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souhaiter la bienvenue, et passer quelques instants avec lui. Il m’apportait de tristes nouvelles. D’abord, celle du désarmement des ba-Souto. Et les télégrammes sont venus les uns après les autres, depuis lors, nous causer les plus vives inquiétudes. Maintenant, paraît-il, l’excitation diminue, les ba- Souto ne se révolteront pas, Dieu soit béni ! Elle est d’autant plus criante, l’injustice dont ils sont victimes, et rien ne saurait l’atténuer, si ce n’est, comme ils disent eux-mêmes, les pauvres gens, qu’ils ont la peau noire. Et cependant, ajoutent-ils dans leurs prières, m c’est toi, Seigneur, qui nous as faits noirs ». C’est aussi au milieu de ces travaux incessants que le deuil est venu attrister nos coeurs. Nous apprîmes d’abord la mort de notre brave Azaël. C’était l’aîné de la bande. Converti tard dans la vie, par le ministère d’Eléazar Marathane, il était intellectuellement. moins développé que les autres. Mais quel beau caractère que le sien, si égal, si humble, si droit et si doux ! Il était une force dans nos conseils. Et puis c’est notre précieux ami, le major Malan, qui a succombé à une maladie qui pour nous est un mystère. Cette nouvelle nous a atterrés. Nous regardions tant à lui, trop peut-être. A côté d’un brave, on se sent fort. Sa vie est pour moi une illustration frappante de Phil. III, i 4- « Je fais une chose : oubliant les choses qui sont derrière moi, et me portant vers celles qui sont devant, je cours vers le but pour remporter le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus-Ghrist. » Il l’a remporté, ce prix ; dans son langage de soldat, il nous dirait sans doute, avec son accent habituel de joie et de triomphe, qu’il a été promu, et avec saint Paul : « J’ai combattu le bon combat, j ’ai achevé la course, j ’ai gardé la foi. » Il ne lui restait plus qu’à recevoir du Maître qu’il a tant aimé et si fidèlement servi, la couronne de vie. Et nous, laissés ainsi sur le champ de bataille et au milieu de la mêlée, allons-nous céder à la tristesse et au découragement ? Bénissons Dieu plutôt du privilège d’avoir connu un tel homme, d’avoir joui de son amitié, et de recueillir l’héritage qu’il nous laisse : l’exemple d’une vie consacrée et victorieuse 1 XIV Arrivée à Paris. — Rapport au Comité des Missions. — Tournées en France et à l’étranger. Lettre aux Eglises. Paris, i i mars 1880. Bénissez le Seigneur avec nous ; unissez-vous à nous pour reconnaître sa bonté 1 II nous a conduits et protégés ; il nous a amenés ici en santé et en paix. Nous pouvons chanter le psaume XXIII avec des coeurs débordant de reconnaissance. Nous sommes arrivés à Paris avant-hier soir. Après vingt-trois ans d'absence, nous ne pouvions pas croire que nous fussions de nouveau dans la capitale du monde, le centre de la civilisation moderne, et dans les bras de notre vénéré directeur. II nous semblait rêver. Le lendemain, nous allions à la vente des Missions. Je n’aurais pas voulu la manquer pour rien au monde; l’objet m’en est trop sympathique. Elle se fait pour l’éducation des enfants missionnaires. Nous n’avons pas d’enfants, nous, mais nous nous intéressons d’autant plus à ceux de notre petite colonie du Lessouto. L’avouerai-je ? Au milieu de tout ce monde qui se pressait dans la salle, nous éprouvâmes d abord un sentiment d isolement et de tristesse. Nous ne reconnaissions personne, et personne ne nous reconnaissait. Nous étions étrangers dans notre patrie !... Après tout, les figures seules avaient changé, les <t tentes terrestres » seules avaient vieilli. Aussi, du moment que notre présence se fut ébruitée, nous retrouvâmes-nous au milieu de connaissances et d’amis. Æ « Eh ! bonjour, monsieur Coillard ! est-ce bien vous? Que nous sommes heureux de vous revoir !» — Et quelques-uns ajoutaient à demi-voix : « Mais, je vous croyais plus grand !.... » Toujours la même expérience, vous le voyez : de loin les personnes comme les choses risquent de prendre des proportions démesurées. Fin mars 1880. Sous la date du 26 mars, je présentais au Comité des Missions un rapport sur notre expédition et sur nos projets de mission au Zambèze. J’y exposais


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