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rjunntité en Egypte, où ils sont dans l'état de domesticité, sous le
nom de Barbary. Leur fidélité et la douceur de leur caractère leur
méritent une préférence marquée.De temps à autre, ils vont revoir
leurs pe'nates; par conséquent, ils sont à ce dernier pays , ce que les
Savoyards sont à la France.
Les Barabras tirent de l 'Egypte des toiles de lin et des toiles de
coton, quelques sclials grossiers de la Mecque, du sel en assez grande
quantité , un peu de café, quelques épiceries et de la verroterie. Ils
achètent ces objets avec des dattes sècbes, de la gomme arabique ,
quelques ouvrages en feuilles de dattier, parmi lesquels les plus
recbercbes sont des coutfes , qui ferment d'une manière solide et
ingénieuse.
Les objets qui leur rapportent le plus et dont la nature fait tous
les frais , sont le bon sénéet l'arguel. Ces deux espèces, dont on faisait
alors la récolte, sont particulières à cette contrée, oil elles viennent
spontanément entre le Nil et la mer rouge parmi le sénébelledy.
Les causes de la fertilité de la valle'e des Barabras ont aussi une
gande influence sur le séné et les autres végétaux qui croissent dans
les ravins et les collines qui l'environnent; mais la beauté des productions
végétales de toute espèce diminue fi mesure qu'elles sont
plus éloignées du fleuve.
Il résulte de ce qui vient d'être dit, que le bon séné et l'arguel no
sont pas plus cultivés que le séné-belledy. Ils viennent spontanément
par groupes dans les collines et les ravins, oi;i chaque particulier a
le droit de les couper dans l'arrondissement de son canton. On en
fait deux récoltes, dont l'abondance dépend de la durée des pluies
qui ont lieu périodiquement chaque année.
L a première et la plus abondante de ces récoltes se fait à l'issue
des pluies qui commencent au solstice d'été , et se terminent à la fin
d'août ou au commencement de septembre.La seconde a l ieu, comme
je l'ai appris, en avril ; mais elle est beaucoup moins abondante que
la première. Quelquefois même elle est presque nulle, à raison du
peu de pluies qui ne tombent que par intervalles le reste de l'année.
L a préparation de ces espèces est bien peu dispendieuse, car elle
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D A N S LA HAUT E EGYPTE. 17
se réduit à les couper et à les exposer au soleil, sur les rochers, j usqu'à
parfaite dessiccation. Il fait si chaud dans ces contrées, que souvent
un seul jour suffit pour compléter cette dessiccation, ce dont j'ai été
témoin, m'étant trouvé sur les lieux au moment de la première récolte
, époque où je pris les espèces séparées que j'ai l'honneur de
présenter à l'Institut. Leur quantité est assez considérable pour
qu'elle puisse faire constater par une commission les vertus médicales
de chacune en particulier. Cela me paraît d'autant plus
important, que peut-être jamais on n'a été à même d'avoir ces espèces
sans aucun mélange; et c'est une vérité que l'on rencontre parmi
le séné vendu chez les droguistes, des feuilles de bagnandier et de
buis.
D e la vallée des Barabras, on conduit, à dos de chameau, jusqu'à
Sienne on à Darao, le séné et l'arguel, après en avoir ûiit, au moyen
des feuilles de dattier, des petits ballots d'environ un quintal, qu'on
vend trois cents à trois cents quarante parais chaque (onze à douze
francs de notre monnaie). Ils sont ensuite portés à la ferme générale
du Caire, qui les achète onze et douze pataquès (trente à trentetrois
francs ) , et qui les revend, année commune, trente à trente-trois
pataquès le quintal (environ cent-six francs de notre monnaie) aux
•commissionnaires de l'Europe.
J e venais de trouver conformes à la vérité tous les renseignemens
qu'on m'avait donnés sur le séné et l'arguel. Les mêmes personnes
voulurent bien m'informer du produit {extraction faite des
tiges) des doux coupes qu'on fait chaque année. Il varie depuis sept
cents quintaux jusqu'à onze cents au plus, dont le tiers est communément
d'arguel.
Si cette quantité est exacte, les marchands d'Egypte ne peuvent
satisfaire entièrement aux demandes de l 'Europe, qne par une grande
falsification; car elles sont, d'après l 'aveu même du paltier, toujours
de quatorze à quinze cents quintaux, et jamais moins de douze. Il
leur faut donc, pour compléter toutes ces demandes, mélanger trois
à quatre cents quintaux de l'espèce de séné, dite saumge, avec
celle apportée de Nubie. Cette falsification ne se pratique point au
Caire, car il ne croît dans les environs que quelques pieds de séné-
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