réunîmes encore, dans ce temple maintenant vide, pour recevoir un message du Seigneur (Zach., II, 5) et commémorer ensemble sa mort. Tout était calme et silencieux au dehors comme au dedans. Jésus était là et parlait à nos âmes. Après cette journée si belle, si remplie, nous sentions qu’il nous invitait, nous aussi, comme ses disciples fatigués, à le suivre « à l’écart » et à nous retremper dans l’intimité de sa communion. Moments bénis, heure solennelle I « Il fait bon d’être là. » Le lendemain, examen et fête de l’école 1 Depuis minuit, il pleut à verse et l’eau monte rapidement. Si cela continue, dans deux jours la chaussée aussi sera submergée. Malgré la pluie, les enfants sont accourus : ils n’ont pas de vêtements à mouiller et ils ne veulent pas être privés de leur fête ; ils ont raison. Heureusement que vers midi la pluie cesse, le ciel se débarbouille et le soleil brille. Un coup de cloche, et tout le monde est là; pas tout le monde d’hier, bien sûr, mais les élèves au grand complet, le roi, la reine, tout le haut monde. Une ombre bien noire, c’est que notre ami Jacob, le maître d’école, est malade, très malade même, mais sa femme prend sa place avec un calme que nous avons tous admiré. C’est une bonne et gentille femme que Noréa. Nos enfants nous chantent un petit chant de circonstance où ils se réclament d’être de nos enfants, et nous demandent d’être indulgents et de ne pas leur poser des questions embarrassantes ! Chers enfants, ils nous ont gagnés, et nous aimerions les voir courir; sauter, et surtout festoyer. Aussi pressons-nous les examens. Mais le roi n’entend pas de cette oreille-là, ni les Litia non plus, qui ont passé par ce chemin épineux, et il faut absolument que nous les interrogions aussi, ces grandes jeunes filles et ces jeunes gens à barbiche qui trébuchent aux premières lettres de l’alphabet. Ce sont les suivants des enfants du roi, et ils croient que, s’ils font acte de présence à l’école, tout est dit. L’examen terminé, il fallut écouter les chefs qui, sur le ton de la menace, gourmandaient des gens qui n’étaient pas là. Le roi, lui, fut plus sensé : il fit à chacun sa part, remercia ses missionnaires, taxa les hommes de menteurs et mit ses propres femmes dans le même panier : « C’est vous qui entravez l’école et détournez les enfants. Mais quant à moi, ajouta-t-il, sachez que si un enfant ne fréquente pas l’école, j ’ai beau l’avoir enfanté, il n’est pas mienl » Enfin on sortit. Tant mieux pour les enfants ! Vous auriez dû les voir assis par groupes, impatients de commencer. Le roi leur avait tué un boeuf pour eux tout seuls. Nous y avions ajouté café, sucre et gâteaux de maïs. Nyondo, debout, fit la prière, et alors ce fut à qui mieux mieux. Bientôt, tout fut fini. Mais il fallait le dessert, et le voici : Mokanoa, le serviteur du roi, le haut du corps nu, arrive; il s’agenouille, on fait cercle, on bat des mains, puis on écoute en silence : « Le roi dit : Pour lui comme pour les barouti, l’école est une affaire sérieuse. Sachez donc, vous tous, ses enfants et ses esclaves, que quiconque d’entre vous s’en abstiendra sans raison, sera étranglé à la sérotsi (claquement de mains), et quiconque suit l’école et ne fait pas de progrès, lui aussi sera étranglé à la sérotsi. Tenez-vous-le pour dit. » Voilà; on claqua de nouveau les mains et on se dispersa, mais pas pour longtemps’ car on avait vu les préparatifs de la lanterne magiqùe. La séance réussit à merveille. Il y avait même des chefs du bo-Lounda. Aussi, quand, en signe d adieu, Waddell lança une ou deux fusées, la panique faillit les saisir. On n oubliera pas cette journée de sitôt. Nos amis étaient retournés à Séfoula. L’inondation montant toujours, nous nous demandions, nous, combien de jours nous pourrions encore rester sur notre îlot. Le roi connaissait mes intentions. Il déclarait que lui non plus ne quitterait pas, et que, s’il y était forcé, il ne je ferait qu’à la dernière extrémité. Il savait que, pour moi, l’accompagner à son village de refuge était tout à fait hors de question. Malgré la maladie de Jacob, je recommençai immédiatement l’école. Je le fis avec 180 élèves. Ne vous y trompez pas, toutefois -: il y a de la balle, et beaucoup, dans ce tas. Tout de même, cela nous met en présence d’une oeuvre énorme pour laquelle nous sommes loin de suffire. Litia et Mokamba, eux aussi, se rapprochent de nous, et, à leur requête, j ’avais commencé une classe spéciale pour eux. Ce n’est pas que je croie chez eux à un désir sérieux de s’instruire, et encore moins, hélas! à un retour vers le Seigneur; mais je voudrais, si je le pouvais, comme on le faisait pour les villes de refuge’ enlever toutes les pierres du chemin du salut. Les services des deux dimanches qui ont suivi la dédicace ont été particulièrement solennels. Malheureusement, l’inondation montait toujours ; la chaussée avait complètement disparu sous les eaux; une grande partie du vülage était inondée. Et ce n’était que le commencement. De Kabombo et de ces régions du nord, on nous annonçait un vrai déluge. De mémoire d’homme on n’a vu inondation pareille. Des îlots qui, généralement,- tiennent haut la tête au-dessus de l’eau, sont complètement submergés; des champs dévastés, des arbres même, à là lisière du bois, déracinés et emportés. Aussi nos ba-Rotsi, qui se plaignent tous les ans que l’inondation soit si faible, murmurent aujourd’hui qu’elle soit si forte. L’homme est-il jamais satisfait? Un dimanche soir, le jour de Pâques, Léwanika m’annonça que, selon le désir des gens, il devait partir le lendemain. L’eau avait envahi la place publique et était à sa porte. Le lendemain, en effet, comme je me proposais d’aller le voir, il venait, avant déjeuner et très à la hâte, prendre congé de moi. Tout ceux qui le pouvaient avaient déjà quitté. On ne prit pas même le temps de mettre à flot la JValikouanda, qui s’était cassé l’échine en sortant du
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