grande surprise, tous sans exception parlèrent de moi et de mes plans dans les termes les plus favorables et les plus sympathiques. « Gambella, tu nous annonces une bonne nouvelle, quand tu nous dis que le morouti, notre père, veut enfin venir s’établir près de nous. Nous le désirons depuis longtemps. 11 nous est difficile de lui envoyer nos enfants à Séfoula ; c’est trop loin, la nourriture manque souvent. Ici, nous pourrons les envoyer régulièrement à l’école, et aller nous-mêmes aux prédications du dimanche. Il est rongé par l’ennui dans les bois ; c’est un mo-Rotsi, il aime la plaine et il cherche d’autres ba-Rotsi. Si nous ne l’aimions pas, lui aurions-nous bâti une maison ici, une des plus belles de la ville ? Qu’il vienne, il est ici chez lui. Nous nous en réjouissons et disons merci. » — « Nous avons vu des choses étranges », s’écriait un grand chef ; « des étrangers concerter en tête-à-tête avec notre roi, parcourir nos malapa (nos cours), prendre nos femmes et nos enfants dans leurs confidences ; nous les entendions parler de mines, de métiers, de cadeaux, sans qu’on nous dise de quoi il s’agissait. Et nous nous demandions : « Où allons-nous? Sommes-nous à la merci des étrangers? » Aujourd’hui que notre père vient parmi nous, toutes ces menées prendront fin. C’est un mo-Rotsi, et ici il est chez lui. » Voilà la somme de tous ces discours. Léwanika n’avait pas osé être présent. En son absence, Litia parla le dernier, représentant un nouvel élément dans la nation. Il parla bien, à point, et même avec une autorité et une hardiesse qui m’étonnèrent. Il reprocha aux ba-Rotsi leur manque de sincérité et même leur servilité. Il osait leur dire : « Vous venez au culte quand le roi y vient; mais quand il ne vient pas, pourquoi vous abstenez-vous? Est-ce lui que vous priez? Est-il votre Dieu ? » Léwanika, informé officiellement du résultat de ce pitso, en exprima sa grande satisfaction, et parut s’en réjouir. Il me promit des canots pour le transport des matériaux que nous préparons à Séfoula, et s’engagea, si j ’en avais besoin, à me procurer des ouvriers et des bois de construction, moyennant des gages fixés entre nous. Et maintenant, chers amis, nous voici en présence de questions graves et pour nous bien difficiles à résoudre. On m’annonce que M. Vollet repart pour le sud, et j ’estime que c’est la meilleure chose qu’il puisse faire. Les Jeanmairet, d’après leurs lettres, sont toujours incertains dans leurs plans, mais la conviction qui s’impose à eux et que les frères du Lessouto partagent, c’est qu’ils ne reviendront pas au Zambèze. Et voilà en outre Séfoula que mon départ va laisser vacant, et qu’il faut à tout prix pourvoir sans délai. Il y a longtemps que nôus poussons des cris de détresse. Nous, nous n’avons qu’une vie, nous ne pouvons donner davantage. A vous, en Europe, d’agir avec promptitude et énergie, si vous voulez nous maintenir ici et sauver la mission. Souvenez-vous-en, nous ne sommes plus au temps jadis où tout allait au pas lent et mesuré des boeufs. Nous vivons dans des temps de bouleversement, de transformations subites et de crise. Oh ! soyons vigilants, soyons à la hauteur des circonstances et de nos responsabilités, pendant que nous sommes encore au gouvernail !
27f 90-2
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