le transportèrent à Batavia où il réussit admirablement, et c’est de là qu’est venu le plant du caféier offert à Louis XIV en 1710 par le jardin botanique d’Amsterdam. Antoine de Jussieu parvint à son tour à le naturaliser à la Martinique, et c’est le plant de de Jussieu qui donna, dit-on, naissance à toutes les plantations de café des Indes occidentales. Cet arbre craint le froid ; il est susceptible de s’élever à 16 ou 17 pieds, mais on l’arrête à 4 ou 5 pieds pour l’étendre en buisson et faciliter la récolte. Ses feuilles sont aiguës comme celles du laurier; elles sont opposées; les fleurs, disposées en anneaux, rappellent celles du jasmin. Après la fleur apparaît une baie d’abord verte, puis rouge, de la grosseur de la cerise sauvage. Cette baie contient deux noyaux, convexes à l’extérieur, aplatis et sillonnés du côté par lequel ils se joignent. La matière qui compose ces noyaux est ligneuse ou cornée et pas osseuse. Rôtie et réduite en poudre, on sait quelle infusion elle produit. Hâtons-nous d’ajouter ceci : partisan de l’abolition, nous avons franchement condamné' l’esclavage, bien que nous sachions ce que l’émancipation a causé de perturbation dans les intérêts privés. Néanmoins, nous gardant de l’exagération des négrophiles, nous ne voulons pas faire du nègre un portrait flatté ; mais le mulâtre et surtout la mulâtresse méritent bien quelque attention à raison de l’adresse, de l’énergie et de la grâce dont ils sont souvent doués. Il arrive fréquemment que la mulâtresse réunisse, avec une puissante magie, tout le charme de la race blanche et toute la vivacité des désirs, toute l’impétueuse ardeur des sens de la race noire. Malgré la profusion de tant d’attraits et bravant ce qu’il y a d’irrésistible dans l’effet qu’ils produisent, la distinction du sang est tellement impérieuse dans les colonies, qu’un gentleman européen ne peut jamais épouser une demi-sang. Il m’a été dit que la perle des mulâtresses est morte de chagrin de n’avoir pu épouser un blanc pur. Adoréejusqu’à lafrénésie, elle aimait elle-même jusqu’à la fureur, etdixfoisellefut tentée de poignarder le fiancé de ses rêves pour l’empêcher d’appartenir à une autre femme. En présence d’une impossibilité absolue, d’un obstacle insurmontable, elle résolut, par désespoir, de mourir sous les yeux de celui qui n’était séparé d’elle que par un implacable préjugé. Elle rechercha avec avidité toutes les occasions de voir celui dont la vue le tuait, et chaque fois, par un redoublement de fièvre, par un délire affreux, elle escomptait des jours qui lui pesaient. Chaque entrevue était une torture, un pas vers la tombe ; elle en attendait cependant l’heure avec impatience, et elle y marchait alors, invinciblement attirée, se résignant par la prière et toujours avec la conscience du funèbre dénouement. Elle trouvait un âpre plaisir à défier la douleur, à en recevoir les coups en pleine poitrine; fibre à fibre elle anatomisait,pour ainsi dire, sa souffrance et faisait son diagnostic moral avec une sorte de cruauté froide. Il faut le reconnaître: ces duretés impitoyables du coeur
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