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l’avait conduit en canot et était là quand il mettait en terre ses graines d’arbres dans l’île au-dessus de Moasi oa thounya; tel autre était son cuisinier; celui-là son factotum. Les uns avaient fait avec lui le périlleux voyage de Loanda, les autres l’avaient accompagné du côté de Zanzibar. On admire en Europe le voyageur intrépide; il faut venir ici, où il a vécu, pour connaître et admirer Hhomme. Si des voyageurs ont gravé leurs noms sur les rochers et sur l’écorce des arbres, lui a gravé le sien dans le coeur même des populations païennes de l’intérieur de l’Afrique. Partout où Livingstone a passé, le nom de Morouti, missionnaire, est un passeport et une recommandation. L’avouerai-je? Je n’ai pas été peu humilié de me voir coiffé du bonnet de docteur par ces messieurs de Séchéké. Que je le veuille ou non, je suis Ngaka, docteur, le successeur de Livingstone. C’est ainsi qu’on chausse au premier missionnaire venu les bottes de ce géant. A Séchéké. — Déception. — Travaux d'évangélisation. ig L a prière et le chant. — Retour à Léchoma. Mort de Khosana. — Encore à Séchéké. — Un message du roi. — Maladie et mort d’Eléazar Marathane. — Un jalon glorieux. Léchoma, 20 septembre 1878. Un grand désappointement m’attendait à Séchéké. Dans l’entrevue officielle qui eut lieu, le lendemain de mon arrivée, pour traiter d’affaires, je découvris que le message du chef Khama, en passant par différentes bouches, avait été si dénaturé qu’il se réduisait à des salutations purement politiques, et qu’il n’y avait pas même été fait mention de notre expédition. Le chef suprême des ba-Rotsi ignorait complètement mon arrivée. Le présent que je lui avais envoyé n avait jamais été expédié. On alléguait pour cela une foule de raisons qu il ne m’était pas possible d’apprécier. Après six semaines d’attente, tout était donc à refaire : envoyer de nouveaux messagers au roi, annoncer mon arrivée, demander une entrevue, et lui transmettre mon présent de salutation. En vain plaidai-je pour qu’on me permît de suivre le messager à quelques jours de distance ; cela eût pu coûter la vie à quelques-uns des chefs, puisque c est contre la loi des ba-Rotsi. Il fallut donc y renoncer, et, après tout, accepter de bonne grâce les excuses et les protestations de bienveillance de mes hôtes. Us dépêchèrent immédiatement un messager dont le retour est attendu à la fin du mois. Pendant notre séjour à Séchéké, nous nous occupâmes naturellement de I évangélisation. Tous les jours, nous avions de nombreuses congrégations d hommes surtout, car les femmes se tenaient à distance ou se cachaient dans les cours voisines. Vous seriez étonnés de la difficulté qu’on éprouve à enseigner les rudiments de l’Évangile à des païens chez lesquels tout est encore à commencer. On comprenait parfaitement notre langage, mais ce que nous disions de Dieu, de sa grandeur, de son amour, les laissait tout ébahis. La prière leur paraissait un grand mystère et une épreuve redoutable. « Youale, » se disaient-ils les uns aux autres en s’agenouillant, « hoa chôma ! » Maintenant on va mourir ! — Quand on me demandait l’heure de la prière, on disait : « Ré thla choua néneng ! » Quand allons-nous mourir ? Si l’on comptait les jours de notre arrivée, on disait : « Nous sommes morts tant de fois! n Cette


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