GRAVURE EN LETTRES, EN GEOGRAPHIE ET EN MUSIQUE.
C o n t e n a n t d e u x P l a n c h e s .
P L A N C H E Ie" .
Gravure en lettres.
ON commence d’abord par tamponner la planche ,
c’eft - à - dire qu’après avoir répandu une goûte
d’huile deflus , onia frotte d’un bout à l’autre avec un^
tampon fait d’un morceau de vieux chapeau, afin de
détruire le brillant que lui donne fon bruni (a), apres
quoi on fixe, au moyen du compas & de la réglé, le
nombre des points d’où l’on doit tracer légèrement des
lignes parallèles, foit avec une pointe, (oit avec un outil
de ce nom, dans l’intérieur defquelles lignes eft
comprife la hauteur des caraétcres que l’on veut graver.
Cette préparation faite, la planche pofée fur un couf-
finet, on delïine par un fimple trait de pointe pour les
déliés, & par un double trait pour les pleins, les lettres
que l’on a intention de faire, en commençant par la
droite de la planche, au rebours de l’écriture •, & telles
que l'offre la première ligne de chaque exemple de la
planche. Enfuite on ébauche avec une échoppe proportionnée
tous les pleins de ces lettres deflinées, ainfi
qu’on le voit dans la féconde ligne de chacun de ces
mêmes exemples ; ce qui fe fait à deuxreprifos, c’eft-à-
dire d abord en coupant les pleins de bas en haut, 8c
enfuite en rentrant de haut en bas , en retournant la
planche ; après quoi on liaifbnne la lettre de meme par
le bas 8c par le haut ; ce qui s’opère avec le burin, en
reprenant délicatement le fimple trait du defTein qu'a
tracé la pointe, en le conduifânt au commencement de
l’ébauche, en y rentrant à plufîeurs fois, afin de former
la gradation 8c la dégradation des pleins dont la
figure eft plus ou moins arrondie, & cela fànspaffer
au-delà des parallèles, ce qui eft très-important pour
la régularité ; c’eft ce qu’offre la troifieme ligne de
chaque exemple. Cela fait, on fe fert d’un ébarboir
pour enlever les barbes qu’on a laiffécs en coupant le
cuivre, l’échoppe & le burin; alors on talonne au burin
à deux fois, c’eft-à-dirë du haut 8c enfuite du bas ,
toutes les lettres qui ont befoin d’être talonnées. Pour
cet effet, on fait rentrer le burin dans le trait de chaque
parallèle, à la terminaifon des lettres à tête, à jambage
ou à queue, afin d’en juftifier nettement la coupe, &
lui donner l’obliquité que rend naturellement le trait
de la plume dans l’écriture, voye% à la fin des exemples
les fig. 4. Le tout fini, l’on ebarbe encore l’ouvrage,
pour lui donner fon dernier point de perteéfion.
Cette maniéré de toucher la lettre à fèpt reprifes,
n’eft pas généralement employée par la plupart des ar-
tiftes en ce genre, qui font dans la malheureufê nécef-
fité d’accélérer un ouvrage qui a fou-vent pour but plus
l’intérêt de l’entrepreneur, que la perfection & la gloire
de l’artifte qui y travaille ; mais nous croyons devoir
donner la préférence à cette maniéré fur toute autre,
attendu qu’elle eft celle du fameux Bailleul, dont la
mémoire fera toujours chere aux éleves qu’il a laiffés
après lui.
Nous n’entrerons pas ici dans un plus grand détail
fur les différentes formes des lettres ; le précis qu’ offre
cette Planche, fuffit pour donner une idée du refte. Les
curieux auront recours pour plus ample fàtisfàCtion à
cet égard, à l’article Ecriture , & aux Planches. On
n’a inféré dans le bas de cette Planche que quelques ef-
fais de différentes lettres majufcules rondes, bâtardes,
capitales penchées, romaines, coulées, &c. afin de fer-
vir de guide ou de modèle dans l’occafion, & même
(a) Cette opération n’a lieu que par rapport aux planches
de cuivre qui fortenc toutes brunies des mains du cuivrier;
à l’égard des planches d'étain, elles ne font lufceptibles d’aucune
préparation, vu qu’elles fortent toutes brunies & polies
des mains du potier d'étain«
encore quelques capitales d’ornement qu’on appelle h
deux traits \ d’autres grifès ou hachées; d’autres qu’on,
appelle piquetées j d’autres fleuronnees, &c. qui fe font
toutes au burin, 5c dont la forme dépend plus du goûc
de l’artifte, du Iieu'bù il les emploie, que des réglés.
Les réglés rigoureufes de l’art fè réduilent à cellcs-cr.' •
Que toutes les lettres capitales ou majufèulês droites
ou penchées, ainfi que les majeures bâtardes, doivent
être toujours doubles en hauteur des caradteres inférieurs,
8c que leurs pleins fbient aufft proportionnés à
leur hauteur, c’eft-à-dire qu’ils foient doubles de ceux
de ces mêmes caradteres inférieurs, comme en lafig. ç.
du bas de la Planche.
Il faut éviter d’allier les capitales ou majufcules droi*-
tes ou penchées, à la bâtarde, & les majeures bâtardes
a la romaine, ô'c. 8c conferver toujours une analogie
exaéte entre les genres des caradteres que l’on emploie.
Des outils.
A. Parallèle à vis, laquelle fert à tracer des parallèles
de toutes efpeces, que l’on pourroit appelier parallel9
mobile. B & C autre efpece de parallèles fervant au
même ufage, mais dont les pointes fontfixes. D. échop-,
pe vue de toute fà longueur, e , fon manche./', fâ face.
Quant à cet outil, il a été dit ci-defTus qu’il devoit être
proportionné au corps ou plein de la lettre qu’on veut
graver. C’eft ce qui a engage à faire voir ici en g 8c en
h deux faces différentes de ces outils fîmplement, au-
delfous defquels font repréfontées leurs coupes ou tailles;
& comme ces tailles produifènt dans leurs cavités
une forface plane comme en z, où le noir d’impreffion
ne pourroit tenir, fur-tout lorfqu’il s’agit de forts caradteres
; il eft nécefTaire que le burin dont la face eft
en k , rentre à plufîeurs tailles dans les pleins, afin d’y
faire griffer le noir ; c’eft ce qu’offre la fig. b , démonfi
tration un peu outrée à la vérité, mais qui n’eft ainfi ,
que pour la rendre plus fenfible./imc/e de Madame De-
lusse,
La fig. 1. eft un poinçon appelle pojîtionnaire. Les
Graveurs en Géographie s’en fervent quelquefois pour
frapper toutes les pofitions qui fe trouvent fur les cartes.
La fig. 1. eft l’empreinte de ce poinçon. La fig.
eft un autre poinçon pour frapper les villes archiépif-
copales. Les fig. 4. f . 6. 7.8. p. & 10. font d’autres empreintes
de poinçons. Toutes ces figures appartiennent
à la Planche fuivante, où l’on verra qu’il vaut mieux
graver tous les lieux que ces poinçons défignent, que
de les frapper.
P L A N C H E I I .
Gravure en Géographie, Topographie , & en Mufique„
Le haut de cette Planche offre trois modèles de gravure
dans les genres de Géographie & de Topographie.
Fig. A. Exemple de gravure dans le genre purement géographique.
C’eft de cette maniéré qu’on a toujours
repréfenté, 8c que l’on repréfente encore les cartes
particulières des provinces, même les royaumes,
8c différentes parties de la terre.
B. Exemple dans le genre fèmi - topographique. Les
blancs de ce modèle qui expriment la campagne ,
fe trouvent remplis dans la fig. C. par les pièces de
terres labourées, les portions de bruyères, de prés,
de marais, vignes, Ô’C. 8c fo trouvent variés félon
les habitations 8c la fertilité du pays. On trouve
auffi dans cette fig. B des portions de bois, bruyères
, prés, vignes, même les plans de quelques
châteaux 8c parcs confidérables ; mais ce n’eft toutefois
que les plus, grandes mafles, ce genre ne
permettant pas d’entrer dans les plus petits détails.