mes amis, mais en chrétiens aussi. Posez vos fusils. Mettez votre confiance en Dieu. Et souvenez-vous-en, ceux qui sont avec nous sont plus forts que ceux qui sont contre nous. » Ils se soumirent, de mauvaise grâce, c’est vrai. Mais j’en bénis Dieu, car le premier coup de fusil eût été le signal d’un massacre général. J’obtins de Masonda qü’il ramenât nos boeufs, mais, quand il vit que je faisais atteler, il nous ordonna de la manière la plus péremptoire de ne pas le faire. J’insistai de mon côté, et les boeufs furent attelés. Mais, pendant ce temps, la foule tumultueuse, conduite par un « voyant », un magicien, se ruait vers la voiture en poussant des cris forcenés, déterminée apparemment au pillage. « La nuit tombe, s’écriait-elle, vous êtes entre nos mains. Nous avons votre sang et vos biens. Nous allons voir si votre Dieu vous délivrera. » Je tremblais en pensant qu’un coup de hache pouvait faire sauter le couvercle de la caisse extérieure du wagon, où se trouvait notre provision de poudre. Me voyant reparaître soudainement, ma cravache à la main, ils se retirèrent à une petite distance, mais je crus un moment que je ne pourrais pas les contenir plus longtemps. Le soleil se couchait, et notre position devenait de moment en moment plus critique. Ma compagne, de son côté, faisait son oeuvre; elle avait réuni les femmes et les enfants des catéchistes pour assiéger, avec eux le trône de la grâce et puiser des forces et du calme dans la prière. Une fois les boeufs attelés, le cri trek ! usité pour les mettre en marche devait, pensions- nous, être le signal d’une grêle de flèches et de javelines. Mais non, il ne fit que provoquer les huées de cette multitude enragée et les boeufs en furent tellement excités qu’ils donnèrent un bon coup de collier et enlevèrent vigoureusement les wagons. Gela eut un effet magique sur les natifs. Ceux qui barraient le chemin reculèrent pour nous laisser passer, les autres ne nous poursuivirent pas. Mais, pendant que nous attelions, une troupe de ces gens avait emmené seize "dé nos boeufs. Tous mes efforts pour revoir le chef furent mutiles. C’est dans la forêt qu’il me mandait impérieusement pour « conférer avec moi ». Ne jugeant pas prudent de l’y suivre, à cette heure-là surtout, je lui envoyai à son tour ce message : « Sache que ces seize boeufs que tu m’as pris ne sont pas les miens; ils sont la propriété du Dieu que nous servons et qui nous a délivrés. Garde-toi de les tuer, soigne-les bien, un jour c’est toi qui me les rendras tous. » Mais que faire ? la nuit était là. Les indigènes ne se retiraient pas; tout autour de nous, c’étaient leurs feux. Nous pouvions les entendre commenter avec animation lés événements du jour. Et c’est alors que nous fut révélé le complot qui nous explique l’horreur de notre aventure de 1 avant-veille. Précipiter nos dames du haut du rocher que nous gravissions, puis tomber sur nous, nous massacrer tous pour piller nos biens, tel était leur dessein. « Et pourquoi, disaient-ils en claquant la langue, ne l’avons- nous pas fait? » Cependant, en considérant notre position avec calme, nous
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