racontai comment le Maître avait soudainement changé ma feuille de route, et m’envoyait dans des régions inconnues, la vieille dame, joignant les mains, s’écria avec l’émotion d’une mère : « Heureux serviteurs de Dieu ! partez donc, allez porter l’arche de l’Eternel ! allez courageusement en avant ! Et si nous, nous n’avons pas assez de force pour vous accompagner, nous vous suivrons du moins par la pensée, nous pousserons des cris de joie, nous ferons retentir la trompette et nous battrons le tambour ! » (2 Sam. VI.) Puis, réprimant cet élan d’enthousiasme, elle ajouta : « Ma prière, c’est qu’avant que vous quittiez Léribé, Dieu vous y accorde un puissant réveil. Alors, nous viendrons nous réjouir avec vous, et, pendant que vous et votre chère dame serez occupés à parler aux âmes réveillées, moi, qui ne comprends pas la langue, je préparerai votre nourriture et j ’aurai aussi ma part de bénédiction. » A peine de retour à Léribé, je repartis à cheval pour Morija, où des réunions spéciales d’édification avaient conduit la plupart de nos frères. Nous nous occupâmes ensemble du choix des évangélistes, car un appel nouveau avait suscité de nouvelles vocations. Des quatre qui faisaient partie de la première expédition, un seul fut laissé pour être employé au Lessouto, à cause d’un accident qui l’a presque totalement privé de l’usage du bras droit. C’est Onésime. Sa douleur fut grande quand il apprit notre décision. Son coeur était à l’oeuvre chez les ba-Nyaï, et il ne comprenait aucune des raisons que nous avancions pour le retenir dans son pays. — A sa place, on choisit Aaron Mayoro, de Léribé, un jeune homme marié, père de deux enfants, et plein d’un zèle viril. Il a fait preuve d’abnégation et de persévérance en occupant, pendant quelques années, le poste ingrat de Bouta-Bouté. Sa digne femme, élevée dans notre maison, est la fille de feu notre excellent Johann Nkélé. Je dus ensuite porter mon attention sur l’oeuvre du district que j ’allais quitter. J’avais envoyé quelques jeunes gens occuper divers postes comme maîtres d’école ; il' s’agissait d’aller maintenant les y installer officiellement. L’un d’eux, Philémon, est un jeune homme avec lequel je désirerais que vous fissiez connaissance. Mo-Pédi de naissance, il s’était sauvé de la maison paternelle, n’étant encore qu’un enfant, pour aller chez les blancs gagner de quoi s’acheter un fusil. Bien que là il ait vécu chez un pasteur, sa haine pour les choses de Dieu ne connaissait pas de bornes. En retournant dans son pays natal, il s’arrêta quelque temps chez nous avec une troupe de ses compatriotes. La vérité fit une profonde impression sur quelques-uns d’entre eux, et quand, en route, ils lui annoncèrent leur détermination de revenir à Léribé pour s’y instruire, il se mit dans une grande colère, et s’oublia au point de leur cracher au visage. Quinze jours après, il les suivait, et se tenait à notre porte tout triste, en larmes, et demandant à être admis parmi nos élèves.
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