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grands arbres, dominant la rade et servant de demi- ceinture à la ville blanche. Pondichéry est une ville française enchâssée dans les splendeurs éblouissantes des tropiques ; c’est une bonbonnière nuancée du vert de ses ombrages et paraissant flotter dans les vapeurs transparentes de l’Orient. La ville, divisée en ville blanche et en ville noire, peut avoir une lieue d étendue et renfermer 70,000 habitants divisés en Européens, en métis ou Topas et en Indiens. Il n y a pas de port; mais la rade, quoique rade ouverte, est assez commode, et l’on peut mouiller près du rivage sous la protection des batteries, dont on ne peut aujourd hui évoquex que le souvenir, mais dont la reconstruction aura ceitai— nement lieu un jour. Pondichéry a eu de la puissance, de la grandeur, un nom fameux; c’était la reine du Carnatique ! En 1704, elle avait une petite citadelle, et, plus tard, elle avait des remparts; détruite de fond en comble en 1761 par la sauvagerie brutale des Anglais, elle fut réédifiée par la France en 1770 et années suivantes. Enfin elle fut l’objet du traité de 1783, dont les stipulations rigoureuses et jalouses ne sauraient subsister. Ici je veux me délivrer d’un poids qui me pèse. Oui! mon coeur est oppressé, mais le courage de dire la vérité le soulagera peut-être ! Quelque douleur que j’en aie, je constaterai l’excessive puissance des Anglais dans l’Inde; mais, au préalable, je veux dire un mot sur nos glorieux débuts dans ce pays, sur notre ancienne situation, sur nos malheurs ! Le fait accompli viendra plus tard. Depuis longtemps les Anglais disputaient les Indes aux Hollandais ; enfin les guerres constantes des Anglais et des Français, de 1744 à 1763, firent assez pressentir de plus grands dissentiments pour l’avenir. Je ne les retracerai pas. En indiquant quelle auréole de gloire a couvert nos armes et quelle confiance nous avons su les premiers inspirer aux Indiens, c’est asse7 dire que ce qui a été possible l’est encore. Nous avons traversé des circonstances malheureuses parce qu’il y a eu des fautes, mais ces fautes pourraient être désormais évitées. Les noms de Dumas et de la Bourdonnais sont inséparables de l’histoire de nos efforts dans l’Inde. Ceux des de Bussy et des Du- pleix ne peuvent être non plus oubliés. Et ce que j oublierai encore moins, c’est que nous devrions aujourd’hui avoir la prépondérance dans ce beau pays, qui n’a pas connu de plus hauts faits que les nôtres, ni d’amitié plus loyale ! Nous avions tous les éléments de réussite et nous avons échoué ! C’est ainsi que nous sommes souvent à la merci de circonstances tout a fait secondaires. Assez valeureux pour triompher des destins contraires et des plus redoutables rivaux, deux choses nous manquent cependant : d’abord nous n’avons pas, à un degré suffisant, l’esprit de nationalité! Les jalousies et les divisions ne devraient pas cependant prévaloir contre ce sentiment, qui est la vertu du citoyen. D’autre part, notre nature active et notre caractère héroïque n’admettent pas l’insuccès ; au premier échec, le découragement nous saisit, et, par cela même, l’ensemble des grandes


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