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entrons dans notre champ de travail, soyez sûrs que nous désirons tous le faire dans l’esprit de notre Maître : esprit d’humilité et de renoncement. Je ne crois pas exagérer en disant que nous sommes prêts à tous les sacrifices qui nous attendent encore. Nous sommes unis et heureux. Pour être au Zambèze avec notre Maître, nous ne sommes pas encore des martyrs. 3o octobre. Je rouvre ma lettre pour vous donner nos « dernières nouvelles s. Nos ba- Souto sont partis avant-hier avec les gens qui retournent à Mangouato. Les Zambéziens qui sont mal à l’aise chez eux et qui, par quelques privilégiés comme Karoumba et Séjika, entendent dire que le monde ne finit pas précisément à la rivière ni même à Pandamatenga, sont dévorés du désir de sortir de leur coquille et de voir ce qui se passe au dehors. Il a fallu se montrer ferme, presque dur, pour empêcher une légion de jeunes gens de s adjoindre à notre petite caravane au même titre que les vampires. Mais je crains bien que bon nombre n’aient pris des sentiers de traverse pour atteindre les wagons plus loin. Le même jour arrivaient , une quinzaine de jeunes gens envoyés par les chefs de Séchéké pour nous chercher. Un nouveau roi est élu — Mama1 ; — une ambassade est en route pour Séchéké pour mander les chefs. Un messager l’a devancée pour qu’ils se préparent sans délai à aller rendre hommage au nouveau souverain. D’où les canots et cette tribu de rameurs qu’ils nous envoient. Malheureusement, c’est l’été, le temps s’est mis à la pluie ; nous avons de constants orages et passons rapidement par les températures les plus diverses. Le beau temps d’hiver est passé. Aller à la Vallée, faire ce long voyage de deux mois avec des alternatives de chaleur et de pluies, et dans des canots qui ont toujours des voies d’eau, ce n’est pas précisément attrayant. Mais si sa présence va avec nous et si la lumière de sa face nous éclaire, tout sera bien. Nous avons cru qu’il valait mieux ne pas exposer M. Jeanmairet à un voyage aussi pénible et à une fièvre inévitable, humainement parlant. J’irai donc tout seul avec Aaron, notre évangéliste. Nous pensons partir demain dimanche. Ce n’est pas la fièvre qui m effraie, dans ce voyage, ni les difficultés, mais la rapacité de ces pauvres Zambéziens, qui ne trouvent rien de plus naturel que de vous planter sur un îlot jusqu’à ce qu’ils vous aient extorqué force présents. Nous voulons nous tenir près du Sauveur et puiser en lui patience et amour. i. Connu plus tard sous le nom de Fatira. Léchoma, i®r décembre i884- A la dernière date, je congédiais nos conducteurs ba-Mangouato etba-Souto, et je me mettais une fois de plus, et un peu précipitamment, en route pour Séchéké. A l’heure qu’il est, selon toute apparence, je devais être à Léalouyi. Oui. C’était un de ces éclairs qui ont quelquefois traversé nos ténèbres. C’est aussi un échantillon des espérances et des mécomptes dont nous avons sans cesse été les jouets depuis notre arrivée ici. Il ne faut pas céder à la tentation de ne broyer que du noir. Nous ne nous sommes pas arrêtés dans les solitudes sylvestres de Léchoma pour y prendre racines. Ce n’est pour nous qu’un poste d’attente. Nous nous croirions sans doute mieux à notre place et bien plus utiles au delà de la rivière, en plein service actif, que d’être réduits au service passif de nous asseoir simplement sous notre kikajon à attendre ! Mais Dieu le veut ainsi. A Léchoma, les jours se succèdent et se ressemblent. L’activité qui règne parmi nous les fait seule passer assez rapidement, et brise la monotonie de notre vie. Nous avons plié nos tentes ; à leur place se sont élevées des cases simples, mais qui sont un confort que nous ne rêvions pas. Notre établissement de trois mois fait l’étonnement de tout le monde, et représente presque autant d’années de travail au Lessouto, où les matériaux de construction manquent. Chacun de nous a sa tâche. Middleton et Waddell se sont essayés à scier de long. M. Jeanmairet a mis bas l’habit et a commencé son apprentissage. Un si bon exemple a entraîné Aaron. Malheureusement, notre scie est trop mince et le châssis trop faible, et il a fallu que le pauvre Waddell se torturât le cerveau pour faire des planches d’un mètre avec une scie destinée à un tout autre objet. Peut-être un jour aurons-nous une belle scie circulaire que fera marcher la force des eaux du Zambèze. Quel rêve ! C’est qu’hélas ! faire des planches, c’est un cauchemar qui n’a jamais laissé de me hanter l’esprit depuis que nous parlons de la mission du Zambèze. L’école de ma nièce s’est aussi enrichie de quelques enfants ma-Saroa. Mais ce n’est pas sans peine que nous les y avons amenés. « Pensez un peu, nous disait la femme métisse d’un chasseur, cette petite fille-là (une esclave) veut toujours m’accompagner quand je vais entendre l’Evangile. Qu’est-ce qu’un mo-Saroa a à faire avec les choses de Dieu? Comme si Dieu s’inquiétait des ma-Saroa 1 » Ces pauvres enfants étaient tout ravis qu’on leur permît de venir à l’école. MUe Coillard eut bien d’abord un peu de peine à les amener à s’asseoir avec les autres et à se soumettre à la discipline, assez légère du reste, de la petite communauté. La première visite de tous les Zambéziens qui HAUT-ZAMBÈZE. l8


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