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autorisation spéciale. Pour moi je n’eus aucune difficulté 1 Ma qualité de missionnaire, que Livingstone a si bien fait honorer, me servait de passeport. Le chef Mokoumba, homme d’une rare intelligence, me reçut avec beaucoup d é- qards. Toutefois, avant de consentir à me faire passer à Séchéké, dont le chef m’avait envoyé une pressante invitation, il fallut qu’il envoyât un mes- saqe spécial et obtînt une permission en règle. Il faut dire que Séchéké était le théâtre de troubles politiques, et qu’étant l’entrée même de la vallée des ba-Rotsi, l’approche en était interdite aux étrangers. Toutes les formalités étant enfin remplies, ce qui prit une semaine, étant assuré des bonnes dispositions du chef de Séchéké, Mokoumba lui-même nous y conduisit. Le trajet se fait ordinairement en un jour et demi en canot. Nous prîmes plus- de temps et passâmes un délicieux dimanche sur un îlot du Zambèze, La, le fleuve coule à travers un pays plat et dénudé; on n’aperçoit les bois que dans le lointain; les zèbres, les antilopes de toute espèce y foisonnent. C est a te point qu’à distance et au lever du soleil surtout, on les prendrait facilement pour une immense forêt. En approchant de Séchéké, plusieurs coups de fusil annoncèrent notre arrivée et amenèrent sur la berge une foule de curieux. Mokoumba était fier de ses canots qui fendaient l’eau comme des poissons. Chacun avait pour rameurs cinq et six vigoureux jeunes gens debout, un seul à la poupe et les autres à la proue, absolument comme le représentent les vieilles peintures éqyptiennes. — Séchéké est, par sa position, un des postes les plus importants du pays des ba-Rotsi. C’est la résidence de douze petits chefs, dont le principal, Morantsiane, a toutes les attributions et tous l e s pouvoirs d un vice-roi. Un de ces dignitaires vint nous recevoir et nous conduire au lèkho- thla' où, avec la plus grande solennité, on vint nous souhaiter la bienvenue. Les discours de part et d’autre, et l’étude minutieuse à laquelle ma pauvre personne était soumise, me parurent bien longs, d’autant plus que j étais fati- qué, et que je me trouvais assis sur un tambour qui s’obstinait a rouler sous moi. Pendant tout ce temps, et en notre honneur sans doute, des jeunes gens exécutaient, aux sons des tambours, des danses bruyantes et grotesques. A la fin, Morantsiane mit une hutte à ma disposition, où il ordonna qu on « préparât mon lit ». — A peine m’étais-je retiré que tous les .chefs, ceux memes. qui arrivaient de Naliélé* avec l’ivoire de leur souverain quils allaient vendre à Mparira, vinrent l’un après l’autre me faire visite. La glace était maintenant brisée, et nous nous sentions à l’aise comme avec de vieilles connaissances. Il faut dire que ce n’était pas difficile, car ces ba-Rotsi sont de vrais ba-Souto. i. Grande enceinte où se traitent les affaires, a. Naliélé est la capitale des ba-Rotsi. Tous leurs chefs ont été les serviteurs ou les esclaves de Sébétouane et de Sekélétou. G est chez ces potentats ma-Kololo, dont ils ne parlent qu’avec affection et avec le plus grand respect, qu’ils ont fait leur éducation et formé leur idéal de la dignité, des manières et du pouvoir d’un souverain. La tribu guerrière des ba-Rotsi, une fois soumise, était devenue la plus dévouée aux intérêts des ma-Kololo, et si Mpololo, le cousin et le successeur de Sékélétou et l’héritier de son pouvoir, ne s’était pas montré si capricieusement cruel, ils n’eussent jamais eu la pensée de se révolter. Mais quand ils eurent résolu de s’affranchir, ils ne reculèrent devant aucune atrocité. J’avais craint qu’on ne regardât avec soupçon nos évangélistes ba-Souto; mais non, au contraire. Les ba-Rotsi n’ont plus rien à craindre des ma-Kololo, dont ils ont exterminé toute la population mâle. En nous entendant raconter notre voyage, ils se contentèrent de remarquer: « Vous êtes de vrais ma-Kololo; aucune distance ne les effrayait. » On entoure nos gens et moi-même des plus grands égards. On nous apporte les présents d’usage de nourriture avec toute la délicatesse des ba-Souto. «: Cette cruche de bière n’est qu’un peu d’eau pour mouiller vos lèvres; cette corbeille de farine n’est qu’une miette de pain pour tromper la faim. » L’influence des ma-Kololo sur les tribus qu’ils avaient soumises a été extraordinaire; il serait intéressant de la comparer à celle de Mossélékatsi et de ses ma-Tébélé. Et maintenant encore, en entendant tout le monde autour de nous parler le sessouto, en retrouvant ici les mêmes moeurs, les mêmes manières, les mêmes vêtements, la même sociabilité, le même code de politesse officielle, de grands troupeaux de bétail, et abondance de lait, il faut vraiment un certain effort d’esprit pour se croire au Zambèze et non dans quelque quartier reculé et encore païen du Lessouto. - Si la porte de ce pays s’ouvre, et que les Églises du Lessouto y entrent courageusement, elles auront lieu d’admirer les voies de la Providence qui s est servie de Sébétouane et de ses bandes de ba-Souto pour préparer ces nombreuses tribus à être évangélisées par les ba-Souto chrétiens d’amour dhui Pourrions-nous passer légèrement sur ce fait que, depuis six jours de marche plus bas que les cataractes jusqu’à l’extrémité nord-ouest du pays des ba-Rotsi et jusqu’au lac Ngami, le sessouto est compris et parlé et est le moyen de communication entre ces diverses tribus dont chacune a cependant son dialecte particulier ? Ce qu’il y a aussi de très remarquable, c’est que les a" ¡H ü t0,UteS leUrS tnbuS vassales appartiennent à la grande famille des ma-Khalaka; leurs dialectes en font foi. Ce ne serait donc pas sans raison que le Seigneur nous a enlevés du milieu des ma-Khalaka de Nyanikoé pour nous conduire au pays des ba-Rotsi, chez des ma-Khalaka qui sont à demi ba-Souto. C est encore la Mission du bo-Nyaï sous un autre nom. ai retrouvé partout ici les traces et le souvenir de Livingstone. Un tel hau t -z am b è z e .


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