
les dernieres parties courbes de l’H Sc de l’N finale qui
n’ont qu’un corps. C ’eft à préfènt de la largeur des unes
& des autres dont il faut parler. La largeur des têtes n’eft
que d’un corps ; ce qui fè manifefte par les lignes perpendiculaires
tirées à la gauche & à la droite de ces têtes,
qui peuvent quelquefois être plus larges; mais cette
licence n’appartient qu’à un habile écrivain, qui fàit fùi-
vant les circonftanccs, fè mettre au-defliis des réglés.
L a largeur des queues eft plus ou moins confidérable ;
les unes ont un corps, les autres un corps Sc demi ; ceux-
ci deux corps & demi, Sc ceux-là trois corps Sc demi.
A l’extrémité de beaucoup de Ces queues , il fè trouve
un bouton qui doit tenir au plein revers, Sc n’avoir d’é-
levation que. deux becs de plume , ainfî que les trois
points forts qui font à côté le font connoître. Toutes ces
differentes proportions font rendues clairement dans
l ’alphabet par les lignes perpendiculaires dont j’ai déjà
parlé ; lefquelles lignes marquent en même tems la largeur
du corps mineur, Sc prouvent que la ronde eft
droite par fà nature. Il eft encore d’autres lignes qui font
obliques , & tirées au-deffus & au-deflous de chaque
lettre , pour faire fèntir que la fîtuation de la plume l’eft
auffi. O n diftinguera aifement les caraéteres qui dérivent
de la ligne droite , Sc fur-tout ceux qui proviennent de
la courbe. Pour une plus grande utilité, j’ai crû néccf-
faire la diftinétion des lettres initiales, médiales Sc finales.
Les initiales marquées du chiffre i . ne conviennent
qu’au commencement des mots ; les médiales annoncées
par z. ne font propres qu’au milieu ; enfin les finales
marquées par j . ne fè placent qu’à la fin. Cet éclairciflè-
ment, tout utile qu’il e ft, n’inftruit pas aflèz. Il y a des
lettres qui fervent aux trois objets à la fois ; elles feront
défîgnécs par les nombres i . î . Sc j . Il en eft d’autres
qui ne font qu’initiales Sc médiales, les chiffres i. Sc i .
les marqueront ; enfin il s’en trouve qui ne font que Amplement
finales ; on les trouvera cottés du n om b re j. Ces
explications étoient importantes, car rien ne gâte plus
un mot & ne bleflè tant le coup d’oeil, qu’une lettre mal
placée, fur-tout dans un titre qui eft ordinairement en
gros caraéteres. Il refte encore à dire que l’Y g rec, le Z
& la tête de l’R final fè font fur la troifieme fîtuation ;
que l’L final, l’S brife & le T final, fe finiflènt en mettant
la plume fur la premiers. A l’égard de l’exécution
des lettres mineures, on s’attachera à les examiner avec
fo in, Sc à faire des lignes entières de chacune, toujours
en fe conformant aux principes démontrés aux planches
précédentes, & à ce qui eft expliqué plus particulièrement
fur ce fujet au commencement de chaque lettre de
ce Dictionnaire.
Du majeur.
Les lettres majeures font ainfî appellées parce qu’elles
ont trois corps mineurs, Sc qu’elles fè placent toujours
les premières. Elles fè font d’une aétion libre des doigts,
l’avant-bras coulant avec plus de vîtefle fur la table;
Quelquefois Ces lettres fe jettent du bras, mais il n’appartient
qu’à une main adroite, à un maître, de les juf-
tement approprier à la grandeur des corps d’écriture.
Cette grande jufteflè, que les connoiflèurs admirent, eft
le fruit d’un travail long & appliqué. L’alphabet majeur
fe trouve à la planche neuvième, mefuré Sc enfermé
dans les quatre lignes horifontales A B. Il faut pourtant
excepter de la mefùre ordinaire de trois corps mineurs
la lettre M , qui ne polfede que deux corps & un bec
de plume ; l’A & l’X , qui n’ont que deux corps, ainfî
que les têtes de l’Y grec Sc du Z. A l’égard des queues,
elles ne paflènt en-deffous que de deux corps feulement,
& quelquefois moins, étant libre de les diminuer lorf-
que l’on prévoit quelles peuvent caufer de la confufîon.
O n ne parlera point de la largeur de toutes ces lettres ;
les lignes perpendiculaires tirées fur chacune exprimeront
là quantité de corps qu’elles ont ; lequel corps de
largeur eft conforme à celui de hauteur. O n obfèrvera
que tous les caraéteres marqués par une étoile fè font de
la troifieme fîtuation ; que les dernieres parties de l’N
& de l’V fè font du bras, ainfî que les queues de l’Y grec
8c des Z Z . Je dirai encore que toutes les majeures fè travaillent
dans un corps d’écriture avec la plume qui a formé
cemême corps d’écriture, & que l’on ne fàuroit
trop s’appliquer à l’imitation de ces lettres, dont la jufteflè
8c la beauté contribuent autant à la perfection de
l’écriture qu’à fon agrément.
De l'alphabet lié.
L’exercice de l’alphabet lié eft trcs-utile. On doit y
travailler beaucoup après la forme particulière de chaque
lettre Sc avant de paffer aux mots. Comme il eft
U R E S. 7
mefiiré, il fèra facile avec un peu d’attention d’en remarquer
les principes Sc de les exécuter.
Sur le toucher de la plume.
U faut diftinguer deux fortes de toucher ; celui qui
vient de la nature & celui que l’art communique.
Celui de la nature l’emporte ; c’eft lui qui donne la
maniéré de rendre les chofès dans ce précieux qui paroît
également dans les parties frappées Sc non frappées. On
peut être un habile maître Sc ne pas pofleder ce tréfor.
La nature ne diftribue pas à tous ces dons.
Celui de l’art ne donne pas la même délicateflè ; il
s’acquiert par l’exercice , par la légèreté de la main, Sc
par la façon de tailler Sc de tenir la plume plus ou moins
fèrréc dans les doigts.
Ce que l’on doit rechercher en général dans le toucher
, c’eft ce tendre, ce moelleux, que l’on eftime dans
l’écriture, Sc non cette fermeté Sc ce lourd que les caraéteres
gravés préfèntent, qui eft par confequent moins
eftimable.
P L A N C H E X.
Des alphabets des lettres bâtardes.
Apres l’écriture ronde vient naturellement celle que
l’on appelle italienne, Sc communément bâtarde. Elle
fè diftingue auffi en mineur 8c majeur ; le mineur fèrt
pour une fuite d’ouvrage, & le majeur pour les noms
propres 8c pour les.premières lettres des mots qui commencent
les phrafès. Toutes les lettres qui compofènt
les alphabets de cette écriture ont une fîmplicité agréable
, qui auroit dû engager toutes les natjons à n’adopter
que ce fèul caraétere. Il eft le plus aiféà lire, 8c c’eft
la raifon fàns doute , pourquoi il eft le mieux reçû à la
C ou r, & employé pouf les manuferits que l ’on Yeutcon-
fèrver.
Du mineur.
La dixième planche expofè tous les caraéteres mineurs
mefùrés de l’écriture bâtarde. Ils fè font tous de l’aétion
fîmple des doigts , pliant & allongeant, & font tous
aflùjettis a des proportions dont je ne dirai que le plus
important. Les lignes horifontales A B renferment toutes
les lettres mineures : on à dû voir par la planche fèp-
tieme & par fès explications, que le corps de ce caractère
en bâtarde eft établi fur fept becs de plume de haur
teur, cinq de largeur & trois de pente. Toutes les têtes
qui paflènt au-deflùsde ce corps mineur ont un corps de
hauteur, qui eft de fèpt becs, Sc un bec de plus au delà.
Les points forts tracés à la droite de ce s lettres, annoncent
ce principe. On exceptera de cette loi générale le
D courbe, qui n’a qu’un corps, & le T qui ne poflède
qu’un demi-corps. C ’eft tout ce qui concerne la hauteur
des têtes : voyons h longueur des queues. Les queues
qui paflènt au-deflous du corps mineur ont un corps &
demi, ce que les points forts feront remarquer ; cette rc-
gre eft fans exception. Voilà pour la hauteur des têfes 8c
la longueur des queues ; il s'agit maintenant de parler de
la largeur des unes & des autres. Comme les têtes né
font point courbes, il n’y en a que deux , qui font la
grande Sc la petite F , qui n’ont chacune qu’un corps de
largeur qui eft de cinq becs ; ce corps eft exprimé par
des lignes obliques tirées à la gauche & à la droite de ces
têtes. La largeur des queues n’eft point la même partout
; les unes ont un corps, les autres un corps Sc demi ;
il en-eft encore qui ont deux corps & demi. Toutes ces
différences font rendues fènfîbles par les lignes obliques
dont j’ai déjà parlé, lefquelles étant tirées,deflùs, font
connoître que le corps de largeur eft moins grand que
celui de hauteur, & que cette écriture eft penchée. Les
boutons qui terminent les queues ne doivent avoir d’é-
levationque deux becs de plume ; ce que les troispoints
forts marqués à côté font fèntir. Les lignes obliques tirées
au-deflùs & au-deflous de chaque caraétere font
connoître que la fîtuation de la plume eft auffi oblique.
Avec un peu d’attention on diftinguera bien vîte les lettres
qui proviennent de la ligne droite , de même que
celles qui dérivent de la courbe. Diftinguons à préfènt
les lettres initiales, médiales Sc finales. On fiiit la même
méthode qu’à la planche précédente. Les initiales font
marquées par le chiffre i ; les médiales par le nombre z ,
Sc les finales par le nombre 3. Celles qui fervent aux trojs