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gistrats de la Couronne et en magistrats de la Compagnie ; mais les uns et les autres ont des traitements fabuleux, qu’ils résident à Calcutta ou qu’ils soient envoyés dans les districts. Le service judiciaire anglais est si défectueux dans l’Inde, que je n’en veux rien dire, de peur d’en trop dire. On peut d’ailleurs sur ce point se reporter à ce qu’en dit le comte de Waren, qui n’a cependant pas dû connaître bien des inepties et des peccadilles, dissimulées sous l’ampleur des appointements. J’en ai déjà dit un mot dans un chapitre précédent, et, pour me résumer, qu’on me permette d’affirmer qu’on ne peut établir aucune comparaison entre les magistratures anglaise et française, heureusement pour nous. Toute la puissance anglaise, dans le Bengale, vient de sa témérité ; tout son prestige, elle le tire de son armée; tout l’éclat de son commerce, elle le doit à son génie pour les affaires. Si le prestige disparaît, la témérité sera de médiocre ressource; mais, quant à présent, elle jouit de tout le bénéfice d’un commerce très-étendu, et c’est avec orgueil qu’elle se complaît dans cette situation prospère. Voyez, en effet, se presser à Calcutta les nombreux navires qui s’alignent lentement sur les bords du Gange; ils viennent se reposer aux pieds de la grande ville, de la cité des palais, de la Babylone moderne, où les plus somptueux édifices touchent à la plus modeste payote, où l’ancien rajah déchu frôle de son palanquin la peau hàlée du vil paria, où l’industriel de contrebande, en quête de quelques fanons pour satisfaire aux exigences d’un appétit qui manque à tant de millionnaires, voit passer dans un somptueux équipage le riche négociant, las de vérifier dans son comptoir des liasses de bank- notes, et de rouler dans sa caisse des flots de roupies. Quelle grandeur ! Tous les produits du Bengale, fous les envois de la Chine s’entassent dans ce port. Aujourd’hui les points importants de l’extrême nord sont reliés à lui par des voies ferrées. Un chemin de fer l’unit à Bénarès. La ligne principale a 600 kilomètres au moins. Le trajet de Bénarès se fait en vingt-neuf heures. Plus loin, au nord-ouest et dans la présidence d’A- gra, est Delhi, grande et belle ville qu’on s’efforcera bien aussi de relier à quelque autre point important et fortifié, car Delhi est un peu isolé. Cette vaste cité, bâtie au xvi* siècle par Schah-Djihan, depuis qu’elle est tombée au pouvoir des Anglais en 1798, a été fortifiée avec des soins extrêmes. Les Anglais ont voulu en faire un rempart contre les tentatives de la Bussie, puissance si redoutée par l’Inde anglaise. Il est vrai que la mer Caspienne est bien voisine du Caboul et que le Caboul touche à la province de Delhi! Aussi n’est-il pas douteux que le Caboul et le Pundjab soient destinés à être le théâtre d’irruptions armées et de drames terribles. Que la mer Caspienne ait seulement un petit Sébas- topol, et nous verrons ce que deviendra la puissance anglaise dans le Bengale ! Du reste, rien n’est impossible de ce côté, et les Bouches du Volga peuvent de venir célèbres dans l’histoire.


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