La conséquence immédiate du départ de Litia pour le Lessouto, c est le démembrement de notre école. Nous nous y attendions bien un peu, mais la crise paraît plus forte que nous ne le pensions. Ce départ aussi nous crée pour l’avenir des difficultés que nous prévoyons et que nous ne pouvons éviter qu’en fondant, nous-mêmes, et sans retard, un établissement pour des jeunes gens. Temps difficiles, — Agitation politique. — Une visite à la capitale temporaire. — Barques royales. — Un dimanche de Pâques. — L’école de Séfoula. — Tristes chutes. — M'le Kiener. — La visite de M. et Mmc Louis Jalla. — Le caractère zambézien. Séfoula, avril 1891. Parmi les amis tièdes de l’oeuvre des missions, j ’ai parfois entendu la remarque que les lettres des missionnaires sont, en général, des tableaux ensoleillés et sans ombres ; ce qui, pour dire le moins, serait peu artistique, c’est-à-dire peu conforme à la nature. Je proteste contre cette assertion, qui n’a d’autre fondement que l’ignorance ou la généralisation de faits isolés. Et pourtant, je comprendrais bien cette tendance, pourvu qu’elle ne fût pas exagérée. Autant nous aimons à faire partager à nos amis nos espérances et nos joies, autant, n’est-il pas vrai ? il nous en coûte de les attrister par de lugubres récits de soucis, de désappointements et de difficultés sans cesse renaissantes. Après tout, les amis, les vrais, ceux qui s’associent de coeur à nos travaux, qui prient et qui luttent, ont besoin de connaître tout, de lire entre les lignes et d’être ainsi initiés à la trame de notre vie. Pour eux comme pour nous, l’évangélisation du monde païen, où qu’elle se poursuive, n’est certes pas un tissu de moeurs étranges et d’aventures qui ont le piquant du roman, c’est une lutte acharnée avec le Prince des ténèbres ej avec tout ce qu’il sait, dans sa rage, susciter d’entraves, d’ennuis, d’opposition et de haine, tant par les circonstances que par les hommes. C’est un labeur sérieux. Ah ! ce devrait être une vie de consécration et de foi. Vous entrevoyez déjà, n’est-ce pas? que nous avons passé par des temps particulièrement difficiles. Eh oui ! quand les nuages s’amoncellent, tout noirs et tout gros d’orage, on a beau se dire que le soleil brille toujours radieux par delà, dans les hauteurs des cieux, on voudrait le voir, et, quand le brouillard s’épaissit autour de vous et vous envoie un frisson de glace jusqu’au coeur, n’est-il pas vrai qu’on aimerait fermer la bouche, s’enfouir dans les plis de son manteau et poursuivre sa route en silence jusqu’à ce que le ciel redevienne serein ? Mais non, vainquons-nous et causons. Tout d’abord, tous nos rapports ont risqué, et je ne sais pas s’ils ne risquent pas encore, de s’embrouiller avec cet homme pour lequel j ’ai conçu
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