Sa conversion fut une de ces conversions éclatantes qui ne laissent aucun doute. Il sut se faire, dans notre coeur comme dans notre maison, la place d’un enfant. Nous le préparâmes pour l’école de Monja ; il vient d en sor ir avec son diplôme. Ses dons pour l’enseignement sont remarquables. Un trois mois, et dans un endroit où il y avait à peine quatre ou cmq élèves, U a su en rassembler plus de quarante-cinq, tous enfants de païens ; et ce quil leur a appris pendant ce court espace de temps nous a émerveillés. Son école promet beaucoup. Ses manières, s i m p l e s , franches, mais respectueuses, lui. ont concilié l’estime de tous les petits chefs du voisinage. La dédicace du temple de Tsikoane, qui devait avoir heu s. peu de temps avant notre départ, attira une grande foule. Il s’y trouvaU des gens don la présence ajoutait pour moi à la solennité de la circonstance , c étaie les évangélistes de Morija qui devaient .nous accompagner chez les ba-Nyai. Ils arrivèrent à Léribé le lendemain. Il fallut donc, au milieu de réunions, d’entrevues particulières avec les membres de mon troupeau, mettre 1 dernière main-aux préparatifs du départ, emballer les caisses et charger les V01Le?amedi, tout était fini. Nos chers amis Jousse et Mabüle et leurs compagnons, nos frères Duvoisin, Casalis, Dieterlen, Preen et Chnstmann, et des chrétiens d’autres Églises arrivèrent. Ceux que leur âge ou les circonstances avaient empêchés de venir, nous avaient écrit des lettres d affection et d encouragement. Quelques amis de France en avaient fait autant, et nous les en remercions cordialement. - La présence de nos chers frères du Lessou o leurs bonnes paroles, leurs ferventes prières nous ont puissamment sou * jg| et fortifiés. C’était comme l’ange que le Seigneur avait envoyé au prophète dans le désert avec de la nourriture et ce message : « Lève-toi et mange, le chemin est trop lonq devant toi. » , , . , Je montai une dernière fois dans ma chaire. Un ministère de près de vingt ans se déroulait devant moi avec toutes ses bénédictions, ses quelques succès mais aussi, hélas ! des infidélités et des misères qu il n est plus possible de réparer - I ministère dont la responsabilité ne m’avait jamais paru s. e^yante ! Puis nous dîmes adieu à chaque membre de notre cher troupeau Pour nous, la promesse du Sauveur n’a pas été vaine. Si nous avions qui e mères frères, soeurs, nous les avions retrouvés dans cette vie ; c était deux et d’enfants bien-aimés en la foi que nous nous séparions. Nous quittions une seconde patrie, une autre France. . En sus de la collecte qui se fit dans l’église, nos pauvres gens vinren M m lundi nous apporter, tout en pleurs, leurs petits femmes les plus âgées de notre troupeau vint, au moment ou nous allions monter en voiture" nous offrir une natte à laquelle elle avait longtemps travaille. « C’est pour la placer sous vos pieds, serviteurs de Dieu, » dit-elle en fondant en larmes. Le soleil était déjà près de l’horizon; nous sentîmes qu’il ne nous était plus possible de supporter tant d’émotions. Les frères et les soeurs qui étaient restés avec nous jusqu’au dernier moment, réunis dans notre salon, nous recommandèrent encore une fois à Dieu et à la parole de sa grâce; et, après quelques moments de recueillement privé avec ma bien- aimée compagne dans cette maison, témoin de tant de luttes et de bénédictions, un dernier regard jeté sur le jardin qui embellit cette retraite, nous montâmes en voiture et donnâmes le signal du départ. —- Cher Léribé ! notre Béthel et notre Ebenézer tout à la fois ! adieu, adieu ! Adieu, enfants du Seigneur qui, par votre tendre affection, nous y avez donné droit de cité, et « fait oublier la maison de nos pères ! » — Amis Kohler, soyez -y aussi heureux que nous l’avons été ; soyez-y plus bénis encore. — Avions-nous commis l’erreur de considérer Léribé comme notre home terrestre, et l’oeuvre que nous y poursuivions comme la nôtre? le Seigneur nous enlevait cette illusion. Toujours est-il que nous sommes attachés à ses pierres, arrosées de notre sueur et de nos larmes !... La plupart des gens de ,1’endroit s’obstinèrent à suivre nos voitures. — J’allai à cheval dire adieu au pauvre chef Molapo, qui était malade, l’exhorter une dernière fois et prier avec lui ! — La soirée était fort avancée quand nous traversâmes le Calédon. Je venais de me séparer de M. Jousse, qui a toujours été pour moi un frère affectueux, un ami fidèle, et un conseiller sympathique. Dieu sait ce que je lui dois. Maintenant, je me séparais de Mabille, l’ami de mon coeur ; il avait été témoin de mes combats et de ma faiblesse. Nous nous sentîmes ébranlés. Mais Jésus était là; pas de séparation avec Lui. « Je suis avec vous jusqu’à la fin du monde. » Le magistrat, les marchands et quelques Européens du district voulurent aussi nous donner une preuve de l’intérêt qu’ils prenaient à notre lointaine expédition, et nous envoyèrent, accompagnée d’une bourse de dix guinées, une lettre dans laquelle ils se plaisaient à reconnaître nos travaux,, et exprimaient, avec le regret de notre départ, les meilleurs voeux pour le succès de notre entreprise. Le lendemain, plusieurs de nos gens vinrent renouveler à notre campement les scènes émouvantes de la veille. Des hommes à pied et à cheval nous accompagnèrent plusieurs jours de chemin. Ce fut à Harrismith que nous nous séparâmes des derniers, parmi lesquels Nathanaël Makotoko, auquel m’unit intimement une amitié de plus de vingt ans, et que des devoirs impérieux empêchaient seuls de nous accompagner. — Les bontés dont nous fûmes les objets à Harrismith ne parvinrent pas à adoucir l’amertume de cette dernière goutte. Mais, nous retrempant dans la communion de notre Sauveur,
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