
■ N E R U E D E DE S IMA .
Pesiraa est une ile artificielle élevée dans la rade de Nagasaki aux portes de cette ville. Elle a la forme d'un éventail dont le coté supérieur s'avance
dans la baie, tandis que j e manche se rattache à la ville par un pont en pierre de taille. Sa longueur est d'un peu plus de 20 0 métrés sur une
ni près égale. La rue dont le dessin ci joint donne un aperçu contient les maisons des employés Hollandais ainsi que quelques magasins. Ces maisons
le style Japonnais modifié sur les habitudes Européennes, sont badigeonnées de différentes couleurs, ce qui leur donne un aspect assez riant. Sans offrir
iuel nons sommes habitués en Europe, elles sont commodes et saines. On y est parfaitement à l’abri de l’humidité dans la mauvaise saison et malgré
du soleil-d’été, la chaleur-y est fort supportable grâces aux solides et épaisses toitures Japonnaises, hermétiquement closes. Les chambres sont tapissées
en papier peint de fabrique indigène, et d’épaisses nattés de jonc d’une finesse et d'une élasticité qui ne laisse rien à envier aux meilleurs tapis d'Europe en recouvrent le
plancher. Ces nattés sont d'un usage général au Japon et servent également au Sjogoun (l'Empereur temporel) comme au plus humble de ses sujets.
La rue où nous sommes traverse l’île dans toute sa longueur et aboutit d'un coté à la porte d’eau l ) de l'autre au jardin botanique. D'habitude celte rue est déserte, mais
durant le séjour annuel de nos vaisseaux marchands dans la rade, il y régne une'grande activité, qu'augmente encore, lors de notre arrivée au Japon, la présence des états-
majors des deux vapeurs-de guerre le Gëdeh et le Soembing *), A cette heure Desima semble se réveiller dé son long sommeil. De nombreux coulis ou portefaix déchargent
les ballots de marchandises en poussant leur cri monotone que nous entendons résonner toute la journée dans le port, et qui parait un accompagnement obligé de tout exercice
violent. Puis quand la cargaison des navires est déchargée et expédiée vient lé tour des marchands Japonnais, et les magasins de la ferme sont bientôt encombrés de caisses,
remplies de porcelaines, de laques et de bronzes dont les nombreux échantillons étalés jusque dans la rue la métamorphosent complètement en bazar, bazar plus riche en réalité
que brillant par le luxe de son étalage, car le négociant de Nagasaki ne se donne pas la peine de mettre beaucoup de coquetterie dans l'exhibition de sa marchandise. II assiste
d'un air placide et indifférent, en apparence du moins, aux choix du fermier, tout en fumant sa petite pipe Japonaise.
A l'autre bout de la rue le collège des interprètes manie activement le pinceau, en s’occupant à traduire la volumineuse correspondance du Chef de la factorerie avec le
gouvernement Japonnais. Quand ces messieurs se rencontrent dans la rue ils se saluent aussi cérémonieusement que lès grands seigneurs de la cour de noms xrv et ces salamalecs
qmusans se répètent assez fréquemment, car de nombreux messages nous arrivent de la part des gouverneurs de Nagasaki. En ce moment la position du chef de la factorerie
n’est plus une sinécure. Depuis 6 heures du malin j ’usqu’au coucher du soleil c'est un va et vient continuel.
Le personnel hollandais de la factorerie se compose du chef et de trois ou quatre employés, ainsi que d’un médecin. Ce dernier a joui de tout tems d’une grande popularité
au Japon, et a des consultations presque journalières avec les médecins et les lettrés du pays.
Quant à la police et à la douane de l’île une garde Japonnaise. composée de 4 à 5 hommes commandés par un Banjosi (grade militaire qui répond à celui de commandant
et dont l’importance varie d’après l’étendue de son commandement) surveille chacune des deux portes de Desima. Ces gardes se montent à l’ouverture des portes peu après le
lever du soleil et se retirent au soleil couchant après les avoir closes. Alors un Ottona (échevin) et quelques veilleurs de nuit sauvegardent le repos de la factorerie.
Actuellement l’entrée du Coté de la mer est entièrement libre. La communication avec la ville n’est surveillée que pour autant qu’il s’agit d'empécher la contrebande, pour
laquelle la populace Japonnaise se sent une grande prédilection.