don avec M. de Mirbel dans les recherches les plus délicates de la physiologie
végétale. Nous avons donc entrepris de concert cet ouvrage, auquel je veux
consacrer désormais tous mes loisirs.
La région où nous allons puiser comprend toute l’Asie Mineure, l’Arménie,
la Géorgie, jusqu’aux cimes de la chaîne du Caucase, une partie de la Perse,
jusqu’aux grands déserts salés et à la frontière du Beloutchistan ; enfin, Mas-
cate et l’Arabie Pétrée, jusqu a l’isthme de Suez: n’y sont pas compris le Hedjas
et l’Yémen, qui doivent faire l’objet d’une publication particulière déjà commencée
par M, Decaisne.
De tout temps, l’attrait irrésistible de l’Europe vers l’Orient, dont l’histoire
et la politique rendent témoignage, s’est fait sentir sur les botanistes voyageurs.
L’énumération qui suit donnera une idee de ce qu ils ont fait et dès ressources
qu’ils nous ont préparées: les Français y ont la plus belle part, et ce motif a été
un de ceux qui m’ont le plus affermi dans mon entreprise. Il m’a semblé qu’en
m’attachant à une branche des connaissances humaines où les Français ont
excellé, c’était encore contribuer, dans la limite de mes moyens,à 1 honneur de
mon pays.
C’est un Français, Pierre Belon, natif du Mans, qui ouvre cette belle série,
vers l’an i 546.
De 1573 à 1575, Rauwolf, d’Augsbourg, explore la Palestine, la Syrie, la Mésopotamie;
sa narration est de i 583; le catalogue systématique de ses plantes n’est
publié qu’en 17 55, à Leyde, par Gronovius.
En 1615 , Bachelier rapporte en France le marronnier dinde, à son retour du
Levant.
Notre immortel Tournefort, un des grands réformateurs de la botanique, le
modèle accompli des voyageurs, parcourt, en 1700, par les ordres de Louis X IV,
la Géorgie, l’Arménie et le nord de l’Asie Mineure.
Sherard, consul d’Angleterre à Smyrne en 1702, y séjourne longtemps, et fait
plusieurs courses dans les provinces voisines.
En 1728, Buxbaum publie le résultat de ses voyages en Arménie et plusieurs
autres contrées du Levant.
En 1738, paraît l’ouvrage de Shaw, botaniste et antiquaire.
Guilandin est à peu près de la même époque.
En 1749; Hasselquist, disciple de Linné, étudie les environs de Smyrne, la
Palestine et la Syrie.
Vers 1761, Forskal, compagnon de Niebuhr en Arabie, touche à Constantinople
et à Smyrne.
PREFACE.
Sestini, en 1779, décrit une partie de l’ancienne Bithynie et la péninsule de
Cyzique; en 178], 1782 et 1787, il voit presque toute la Turquie, et s’avance
jusqu’à Bassora.
En 1784, Michaux qui, plus tard, devait rapporter en France les matériaux
de la Flore de l’Amérique septentrionale, se rend à Alep, sous les auspices de
Lemonnier, et parcourt plusieurs provinces de la Turquie et de la Perse, y compris
le Ghilan.
Sibthorp, en 1786,1787 et 1794, fait deux fois l’herborisation du mont Olympe,
suit le littoral de l’Asie Mineure, s’arrête dans les îles, et notamment en Chypre.
Labillardière, en 1787, fait une tournée en Syrie.
En 1792 , Olivier et Bruguière.sont envoyés en Turquie et en Perse, avec une
mission scientifique, par le conseil exécutif provisoire, où siégeaient Monge et
Rolland : ils y restent six ans.
Dans ces derniers temps, où l’amour des sciences naturelles se répand de plus
en plus,Dumont d’Urville, Bélanger, Botta, Bové, Dubois, Ravergie, Coquebert
de Montbret (1), et surtout Aucher Éloy, tous Français, Webb, Rüppel, Schim-
per, Fleischer, Rotschy, Ehrenberg, explorent dans tous les sens notre région,
et accumulent dans les herbiers les plantes de l’Orient. L’expédition du colonel
Chesney sur l’Euphrate et le Tigre, destinée à ouvrir au commerce anglais de
nouvelles routes, n’a pas été non plus sans profit pour la botanique.
Pour la seule contrée caucasienne, les Allemands et les Russes, marchant à la
suite dés expéditions militaires, rendent, depuis vingt ans, des services inappréciables
à la botanique : il me suffira de citer pour le moment Bieberstein,
Szovits, C. A. Meyer, Hohenacker. On peut voir une notice de ces travaux, ainsi
que de ceux qui appartiennent au dernier siècle, dans 1 Essai de M. Trautvetter,
intitulé : Grundriss einer Geschichte der Botamk in Bezug uuf Russland, extrait
des mémoires de l’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg.
Alors que nous posions, pour ainsi dire, les bases d une flore de 1 Asie occidentale,
il était indispensable de joindre à nos Illustrationes une carte géographique
de cette région, retraçant les principaux itinéraires des voyageurs botanistes
: je les ai relevés moi-même, avec le plus grand soin, sur tous les documents
que j’ai pu me procurer : celui de Michaux est extrait de la collection inédite des
autographes de botanistes, qui fait partie de la galerie de M. Benjamin Deles-
sert. Ces voyages m’ont fourni, des renseignements précieux, non-seulement
sur les localités mentionnées dans les herbiers et sur les stations des plantes, mais
(1) M. Webb,-qui possède les plantes de Coquebert de Montbret, a eu la complaisance de les
mettre à notre disposition.