pour Mokouaé, la reine de Nalolo, et une autre bien plus vaste qui servira de khothla ou de cour de justice, et tout cela sera fait avec les produits de l’industrie du pays, y compris les clous comme le minerai dont ils sont faits. La mode est aux canaux : Léwanika en fait et Mokouaé aussi sur quatre ou cinq points de la vallée à la fois. Et aujourd’hui que je pars pour le Lessouto, je pourrais, si j’y consentais, emmener toute une légion de jeunes gens qui se font tous plus aimables et respectueux les uns que les autres. Pour les uns, leur ambition, c’est d’aller travailler chez les blancs et de revenir chacun son fusil sur l’épaule ; pour les autres, leur désir, c’est d’aller à cette école biblique du bienheureux Mabille, dont la renommée est arrivée jusqu’ici. Inutile de raisonner et d’essayer de leur démontrer l’insuffisance de nos ressources ; ils sont sourds à tout argument et pour couper court à toute obsession il n’y a qu’un seul moyen : il faut se cuirasser, et sans faire de sentiment, dire carrément à ce monde non pas : « Je ne puis pas vous prendre », ils n’en croient rien ; mais : « Je ne veux pas ! » Tant pis pour ceux qui ont la démangeaison de voir du pays et de gagner de l’argent ; mais avouez-le, c’est dur pour les chers garçons qui professent un si grand désir de s’instruire, et de devenir des éuangélisles-maitres décote, car nous cumulons les fonctions au Zambèze. Je n’oserais pas me porter garant, notez, de la pureté et du désintéressement des motifs de chacun. Mais toujours est-il que nous ne pouvons pas y être indifférents, pas plus qu’aux besoins de notre oeuvre. Vous savez si nous apprécions les évangélistes qui nous viennent du Lessouto ; ce sont pour la plupart des hommes d’élite. Mais les distances, les difficultés du voyage et les dépenses en limiteront toujours forcément le nombre. Nous ne gagnerions rien à envoyer nos Zambéziens au Lessouto et à en faire des ba-Souto, pas plus qu’il n’eût été sage et économique d’envoyer des ba-Souto en France et d’en faire des pasteurs ou. des missionnaires français. Leurs prétentions et leurs exigences eussent risqué d’être en proportion inverse du bon sens. M. L. Jalla a trois élèves à Morija, et moi j ’ai consenti à y conduire un des miens, qui sera le quatrième Zambézien. Mais je le fais à mon corps défendant et tout bonnement parce que je ne puis pas faire autrement. C’est un risque que nous courons, un grand risque même, il ne faut pas se le dissimuler. Mais que faire? Et qu’on n’aille pas s’imaginer qu’en parlant ainsi je jette une ombre de discrédit sur une école qui, de toutes les écoles du Lessouto, a ma plus entière et ma plus profonde sympathie. Oh non ! seulement, ce qu’il nous faut, ce qui est impérieux, c’est notre école biblique à nous, ici au Zambèze, et à bref délai. Dès le début, nous devons inculquer à nos chrétiens un esprit missionnaire, une activité agressive, le besoin de donner ce qu’eux-mêmes ont reçu. De nos jours, on parle beaucoup, dans le monde religieux anglais, de ce qu on appelle self supporting Missions. J’aimerais mieux, moi, une mission self propagatmg. Ce serait plus vrai; ce serait indiscutable, puisque c’est l’essence même du christianisme, et'la sève de la vie spirituelle de chaque disciple du oauveur. r Je suis venu à Séfoula pour expédier Kambourou avec ma wagonnette, que je rejoindrai à Kazoungoula, où je me rendrai eh canot. Mais voilà quatre jours que J attends, et pas de Kambourou. J’y suis venu aussi pour bénir le mariage de Séonyï et de Nosikou qui, l’un et l’autre, ont grandi chez nous. La jeune lie était restée avec M“ Ad. Jalla quand j ’ai quitté pour Léalouyi ; tous deux prolessent d être convertis, et certainement il s’est opéré chez eux une transformation que nous ne pouvons attribuer qu’à la grâce de Dieu. Du reste, vous l’aurez déjà appris; il se produit sur chacune de nos stations un mouvement dont nous ne voudrions parler qu’avec la plus grande réserve, mais que nous ne pouvons pourtant pas taire absolument. C’est à Kazoungoula qu il s’est d’abord manifesté, parmi les enfants qui vivent dans la maison missionnaire. Il s’est fortement accentué lors de notre conférence et pendant le séjour que nous y avons fait. C’est a Séfoula surtout qu’ü a pris les plus grandes proportions. En quelques semâmes, le nombre de ceux qui ont publiquement déclaré vouloir servir Dieu a dépassé la soixantaine. Un bon tiers, me dit M. Ad. Jalla, sont des enlants de I école; d’autres sont des hommes et des femmes qui n’ont guère encore pour les recommander à notre confiance que cette profession publique qui, après tout, parmi ces Zambéziens volages, coûte peu et compromet peu. Mais d autres sont des personnes dont les visages nous sont familiers A Léalouyi ce qui m’a frappé à mon retour de Kazoungoula, c’est l’auditoire : notre église, toute grande qu’elle est, déborde. Elle était, le premier dimanche de mon arrivée, bondée comme au jour de la dédicace : les bancs es passages, les marches mêmes de la plate-forme qui nous sert de chaire’ tout est plem, pas un pouce de perdu. Et encore, plus de cinquante personnes, n ayant pu trouver place, se pressaient-elles dehors aux portes pour écouter. Des travaux publics et des causes locales ont pour le moment dispersé une parue de la population flottante, toujours considérable à Léalouyi Malaré cela 1 église se remplit Et, je dois le dire, il y a quelque chose de solennellement réjouissant dans l’attention et le sérieux de ce bel auditoire dans un milieu aussi païen. Ici aussi, nous avons eu dé ces professions spontanées dont quelques-unes ont remué nos coeurs ; mais je ne les encourage pas. Si nous ne travaillions pas parmi des gens dont nous connaissons aujour- dhm le caractère désespérément frivole, et si nous n’avions pas eu, ou si du moins nous pouvions oublier les dures et humiliantes leçons du passé, peut- HAUT-ZAMBÈZE. ^ 64
27f 90-2
To see the actual publication please follow the link above