Moi-même je n’ai pas, comme d’habitude, joui d’une bonne santé depuis le commencement de l’année. Quoi qu’il en soit, nous occuperons le poste et défendrons le fort jusqu’à ce que vous nous envoyiez du secours. Nos auditoires du dimanche se maintiennent, et gagnent, je crois, en sérieux et en attention. Mais nous avons beau regarder, nous ne voyons pas encore apparaître « le petit nuage grand comme la paume de la main ». Nous avons eu simultanément, au commencement du mois dernier, une semaine spéciale de prières à Kazoungoula, Séchéké et Séfoula. Nous avons senti le besoin de serrer nos rangs, de nous soutenir mutuellement, —1 et certainement Dieu nous a bénis'et nous a « fortifiés ». Mais c’est une ondée que nous attendons pour briser nos mottes et faire verdir nos guérets poudreux. M. Jeanmairet m’écrivait dernièrement : <a Si Dieu- m’accordait la joie de voir une seule conversion ici, ce serait pour moi comme un nouveau baptême. » Je le crois bien. XL En canot sur le Zambèze. — Un coup d'oeil sur l'oeuvre. — Les écoles. — Un baptême. — M. Adolphe Jalla. — Moeurs des ba-Rotsi. — Les événements politiques. — La Compagnie anglaise du sud de l'Afrique. Sénanga (entrée de la Vallée), i3 juillet 1890. Accroupi sur ma literie à l’avant de ma pirogue, je vais tâcher d’utiliser, comme je l’ai déjà fait plus d’une fois, les longues heures d’une monotone navigation pour mettre ma correspondance à îlot. Le mieux, je crois, c’est de nous asseoir par la pensée dans la petite cahute qui me sert de cabinet d’étude et, au risque de vous ennuyer par ma longueur, de feuilleter ensemble mon journal. Une de mes dernières lettres, je crois, vous laissait sous les meilleures impressions. A voir nos chers élèves si empressés à s’acheter des livres, vous auriez pu les croire tout près du royaume de Dieu et vous imaginer que nous n’avions que du succès dans notre école. Loin de là. Nos élèves sont encore terriblement sauvages... Ils ne supportent pas longtemps la contrainte. La plupart d’entre eux ont leur propre bétail, leurs esclaves et leurs villages. Chez eux, ils sont maîtres. Aussi arrive-t-il souvent que sous les prétextes les plus futiles, ou sans prétexte aucun, ils s’en vont boroùn, comme ils disent, jouir à coeur joie de la liberté de la pêche, du canotage, et des adulations serviles de leurs subordonnés. Quand ils reviennent mosito — dans les bois où nous vivons, d’autres s’en vont, et adieu les progrès. Un jour, le fils de Mokouaé, Kaïba, n’était pas à la prière du matin. Avant que nous en connussions la cause, des messagers avaient de nuit couru à Nalolo annoncer à la reine que son fils était indisposé ; ils revenaient avec l’ordre de le transporter immédiatement chez elle. Le lendemain Mokouaé appelait Litia en toute hâte. « Kaïba est malade, lui dit—elle, et les osselets divinatoires disent quevc’est toi qui dois aller sacrifier aux tombeaux de nos ancêtres. » — « Morèna, répondit Litia calmement, je ne suis plus dans ces ténèbres-là, ce sont pour moi des masures abandonnées. Je ne prie plus les morts. » Mokouaé fit force remontrances et discuta longuement. Ne gagnant rien: « Eh bien, fit-elle, soit, tu n’iras pas en personne. On priera à ta place; seulement tu prendras une poignée d’herbe imprégnée de médecine,
27f 90-2
To see the actual publication please follow the link above