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s’ouvre toujours plus, qu’on le veuille ou non. L’an passé, c’était une concession faite à une compagnie minière. Cette année, c’est une compagnie bien autrement puissante et qui, par une charte du gouvernement britannique, a reçu pleins pouvoirs pour acquérir, conquérir et gouverner tous les vastes pays qui s’étendent au nord des domaines de Khama, des possessions portugaises à l’est, aux possessions portugaises à l’ouest, et, vers l’Afrique centrale, sans limites. Elle s’est déjà assimilé toutes les compagnies existantes. C’est un formidable outil dans les mains du gouvernement anglais, et ses représentants, qui sont venus traiter avec Léwanika, ne cachent nullement que leur but est politique avant tout. Quand nous jetons un regard autour de nous, nous frémissons d’horreur, tant les ténèbres sont épaisses, et la corruption épouvantable. Un bien cher ami m’écrivait : <r Le succès n’est pas seulement le bien que vous faites, mais aussi le mal que vous empêchez. » Le mal que nous empêchons, nous ne le saurons probablement jamais tout entier. Mais il nous est permis quelquefois d’en savoir quelque chose. Je vous parlais du village de sorciers que le roi a fondé dans notre voisinage. Eh bien, il est digne de remarque que, depuis le meurtre atroce, que je vous racontais, il y a trois ans, de Mohiyanyane, l’un des favoris du roi, personne, que je sache, n’a été mis à mort pour cause de sortilège. Le roi s’en glorifie à juste titre. Ayant lui-même renoncé aux boissons enivrantes, il voudrait contraindre tous les chefs de faire comme lui. Il y a longtemps qu’on ne boit plus de bière au lekhothla, et que Léwanika a formellement défendu qu’on en fît à la capitale. On a beaucoup grogné, mais on s’est soumis. Je pense que les ba-Rotsi prennent leur revanche quand ils vont dans leurs villages. Une autre réforme qui a fait du progrès, c’est celle de l’esclavage. Le roi lui-même traite ses esclaves avec beaucoup de bonté. Cette année, une caravane de marchands noirs est venue du Bihé. Le roi apprit que, contrairement à sa défense expresse, ces ma-Mbari se faisaient clandestinement une bonne' provision <t d’ivoire noir ». Lorsqu’ils furent sur le point de partir, Léwanika libéra tous les esclaves et imposa une forte amende aux ma-Mbari, ou plutôt confisqua leur ivoire. M. Ad. Jalla est notre hôte depuis deux mois et me donne dans l’école un vigoureux coup de main. Malheureusement, ce cher ami ne nous apporte qu’un secours temporaire, puisque, d’après nos décisions, il doit fonder sa propre station à Kanyonyo. Donc ce précieux renfort nous échappe, et nous n’en avons pas d’autre en perspective. Depuis le commencement de l’année, notre école a passé par toutes sortes de péripéties et de fluctuations. Depuis quelque temps, elle se remonte, et nous avons maintenant 70 élèves dont la plupart ne demandent qu’à avancer. Ma femme n’est pas capable de m’aider.


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