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m’a montré plus d’une fois que les chants les plus simples, imprégnés de l’Évangile, sont comme certaines graines de ce pays auxquelles le bon Dieu a donné des ailes. Quand elles sont mûres, leur gousse éclate, les disperse, et elles s’en vont portées, poussées par la brise, nul ne sait où. Les unes, le qrand nombre probablement, sont perdues; mais qui sait? une, une seule peut aller tomber en quelque lieu propice, ignoré, et là germer, pousser, devenir un grand arbre et porter des graines à'son tour — des graines avec des ailes. Aussi, lors même que nos Zambéziens chantent comme des oies, et n’y mettent pas trop de sérieux, nous chantons, èt beaucoup. J’ai aussi été conduit à m’occuper d’évangélisation à domicile, oeuvre bien difficile, mais d’autant plus intéressante, et le bien qu’on peut ainsi taire m a vivement impressionné. Malheureusement, mes efforts ont été limités par les travaux multiples dont j ’ai la responsabilité et dont je dois dire quelques mots. , t Les tentes, en saison de pluie, chaudes, humides, boueuses, renversées par le vent, ne sont pas précisément poétiques. Nous en étions si fatigués, que nous avons été bien reconnaissants de nous réfugier dans des huttes construites à la hâte. Pendant que j’en activais les travaux, Waddell me préparait un petit cottage d’une seule chambre. Il faut peu pour me loger maintenant Mais le cher homme mettait à cette petite construction un soin qui m’allait au coeur. Cela fait, nos efforts se concentrèrent sur la construction de l’église, dont la charpente et une partie des matériaux avaient été préparés a Séfoula. Le bâtiment est de soixante pieds de long sur trente-trois de large (20 x , , mètres), éclairé par treize fenêtres; le toit en est supporte par huit forts piliers, et un porche avec deux portes complète cette construction. Les murs d’énormes billes d’un bois dur qui résiste aux mandibules des termites, reposent sur des assises du même bois; les interstices remplis de roseaux et le tout badigeonné et plâtré lui donnent une apparence de solidité. Nous avons pris toutes les précautions possibles pour en assurer la durée . toute cette superficie est encavée d’abord à la profondeur de deux ou trois pieds, et ensuite comblée de sable fin apporté de la plaine; chaque pièce de bois qui recouvre la terre a été soigneusement goudronnée. Ce local, qui doit garni de bancs, sera la merveille du pays, soit dit à 1 honneur de notre ami Waddell, qui y a mis toute son énergie, ses forces et son coeur Puisse-Gil être bientôt trop étroit! et surtout puissions-nous avoir la joie de dire un jour de beaucoup de nos chers ba-Rotsi : « C’est là qu ils sont nés ■ Un autre travail, bien plus considérable que je ne 1 avais d abord supposé, c’est la chaussée qui, formant la moitié d’une ellipse allongée, doit nous mettre en communication à pied sec, au temps de linon ation, avec a vi C’est étrange! femmes et enfants peuvent, même en hiver, se jeter a 1 eau et patauger dans la boue pour vendre un peu de farine ou gagner quelques perles ; les hommes n’hésitent pas à faire de même pour venir flâner, —. cé que je n’encourage pas. — Mais, le dimanche, il fait froid, ils ont peur de l’eau, ils n’ont pas de canots, et comment venir au prêche ? Et c’est précisément pour leur enlever tout prétexte que j ’ai commencé ma chaussée. Nos ba-Rotsi, avec beaucoup de mauvaises qualités, en ont aussi de bonnes. Ils sont habiles de leurs mains et industrieux. Ils croient sérieusement que leur nalikouanda est un chef-d’oeuvre. Quand ils nous ont vus bâtir à Séfoula avec des matériaux du pays, ils se sont dit qu’ils pouvaient en faire autant. Et, en effet, Léwanika a maintenant une maison plus grande et plus belle que celle de Séfoula. La reine s’est piquée d’amour-propre, et sa maison est à son tour plus grande et plus belle que celle du roi son frère. Et puis, c’est Litia, c’est Katoka qui ont chacun la leur et Mpololoa qui aura la sienne. C’est naturellement à moi qu’on regardait pour les ferrures et les clous. La reine Mokouaé, un jour, ne m’envoyait-elle pas, par ses plus hauts dignitaires, une pièce d’or ! Comment cette pièce avait trouvé son chemin jusque là, je n’en sais rien. Mais elle pensait que la vue en produirait sur moi un effet magique. Elle voulait, en échange, tous les clous nécessaires à sa construction, les serrures, portes, fenêtres, voire même les meubles par-dessus le marché ! Le roi se montra plus raisonnable. Il savait que je n’avais plus de clous. Il se contenta d’un échantillon, comme modèle, et depuis lors ses forgerons lui en ont fabriqué de toutes grandeurs. De même pour les bêches. Il en fut du canal comme de la maison. Quand ils m’ont vu faire le mien et réussir avec une poignée d’ouvriers, ils se sont dit : nous pouvons faire mieux, nous ! Et mieux ils ont fait. Grâce aux milliers de bras dont ils disposent, non seulement le canal met aujourd’hui la capitale en communication avec le fleuve, mais il est allé, drainant des marécages devenus des champs fertiles, ehercher au loin, parmi les collines et les bois, des lacs et une petite rivière qui en fera un cours d’eau permanent. Déjà aujourd’hui, il coule au plus fort de la sécheresse, et les canots le montent et le descendent avec orgueil. Eh bien, de même aussi pour ma chaussée. Ému de jalousie, Léwanika a voulu partager avec moi le travail. 11 amènera sa part, du lèkhothla jusqu’au canal, où je conduis la mienne depuis la station et où nous construirons une passerelle. Il faut voir avec quel entrain les cent à cent cinquante jeunes gens partagés en escouades travaillent toutes les après-midi, creusant, portant des mottes à la main, construisant à la cadence de leurs chants sauvages. Je fais piteuse mine, moi, avec ma poignée de jeunes gens à gages, un ou deux pics et six ou huit bêches ébréchées et cassées. Que ne donnerais-je pas pour avoir des bêches? Il m’en viendra... mais quand je n’en aurai plus besoin.


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