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naturellement remuante; mais la servitude, en outre, leur impose souvent des corvées qui les enlèvent de leurs foyers pendant des jours et même des semaines consécutives. De là l’irrégularité de nos auditoires, et le manque de progrès. Toutefois, Séfoula est un coin de notre champ des plus intéressants, et il fleurira certainement sous les soins d’une jeunesse fortement trempée et sous la puissance irrésistible de l’amour des âmes. Je laisse M11“ Kiener à Séfoula, ainsi que pour un temps mon ami Waddell. Maintenant, complètement sevré de tous ces soins assidus et de ces attentions délicates, mon veuvage prend un aspect plus sévère encore, ma solitude devient plus grande et ma vie plus dure. Mais Jésus me reste, il suffit : « En sa présence, il y a abondance de joie, et à sa droite des jouissances éternelles. » Notre arrivée ici n’a pas causé une grande sensation. C’est que je n’y suis pas un étranger, et puis le site de la station se trouve en deçà du village, en venant de Séfoula. Le roi, qui nous boudait depuis quelques jours de ce que ni M. Jalla ni M. Baldwin n’avaient voulu acheter à son prix un boeuf qu’il m’avait envoyé pour le vendre, se montra pourtant aimable et parut content de me voir arriver. Si content, qu’il ne croyait pas que ce fût un fait accompli, et plus d’une fois, dans la conversation, il me demanda en riant quand je retournerais à Séfoula. J’annonçai que dès le premier dimanche tous les services se tiendraient à l’emplacement de la nouvelle station. Ce fut un éclair pour Léwanika : il s’aperçut, pour la première fois peut-être, que quelque chose pouvait se faire tout près de lui et pourtant en dehors de lui, que le contrôle immédiat de nos auditoires, de notre école, de nos services, de nos heures, de nos faits et gestes, enfin, allait lui échapper, en partie du moins. Aussi s’épuisa-t-il en arguments pour m’amener à changer de résolution, et à continuer à tenir les services au lékhothla. Ce fut en vain. Nous avons trop gémi sous ce joug de fer pour le subir plus longtemps, et coûte que coûte j ’étais déterminé à en affranchir notre oeuvre et à ouvrir le chemin de notre culte à toutes les femmes, à tous les esclaves qui n’oseraient paraître au lékhothla. Ainsi donc, le dimanche 3o octobre, dès les huit heures du matin, j ’envoyai Nyondo sur un petit talus plus près du village, et pendant vingt minutes il y sonna une cloche à main. Une cinquantaine d’hommes s’étaient' déjà, un à un assemblés à notre campement. Nous nous demandions si peut-être ce serait là tout notre auditoire. Bientôt nous vîmes le chemin se parsemer de petits groupes qui se dirigeaient vers nous, puis un autre plus gros, c’était Litia et sa suite, puis un autre plus gros encore, une masse noire qui se mouvait lentement. Les tambours qui battaient et les sérimba qui gémissaient nous annoncèrent de loin que c’était le roi. Il nous prit d’assaut, et pendant dix minutes tout fut en émoi autour de nous. Bel auditoire d’hommes et de jeunes gens, le meilleur que j ’aie eu ici depuis longtemps, cent cinquante à deux cents personnes, mais pas une seule femme, si ce n’est nos deux converties de Séfoula, Ma-Moendaroubi et Ma-Moendabaé, qui sont ici en corvée. Depuis bien longtemps je ne puis plus avoir une seule femme à nos services. Les femmes du roi prétextent que le manque d’abri les exposerait aux yeux du publie, ce qui n’est pas admissible; et les autres qu elles n oseraient jamais aller s’asseoir au lékhothla où les reines craignent elles-mêmes daller, et qu’elles ne sont que des chiens qui ne peuvent se montrer devant le roi. Les esclaves, eux, n’ont pas encore compris que Evangile est pour eux; c’est un fruit défendu qu’ils croient n’être que pour leurs maîtres. ^ * Je roulais tout cela dans mon esprit et je rêvais aux transformations que 1 Evangile pouvait en peu d’années produire parmi ce peuple, pendant que j essayais de mettre a la portée de leur intelligence ces paroles de saint Paul aux Romains: <c Je n’ai pas honte de l’Evangile de Christ, vu qu’ü est la puissance de Dieu en salut à tous ceux qui croient. » Mais les nuages s’étaient amoncelés et, pour la première fois cette année, la pluie se mit à tomber II me fallut couper court. En un clin d’oeil, nos deux tentes déjà si pleines furent prises d’assaut par les gros bonnets qui s’y entassèrent comme des harengs. La populace, elle, n’avait pas bougé. Ceux qui avaient sur les épaules une peau quelconque, une couverture de coton même en logues les avaient étendues au-dessus de leurs têtes et au bénéfice de leurs voisins et tous, sous ces abris improvisés, s’imaginaient être au sec. Ils ne trahissaient pas, en la présence de leur roi, le moindre mécontentement ou la moindre impatience. Léwanika, lui, avait, avec ses familiers, pris possession de ma propre tente. Il triomphait: « Ne te l’ai-je pas dit, Morouti? Moi aussi j’ai de la sagesse. - Oui seulement tu oublies que la place publique n’a pas d abri non plus. Nous bâtirons. » Ce contre-temps me troublait. Je demandais à Dieu de me diriger dans ce que je pouvais faire pour sauver la situation. Dès que la pluie cessa et comme mon monde se préparait à partir, je m’assis dehors au milieu d’eux et commençai à leur enseigner avec entrain ce beau cantique de M Casalis- « Ceux qui ne connaissent pas Jésus sont morts dans leurs péchés »• et quand je les eus bien intéressés, et que je me fus assuré leur attention je repris sans formahté aucune, mais aussi familièrement que possible, le sujet que la pluie avait interrompu. On m’écoutait, tous les yeux étaient braqués sur moi, je pus donc parler longtemps. Oh! puissé-je moi-même toujours mieux le croire: l’Évangile de Christ la bonne nouvelle du salut, c’est la puissance même de Dieu, non la mienne /


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