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marche, il entonne d’un ton nasillard et plaintif une légende dont il chante chaque verset, d’abord seul ; l’équipage chante ensuite en choeur le répons. C’est ainsi qu’ils abordent la barre : les chants cessent. Trois énormes sillons d’écume se présentent entre vous et la grève ; il faut les traverser. Le danger est réel. Après avoir basculé sur la cime du premier sillon, votre schellingue, couverte d’écume, roule entre deux sillons très-rapprochés ; alors, si elle est prise par le flanc, vous êtes tous perdus! C’est un moment solennel pour le pilote; il s’agite, crie, se démène; il gourmande ou ranime les rameurs et tient toujours sa schellingue bout àlame ; il triomphe enfin et va échouer sur le sable ; chaque maquois saute dans la mer ; les uns vous emportent sur leurs épaules et les autres assèchent le bateau. Maintenant que le danger est passé, rendons-nous un compte exact du passage d’une barre, réputée mauvaise ; j’en ai affronté deux, qui m’ont spécialement laissé des souvenirs parfaitement stéréotypés dans ma mémoire. Voici ce que c’est qu’une pareille barre : Deux énormes crêtes blanchissantes se heurtent, se contrarient par le contre-coup et forment une troisième lame de remous; puis, les trois amoncelées se tordent en mugissant et roulent violemment poussées vers la plage où elles s’affalent : là, elles bouillonnent en se confondant et jettent sur la grève avec des débris, de l’écume et du sable, leur grondement sauvage et leur râlement lugubre. C’est tout simplement effrayant. Sur tous les points des côtes Coromandel, Orixa, Malabar et Concan, on trouve à trafiquer. On y achète (au Coromandel et à Orixa) de grandes quantités de peaux de buffles, de tigres, de panthères, beaucoup de bois ou cornes d élan, des sésames (graine oléagineuse). Il se fait un commerce très- étendu de toiles en général : ce sont les douttis, grosses toiles éerues; les toiles bleues, dites guinées^m s’expédient pour 1 Arabie, 1 Abyssinie et les cotes d A— frique, particulièrement la Guinée; les toiles de Cam- baie, à carreaux bleus et blancs et dans lesquelles on mêle aussi de l’or ; les toiles excessivement fines de Casnodia et de Barokia-, les mousselines terminées par une raie d’or et dont les Indiens font des turbans, les toiles peintes de toutes qualités et les cotonnades eh tous genres ; les gazes de toute espèce ; les étoffes de soie, les foulards, les paynes de toutes couleurs. Au Malabar et au Concan, vous trouvez des produits moins variés. Le Malabar est tout l’espace en deçà de l’Indus jusqu’au cap Comorin; on y comprend aussi les îles Maldives, amas d’une myriade d’îles, divisées en quinze groupe^. Sur cette côté on trouve beaucoup de vivres ; on trafique sur les poivres', le cardamome, la cannelle inférieure ; on achète du corail, de l’ambre gris, du bois de sandal ou santal ; le jaune est le plus abondant. L’arbre sandal est grand comme un noyer; il est à feuilles ovales ; son bois est plus blanc à la circonférence et plus jaune au coeur; son odeur aromatique est telle, qu’avec la poussière de ce bois on compose une pâte qui sert pour la toilette ; l’on en fait


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