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Nous avons bien rencontré à Boulouwayo des gens qui viennent du Zam- bèze. Ils se sont réfugiés ici pour sauver leur vie, car chez eux, parait-il, le pays est souvent en révolution, et la vie humaine a peu de prix. Ce qui nous frappa en les rencontrant, c’est qu’ils parlent le sessouto comme flous Je savais bien, par Livingstone, que les ma-Kololo l’avaient introduit au Zambèze, mais ie ne réalisais pas le fait qu’il y est encore actuellement parlé. « Pourquoi n’allez-vous pas chez nous, disaient-ils, sauver la nation ? »... Mais le Zambèze, c’est loin !... . . . j_ I Autant que nous en pouvons maintenant juger, il ne nous reste que deux alternatives, ou bien retourner au Lessouto, ou chercher d’autres parages. Retourner au Lessouto ! la pensée seule nous semblerait une tentation de l’ennemi et une trahison. Notre campement n’est pas précisément joyeux, ces iours-ci, et personne ne songe à faire parade de courage. Mais je ne d'oute pas que quand nos chers compagnons de voyage seront revenus de ce coup terrible’ l’entrain, et même l’enthousiasme ne renaissent dans leurs coeurs. Leurs lettres aux Églises du Lessouto en font foi. Ils sentent, tout aussi bien oue nous, que retourner au Lessouto, dans les circonstances actuelles, serait désastreux pour la cause de leur mission. Que les Eglises du Lessouto, loin de céder au découragement, soient à la hauteur des circonstances. Je suis plein de courage et j ’ai bon espoir. Pour le moment, ce qui nous reste à faire, c’est de quitter le pays des ma- Tébélé et de nous rendre à Ghochong ; considérable recul, hélas ! vers le Lessouto. Là, nous mûrirons nos plans et attendrons les conseils et les directions qui nous viendront de nos frères. Nos évangélistes et tous les membres de l’expédition me chargent de transmettre leurs salutations aux Eglises de France « Nous ne sommes pas découragés, disent-ils, mais frères et soeurs, pères et mères, soutenez-nous !» Je me joins de tout coeur a eux dans ce " ‘i r n o u s éloignant de ces parages, je pense au retour de l’arche du pays des Philistins. Nos pensées et nos coeurs retournent constamment au pays des ba-Nyaï à Nyanikoé. Je me dis qu’un miracle n’est pas impossible, bien qu’il paraisse peu probable, et que le Seigneur peut encore ouvrir les portes de ce pays, qu’on nous a fermées. L’étincelle qui a jailli dans les ténèbres de cette malheureuse contrée peut un jour produire une grande lumière. Sans doute, pendant ce séjour de deux mois, nous avons peu fait ; cependant, j’en ai l’assurance, notre témoignage restera. On se souviendra longtemps de ces blancs et de ces noirs, aux vêtements étranges, avec leurs maisons roulantes et traînées par des boeufs. Oubliera-t-on la cloche qui appelait chaque jour à la prière ? Ne restera-t-il aucun souvenir de 1 histoire de la création, de la chute, de la rédemption, que nous avons essayé de faire comprendre aux ba-Nyaï, en bégayant leur langue ? Un de nos souvenirs de Nyanikoé, ce sont les moments où, entouré de ces pauvres gens, j ’essayais de fixer dans leur esprit, en la leur faisant répéter, cette parole qui est l’essence même de l’Evangile : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit én lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle ! » Que Dieu ait pitié et se souvienne des ba-Nyaï.


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