Jacob Mochabécha, de Nalolo, et notre Willie ; bonne occasion donc pour des services d’appels. Ad. Jalla ouvrit le feu, un beau feu d’artifice : « Le sujet de joie. i Les autres suivirent, mais notre Boanergès de Paul, lui, lança des foudres. Il parla, cet homme, avec la puissance d’un inspiré, s’adressant tour à tour aux diverses classes de son auditoire : les reines, les esclaves, les chefs, le roi, tout le monde eut son compte. Pourquoi fallait-il que de si beaux, si puissants appels fussent accompagnés d’un geste malheureux, le plus malheureux imaginable ! En s’adressant à ses auditeurs, Paul les montrait du doigt. Passe encore pour la masse, mais quand il s’adressa directement au roi et le montra du doigt, il faillit y avoir une explosion. Nous n’en savions rien, nous ; nous ne nous en doutions même pas. Mais quand nous fûmes dehors, elle éclata sans réserve dans les différents groupes. N’importe où, l’index qu’un orateur emporté secoue à la figure des gens peut avoir sa raison d’être, mais est d’un goût douteux. Ici, et chez tous les noirs, c’est la plus grande provocation que l’on puisse ' adresser à quelqu’un et la plus grande insulte qu’on puisse lui faire. Seulement, le brave Paul croyait qu’à un prédicateur tout est permis, même cet infortuné geste, sans qu’on s’en offense. Il se trompait. Et pour comble, j ’avais osé installer des jeunes gens du choeur derrière le roi sur un banc que les chefs avaient accaparé et se disputaient toujours. Ils prétendaient qu’en se levant ils avaient effleuré l’habit de Sa Majesté. L’après- midi aucun des likomboa, aucun des chefs n’était là, pas même le roi au second service. Mauvais signe. Le lendemain de Noël, deux hommes vinrent, au nom des chefs, appeler les évangélistes et certains de nos garçons à comparaître au lé- khothla. Trop peu bien portant pour me traîner jusque-là, je dus forcément demander à M. Ad. Jalla d’y aller à ma place, insistant pour que le roi présidât lui-même le lékhothla, et espérant que la présence de M. Ad. Jalla serait un frein pour les ba-Rotsi. De dix heures à cinq heures de l’après-midi, nous passâmes par de terribles anxiétés. J’étais surtout inquiet au sujet de mes garçons, et je ne pouvais que les confier au Seigneur, qu’ils étaient appelés à confesser. Eux n’avaient ni honte ni crainte; ils étaient à la place des accusés, c’est-à-dire des condamnés; ils savaient aussi que, selon toute probabilité, ils ne la quitteraient pas, cette place, avant d’avoir été cruellement garrottés et.... qui sait? M. Jalla nous raconta la grâce et le courage que Dieu a donnés à nos jeunes gens ; les insultes outrageantes que ces chefs surexcités ont fait pleuvoir sur leurs têtes et sur celles des évangélistes. Il nous raconta le moment terrible de suspens qui s’écoula entre la défense que nos frères firent d’eux-mêmes et le discours du roi, — et l’étonnement de l’entendre franchement, sans la moindre ambiguïté, prendre la défense de nos garçons, de nos évangélistes, de nousmêmes, et dévoiler en partie les menées des chefs qui s’accrochaient à de futiles prétextes pour donner libre cours à la haine que leur inspire l’Évanqile. — Dieu soit loué 1 C’est une délivrance, j ’ose à peine dire une victoire. Car ces vieux suppôts du paganisme ne se tiendront pas pour battus et seront surs de machiner d’autres plans. Mais le résultat final n’est pas douteux, et cela nous donne du courage et de la joie. Cela affermira nos jeunes chrétiens (iU‘ nOUS a attnstés dans cette affaire, c’est la conduite de mon Sémonja un chef influent, qui m’accompagnait généralement dans mes voyages. Il est converti, c’est un homme doux, aimable, sérieux; mais il a eu peur de prendre notre parti. Depuis lors, il était si malheureux! Il est venu ce matin (le 3i) s humilier de sa conduite. Mais pareille lâcheté donne du souci. Les Ad. Jalla sont partis samedi pour Nalolo. J’étais donc seul avec l’évan- géhste, auquel je donnai toute la première partie du service, me réservant la prédication. A la porte, on m’avertit que les chefs avaient chassé tous les jeunes gens du banc de devant eux. Entrant suivi de Léwanika, je les fis rasseoir à la place que je leur avais désignée, et, dans une courte allocution j’expliquai calmement à.I’assemblée que la maison de Dieu n’est pas leur lékho- thla, où chacun a sa place assignée. Chez lui un chef est tout, à la cour il n est qu un serviteur. De même quand nous venons dans la maison de Dieu nous laissons toutes nos dignités et nos grandeurs à la porte; ici, Dieu seul est maître, seul il est grand. Puis je prêchai sur Luc XIX, i4 : Nous ne voilions pas que celui-ci règne sur nous. Dans l’après-midi, Gambella m’envoyait en cadeau deux belles pagaies. Pourquoi? Pas de message. Je crois avoir découvert la clef de toute cette surexcitation. On craint que le roi ne devienne chrétien, et que, quand il aura dispersé tout son harem, il n abolisse la polygamie et ne force les chefs, comme tout le monde, à se con- tenter chacun de sa femme ! ! ! Léalouyi, 3i décembre i8g4- J’ai eu une forte attaque d’hématurie qui m’a fort éprouvé. Depuis plus de quinze jours, je traîne l’aile; mais je vais mieux, bien que je ne vaille pas grand chose... r Après les vacances de Noël, j ’espère reprendre mon école biblique après- demain. Une école biblique au Zambèze !!!... Ce nom vous rappelle l’oeuvre gigantesque et bénie de mon bienheureux ami Mabille. A ce titre, il est prétentieux. Ce n’est- que le nom, toutefois. Je n’ai que quatre élèves, que ¡’habille et nourris, et qui font mon petit tripot de ménage. Ce sont mes enfants aussi bien que mes élèves. Deux huttes les abritent, l’une avec un grand trou et un petit, qui font l’office de porte et fenêtre : c’est la salle d’étude; HAUT-ZAMBÈZE.
27f 90-2
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