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t-elle, et ses suivants de s’écrier: « Tou ka yoyé! » Et l’armée entière, à distance respectueuse, d’acclamer de toute la force de ses poumons : | Tou ka yoyé! Tou ka yoyé! Puissions-nous vivre, compatriotes! Vivent nos compatriotes ! » Elle reprend : « Ba ka foé ! » et sa suite et les troupes de rugir : « Ba kafoë! Ba ka fo é ! Qu’ils meurent, nos ennemis! » C’est le cri de guerre que les échos des bois vont répéter vingt fois le jour pendant des mois entiers. Au retour, en récompense de ses. services, la jeune prophétesse deviendra une des maori, une des femmes du roi. Maintenant elle est sa concubine. Son titre est la sébimbi, et elle porte le sékourouroumé, la corne médicinale. Une fois la halte ordonnée d’après les règles que je viens de décrire, Léwanika et les grands chefs vinrent nous saluer. Pendant que nous causions, une commotion qui paraissait bouleverser le camp attira mon attention. C’était Litia lui-même, le fils du roi, tous les garçons et tous les jeunes gens qui allaient pour la première fois à la guerre, qui couraient à toutes jambes, se précipitaient dans le marais, arrachaient du roseau, venaient le déposer aux pieds du roi, puis retournaient et revenaient sans prendre haleine et en s’écriant : <r Kamariè ! » proprement : une jeune fille; c’est-à-dire vous nous croyez des fillettes impropres à la guerre, eh bien ! vous verrez que nous sommes des hommes et que nous méprisons la fatigue ! On dit que cette petite comédie se répétera à chaque halte. La sébimbi donna le signal du départ, entra dans l’eau, s’aspergea; toute l’armée l’acclama bruyamment, se leva et suivit son exemple. Nous l’eûmes campée à une portée de fusil pendant deux jours. Quelle cohue ! Et de penser qu’elle fait boule de neige ! Depuis lors, des bandes passent sans interruption et vont grossir ce torrent débordé. Je suppose que, quand les contingents du Motoulo, de Nalolo, de Mboéla et de la province de Séchéké seront réunis à la Machilé, Léwanika se trouvera à la tête de 10,000 à 12,000 hommes au moins. Peut-on s’imaginer ce que c’est que cette multitude d’hommes affamés, — car ils n’ont pas de commissariat, — voleurs, pillards, brigands par habitude, sans contrôle et sans frein ? Pour leur subsistance, c’est sur leurs pauvres ma-Khalaka qu’ils vont fondre, et déjà dans leur propre pays t la terreur les précède, la destruction les accompagne et la désolation les suit». Que sera-ce chez les malheureux ma-Choukouloumboué! Ce n’est pas seulement à leur bétail qu’on en veut, mais à leurs femmes et à leurs enfants, qui seront réduits au plus abject des esclavages. Quant aux hommes, eux, on fait leur affaire sans retard et on lès jette en pâture aux bêtes des champs. On dit que les ma-Choukouloumboué, exaspérés, ne font pas plus de quartier que les ba-Rotsi eux-mêmes et qu’ils gardent, pour y boire la bière, les crânes de ceux qui tombent entre leurs mains. Notre école est débandée. Nos élèves vont tous à la curée, compléter, hélas 1 leur affreux apprentissage de brigands. 11 nous semblait que leur éducation fût déjà faite, car, après avoir mangé nos moutons, tué nos ânes, volé mes baromètres anéroïdes, ils ont trouvé le moyen de soudoyer une de nos petites filles et de s’approprier nos meilleures serviettes, sans compter mille et un autres exploits dont se vantent ces jeunes chevaliers d’industrie. Et pourtant, nous les regrettons. Nous pensons avec tristesse aux mois qu’ils ont passés ici, au peu d’influence que nous avons gagnée sur eux. Nous ne nous faisons pas illusion sur le zèle qu’ils promettent d’apporter à l’école à leur retour. Nous savons aussi la valeur des belles professions de Léwanika. Pauvre Léwanika ! Aaron, lui aussi, lui a parlé avec la fermeté virile d’un Michée. Il sent bien qu’il fait mal. Pendant notre dernier entretien, il se tordait sur sa chaise et il finit par me dire : t Vois-tü, mon morouli, je ne suis pas mon maître, j ’y suis poussé, j’y suis poussé. Mais, si tu as de l’affection pour moi, garde le silence, ne va pas gâter mon nom dans le monde en écrivant que Léwanika est allé faire une razzia chez les ma-Choukouloumboué, et, à mon retour, tu verras ! » Ah ! en pensant à ce retour, nous frémissons, nous. Qui peut prédire les conséquences morales'— immorales, disons plutôt, et politiques aussi bien, de ces cinq ou six mois de dévergondage national, du déchaînement des passions de toutes ces tribus sauvages, et de cette terrible ivresse qui s’empare de l’homme dès qu’il trempe les mains dans le sang de son frère, et le transforme en une bête féroce, une hyène qui déchire en ricanant !... Mars i3-22. Léwanika, tout en drainant le pays pour son expédition, n’a pas pris tous les voleurs avec lui. Récemment, par une nuit obscure, quelques-uns de ces vagabonds nous ont fait l’honneur d’une visite. Ils ont fait une trouée à notre « kraàl », en ont sorti un boeuf de leur choix, qu’ils ont tué et dépecé à loisir. Par politesse, ils nous ont laissé la carcasse, mais aussi bien curée que si une nuée de vautours avait été de la partie. Le roi l’a appris et, dans son indignation, m’a fait mander de saisir les coquins et de les faire tancer par je ne sais qui. Fort bien; il oublie seulement que ces messieurs n’ont pas l’habitude de laisser leur adresse ! La reine Mokouaé, une ou deux des principales femmes du roi, et d’autres princesses, accompagnées du vieux Narouboutou, sont venues de Nalolo et de Léalouyi faire un petit séjour ici. C’était aimable de leur part, car elles pensaient que depuis le départ du roi nous devions nous ennuyer à ne pas savoir que faire de nous-mêmes ! Elles me consolaient du vol de mon boeuf


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