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arbres de haute futaie eux-mêmes portent de grandes et belles fleurs. Les légumes abondent, les fruits sont en très-grande quantité, et quelques-uns possèdent une saveur exquise. Je citerai la mangue, qui tient tout à la fois de l’abricot et de la pêche; Yatte ou pomme cannelle, qui peut remplacer la plus fine crème à la vanille; le letchi, qui vaut le raisin muscat ; la banane, si recherchée par quelques personnes, bien qu’elle me fasse l’effet d’une pommade sucrée ; la goyave, dont le goût légèrement acidulé excite l’appétit ; la pamplemousse rafraîchissante, espèce d’orange grosse comme un melon ; Y ananas, si délicieux et si commun dans l’Inde, qu’il y est donné à un bon marché fabuleux, et tant »d’autres douceurs de la vie tropicale! L’Inde est encore le pays de la volaille de toute espèce, du gibier de marais, des poissons d’eau douce et des poissons de mer; les côtes sont excessivement poissonneuses, et une caste très-nombreuse, celle des Maquois vit de la pêche et de son produit, qu’ils portent aux navires à travers les vagues et assis sur un catimarón; le catimarón est un assemblage de quatre petites poutres superposées, deux parallèlement et deux perpendiculairement. Le maquois, armé de sa pagaie, s’élance sur les cimes blanchissantes de l’océan Indien ; vous le trouvez partout et presque en tout temps. La vie, dans l’Inde, est un rêve pour l’Européen nouvellement arrivé, et, certes, il y a du beau dans ce rêve ! Cependant, au bout de quelque temps, quand vous êtes remis de cette fascination première, quand l’attrait de la science elle-même cède aux instincts naturels et fait place au sentiment, vos pensées s’envolent vers la patrie absente, vos soupirs deviennent plus fréquents, et enfin vous ne songez plus qu au sol natal. Oui, cela est exact ! On n’aspire qu’au moment de quitter ce pays si beau, où la vie est si facile, où il y a tant à apprendre, où, en définitive, 1 on a été parfaitement accueilli ! Mais peut-on empêcher le coeur d’un Français de battre pour son pays ! Je viens de parler des côtes où le maquois fait de si fructueuses récoltes; mais.les hommes de cette caste rendent des services bien plus importants, et, comme il n’entre pas dans mon cadre de décrire' les côtes pour le seul mérite du poisson qu elles fournissent, je veux revenir au littoral indien pour signaler les dangers réels que présentent les barres qu on y rencontre à peu près partout. Vous faut-il débarquer sur un point du rivage? c’est alors qu’il faut avoir recours aux maquois ; car il faudra franchir la barre. Ne vous y exposez pas dans des embarcations ordinaires; elles seraient broyées. Aux barres des mers de l’Inde il faut opposer les schellingues. La schellingue est vouée à ce service; c’est une chaloupe composée de longues planches flexibles de palmier : ces planches sont liées ou cousues l’une sur l’autre par des cordes fabriquées avec les filaments qui enveloppent la noix de coco. Ces liens sont très- solides et résistent longtemps à l’action de l’eau. La schellingue est montée par treize ou dix-neuf maquois ; le pilote est toujours au gouvernail, et, une fois en


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