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donna le vertige. Nous sentîmes le besoin, ma compagne et moi, de nous recueillir devant Dieu, et de chercher ensemble à ses pieds quelle était sa volonté. Les ténèbres qui s’étaient abattues si subitement sur notre sentier nous paraissaient bien mystérieuses. Mais la lumière se fit peu à peu, et nous nous aperçûmes alors que notre chemin avait changé de direction. Du moment que la fondation de la mission dans le pays des ba-Nyaï était en perd, qu’il ne s’agissait de rien moins que d’y renoncer pour un temps indehm, faute d’un ouvrier, nous comprîmes ce que le Maître demandait de nous, et nous n’hésitâmes pas à obéir. Après dix jours de communion avec Lui, nous pûmes joyeusement faire taire « les conseils de la chair et du sang, » et lui dire une fois de plus dans notre vie : « Nous voici, Seigneur, fais de nous ce qu’il te semblera bon. » 11 a daigné agréer notre offrande, et, comme preuve, il a répandu une paix parfaite dans nos coeurs. La mission dont il nous charge est une mission de confiance et d’honneur dont tout autre eut ete plus digne que nous. Nous sommes hantés par le sentiment pénible de notre incapacité et de notre ignorance ; mais ce qui nous soutient, c’est que Dieu veut bien quelquefois se servir des choses faibles de ce monde pour confondre les fortes, afin que personne ne se glorifie. La question de santé est aussi toujours là comme une menace assez inquiétante, mais nous nous répétons l’un à l’autre que, si le Maître nous appelle, il sait de quoi nous sommes faits, et que d’ailleurs nous ne nous appartenons pas à nous-memes, mais à Celui qui nous a aimés et qui s’est donné lui-même pour nous. L’angélique Hunt disait que les îles Fidji étaient tout aussi près du ciel que l’Anqleterre. Je le crois bien. Nous disons la même chose de ces contrées inconnues où nous allons diriger nos pas. Mais nous n’y serons pas seuls. Vous vous associerez à notre entreprise, vos prières nous soutiendront. Dieu enverra ses anges devant nous pour nous préparer le chemin, et puis, Y Ange de V Éternel lui-même campera tout autour de nous, comme autour du prophète, avec ses milliers d’anges, et nous garantira. Voilà notre confiance^ notre force, notre joie. _ Nous sommes maintenant tout entiers à nos préparatifs de départ. Je me propose, Dieu voulant, de seller mou cheval, la semaine prochaine, et d aller à Natal m’occuper moi-même de nos wagons et de nos achats. Ma chère femme, elle, restera ici pour préparer, avec son activité ordinaire, provisions de route et vêtements, mettre tout en ordre, et « disposer notre maison ». De sorte qu’à mon retour nous n’aurons plus qu’à régler, avec les commissions du synode et de la Conférence, certains détails concernant les catéchistes en particulier et l’expédition en général. Nous espérons pouvoir partir en avril, au plus tard. Jusque-là et alors, ce sera pour nous un temps de fatigues et d’émotions. Le Seigneur a accompli, en quelque mesure, pour nous aussi sa promesse (Mat. XIX, 29). C’est donc une seconde France que nous allons quitter. Je redoute les adieux... Mais le Seigneur nous soutiendra jusqu’au bout. Il sera notre force. Quant à notre itinéraire, il n’est pas encore arrêté. Nous prévalant de certaines ouvertures indirectes du président M. Burgers, nous nous sommes de nouveau adressés aux autorités du Transvaal pour en obtenir un passeport. Nous n’avons pas encore reçu de réponse. Et puis, il nous tarde de savoir quels seront les résultats de la mission dont sir Th. ShepstOne a été chargé par le gouvernement britannique auprès de celui de la République du Transvaal et de Sékoukouni. Jusqu’à présent, les nouvelles sont fort peu rassurantes. Les journaux de ces quartiers parlent d’irruptions faites sur le territoire de la république par les hordes. sauvages de Ketchewayo. D’étranges rumeurs, auxquelles toutefois nous ne pouvons pas nous hâter de donner créance, circulent parmi les natifs. Dans le cas que ce chemin-là nous fût barré, je ne considérerais pas que ce fût un malheur pour nous d’être obligés de prendre le chemin du pays des ba-Mangouato, d’aller même jusqu’à Inyati, dans le pays des ma-Tébélé. Mais le Seigneur, là aussi, nous guidera.


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