chants, plus d’exhortations! Ces blancs travaillaient toute la semaine; ils se reposaient le dimanche et lisaient sans doute la Parole de Dieu ensemble. Pour nous, les bachimane, le jour du Seigneur était comme tous les autres jours; nous mangions, je cuisais, nous dormions, c’est tout. Un jour, j’avais le coeur plein de colère, je trouvais que notre vocabulaire d’injures ne me suffisait pas, et je demandai à Middleton de m’enseigner les plus gros jurons anglais et les malédictions les plus mordantes. Il me dit qu’il les avait oubliés depuis longtemps. « Un dimanche, je lui demandai pourquoi il ne nous faisait pas lire. Il le fit ce jour-là, mais plus après. Je pense qu’il était fatigué. J’avais le coeur bien triste et je me lamentais à part moi. « Si seulement j’avais profité des « instructions de mon père et de ma mère ! Et s’ils n’allaient plus revenir ! » Avec ces pensées qui me tourmentaient, j ’errais à l’aventure dans la forêt. L’idée me vint subitement : « Et si j’essayais de prier seul ! Le morouti dit « que Dieu entend toujours. » Je me jetai à genoux, là-bas, sous ces arbrisseaux, et je criai : « 0 toi ! le grand Dieu que je ne connais pas, aie pitié de « moi ! » Un dimanche qu’il pleuvait et que je ne pouvais pas aller dans le bois, je proposai à Kambourou et autres jeunes gens de chanter des cantiques. <r Volontiers, dit Kambourou, mais nous allons d’abord chanter bonyanga (un « chant païen) et danser. » C’est ce qu’ils firent, et je m’en allai. Ils m’en ont voulu, ils se sont moqués de moi, m’ont donné toutes sortes de noms ; cela m’a poussé à prier davantage. J’étais dans une grande angoisse. Les conseils d’Aaron et de mon père m’ont aidé, et enfin j ’ai trouvé le pardon de mes péchés. « Allez-vous dire : « Voilà Ngouana-Ngombé qui veut devenir un blanc? » Comment deviendrais-je un blanc, moi qui suis né noir? Dieu n’est pas le Dieu exclusif des blancs, tous les blancs né sont pas des croyants, nous en avons déjà vu qui sont mauvais comme nous. Le morouti dit qu’au Lessouto c’est la même chose, il -y a des ba-Souto chrétiens, comme Aaron, mais il y en a qui sont restés païens. Ce sont les ba-Souto chrétiens qui nous apportent l’Évangile qu’ils ont eux-mêmes reçu des chrétiens de France. « J’entends des gens qui se moquent et qui disent : « Est-ce que le mots. routi est donc monté au ciel, qu’il prétende connaître Dieu ? » Non, il n’est jamais monté au ciel, il n’a jamais vu Dieu, il ne l’a non plus jamais dit. Mais Dieu s’est révélé par son Fils et par sa Parole. Je ne vous dirai jamais que j ’ai vu Dieu, mais je vous dirai ce que je sais de sa Parole et comment il m’a sauvé. Non, le morouti n’est jamais monté au ciel. Mais il y va, et moi, son mochimane, je le suis. Je suis le premier, et j ’aurais très peur si je n’étais croyant. Serai-je le seul à le suivre? Vous, mes pères et mes mères, mes thaka (gens de mon âge), ne viendrez-vous pas avec nous? Interrogez-moi beaucoup, quand vous voudrez, ne craignez pas. Ce que j’ai voulu vous dire, c’est que j ’ai trouvé le Dieu inconnu, le grand Dieu, et que je suis un croyant. » Ce simple récit, qui, sous ma plume et par la traduction, perd tant de son coloris, fut écouté avec une profonde attention. Les hommes claquaient la langue d’étonnement, les femmes étaient immobiles, bouche béante; nous, pris par surprise, nous étions émus et nous bénissions Dieu.
27f 90-2
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